Suite à la conclusion d’une promesse de vente portant sur une maison, le notaire chargé de la rédaction de l’acte authentique notifie successivement l’acte à l’acquéreur au moyen de deux lettres recommandées avec demande d'avis de réception. La première lui est retournée avec la mention « pli non distribuable » et « boîte non identifiable ». La seconde lui revient avec la mention « non réclamée ». L’acquéreur refuse de réitérer la vente.

La venderesse les assigne en paiement du montant de la clause pénale stipulée à l'acte. Déboutée par le jugement rendu en première instance, la venderesse assigne les notaires en responsabilité et en indemnisation. La Cour d’appel de Nîmes accueille sa demande, en retenant que les deux lettres recommandées adressées à l’acquéreur n'ont pas été réceptionnées par celui-ci et que, par conséquent, le délai de rétractation prévu par l'article L. 271-1 CCH n'a pas couru à son égard. Elle retient également qu'il appartenait au notaire de prendre toutes mesures nécessaires afin d'assurer l'efficacité de la notification du compromis de vente, de tenter une notification par un autre mode de délivrance et d'avertir la venderesse de la difficulté rencontrée.

La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel au visa des articles L. 271-1 CCH et 1382, devenu 1240 du code civil dans les termes suivants : « Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations, que, régulièrement avisé le 29 juillet 2010, M. C... s'était abstenu d'aller retirer sa lettre recommandée à la poste, la cour d'appel a violé les textes susvisés ».

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Deux enseignements peuvent être retirés de cet arrêt :

  • Le point de départ du délai de rétractation édicté par l’article L. 271-1 CCH est le lendemain de la présentation de la lettre recommandée, même si celle-ci n’est pas réclamée par son destinataire.
  • Le notaire qui a adressé la notification par lettre recommandée n’engage pas sa responsabilité si celle-ci a été présentée à l’adresse de l’acquéreur et qu’elle est revenue avec la mention « non réclamée ». Il n’a pas à tenter une nouvelle notification par un autre mode de délivrance comme l’avait retenu la Cour d’appel de Nîmes.

La situation est tout autre lorsque le pli revient avec la mention «pli non distribuable » et « boîte non identifiable » ou « destinataire inconnu à cette adresse » car, dans ce cas, la lettre n’a pu être « présentée » au sens de l’article L. 271-1 CCH. Le notaire doit alors procéder à une nouvelle notification.

 
Références :
- Efficacité de la notification « SRU » non retirée à la poste, Defrénois Flash n°10, 2018, n° 144f1.
- V. Matet, Le délai de dix jours de l’article L. 271-1 du CCH court contre l’acquéreur s’abstenant de retirer la lettre recommandée régulièrement présentée, Nota-Bene, Février 2018, n° 226.
- Quand l'acquéreur s'abstient d'aller retirer sa lettre recommandée à la poste lui notifiant son compromis : responsabilité du notaire ?, JCP N, n° 11, 16 mars 2018, p. 16, actu 303.