Au cours de l’année 2024, La Fédération Française de Rugby, déjà bien malmenée par l’affaire du viol aggravé dont étaient accusés deux joueurs du XV de France depuis début juillet en Argentine, s’est vue impliquée dans deux décès tragiques de jeunes rugbymen, ayant échappé à la surveillance de leurs encadrants.
Il s’agit de deux noyades coup sur coup, à l’occasion d’activités en marge du rugby (une séance de récupération dans l’eau pour l’un, une sortie plein air avant un entraînement pour l’autre) dans les deux cas, sous la responsabilité des organisateurs (la Fédération et le club).
La responsabilité civile des clubs ou fédérations : comment ça fonctionne ?
Petit rappel :
Un joueur « licencié » d’un club est en réalité lié par deux contrats :
- l’un avec son Club,
- l’autre avec la Fédération Française auprès de laquelle son club est affilié.
Quand il pratique son sport, à l’occasion d’entraînements, de stages ou de compétitions, il s’agit de « l’exécution du contrat » et il se trouve sous la responsabilité civile contractuelle des « organisateurs d’APS – Activités Physiques et Sportives- » (ce sera selon les circonstances celle du Club ou de la Fédération).
Quelles obligations pèsent sur un Club de sport ou la Fédération ?
Clubs et Fédérations ont comme obligation essentielle envers leurs pratiquants la sécurité à laquelle s’ajoutent la prudence et la diligence envers les sportifs, ou encore l’obligation de conseil et d’information ; les organisateurs doivent répondre de tout manquement et des fautes commises par toutes personnes auxquelles ils font appel pour organiser la pratique sportive.
On parle ici d’une obligation de moyens (par opposition à une obligation de résultat) qui peut varier en fonction des circonstances, du comportement des sportifs, de leur âge et de leur niveau.
L’obligation sera notamment renforcée en cas de sport à risque ou de pratique par des mineurs.
L’obligation de sécurité suppose dans tous les cas de ne pas exposer les sportifs à des risques inconsidérés.
L’organisateur doit par exemple adapter les exercices ou activités proposées aux connaissances, aptitudes et capacités du pratiquant en fonction de son niveau et de son âge.
Il doit également bien choisir les installations ou les sites de pratiques.
Enfin il a une obligation au titre de l’encadrement et de la surveillance de la pratique proposée, incluant une surveillance médicale (être informé de l’état physique et psychologique des pratiquants) ainsi qu’une obligation d’organiser la sécurité et les secours.
Nb : Parfois l’obligation de sécurité est tellement renforcée qu’on parle d’une obligation de résultat (C’est le cas lorsque le pratiquant est totalement passif à l’occasion de l’activité comme par exemple dans un vol d’initiation au parapente en biplace.)
En cas d’accident ou de blessure, comment ça marche ?
En cas de dommages, la victime doit prouver le manquement du club ou de la Fédération à son obligation. Il lui faut prouver la faute du club ou de la fédération en relation avec l’accident.
En l’occurrence les familles endeuillées n’auront pas de difficulté à faire cette démonstration car dans les deux cas, l’encadrant vient de reconnaître sa faute ;
- Pour la disparition du jeune Medhi Narjissi, la FFR a confessé les manquements des encadrants de l’Équipe de France U18 indiquant : « la décision d’organiser une séance de récupération dans l’eau sur la plage de Dias Beach a été prise sans considérer la dangerosité du site » et que les « risques (…) ont pu être perçus au moins par un conseiller technique sportif » en amont de l’activité. « Le déroulement et l’encadrement de la séance semblent avoir été mal maîtrisés, faute notamment de consignes claires d’encadrement données aux membres du staff et aux joueurs »
- Concernant Maagi Jessop, pratiquant âgé de 13 ans du Club de Sigave de l'île de Futuna, qui s'est noyé lors d'un stage rugby le 22 mai 2024, la responsable de la sortie reconnaît son défaut de vigilance et de surveillance : « (…)Nous avons donc décidé de faire une balade au lieu-dit Vaifau pour l'échauffement et revenir au rugby. Organisation : 4 accompagnateurs et 32 jeunes joueurs (de U10 à U14). (…). À l'arrivée, 2 surveillants sur la berge (…) et 2 dans l'eau avec les gamins. Drame : au moment de partir, je les rassemble pour une photo et là, je me rends compte qu'il manquait Maagi. Il a échappé à ma vigilance. »
La plus grande vigilance est naturellement demandée aux Clubs et Fédération auxquels les familles confient leurs enfants mineurs. La confiance est indispensable.
Cela nous renvoie également au fait que les assureurs doivent proposer des contrats à même d’indemniser correctement les dommages liés à la pratique du sport.
J’aurai du reste l’occasion de parler assurances sportives prochainement.
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