Le Président du Tribunal de commerce de Paris a, par ordonnance de référé du 12 mai 2020, condamné AXA France IARD à verser à un restaurateur une somme provisionnelle à titre d’indemnisation des pertes d’exploitation subies du fait du confinement (T. com. Paris, 22 mai 2020, aff. n° 2020017022).

Cette solution, largement relayée, doit être nuancée.

En effet, loin d’avoir une portée générale, elle ne vaut que pour le contrat précis dont était saisi le Président du Tribunal à savoir :

  • un contrat d’assurance ;
  • garantissant les pertes d’exploitation subies ;
  • en cas de fermeture imposée par une autorité administrative compétente ;
  • ne prévoyant aucune clause d’exclusion de garantie en cas d’épidémie ou de pandémie.

Bien que non générale, l’intérêt de la décision reste entier, ce qui justifie son analyse.

D’abord, de manière parfaitement évidente, le juge a retenu que la condition d’urgence propre à la procédure de référé était remplie au regard des déficits de trésorerie causés par le confinement.

Ensuite, il a fait échec à la stratégie de la Société d’assurance qui, ne pouvant invoquer de clause d’exclusion de garantie, a cru pouvoir alléguer du caractère prétendument inassurable du risque pandémique.

Sur ce point, le juge a justement rappelé que, faute de texte général excluant par principe une telle garantie, il lui revenait de faire application de la lettre du contrat et donc de constater l’absence de clause d’exclusion.

Enfin, le juge a rejeté l’argument de la Société d’assurance selon lequel la garantie ne pouvait jouer dans la mesure où l’arrêté du 14 mars 2020 n’imposait pas la fermeture de l’établissement mais seulement de ne plus recevoir du public, ce qui autorisait la vente à emporter et excluait donc la mise en œuvre du contrat.

Après avoir constaté que les restaurants en question n’avaient jamais exercé une telle activité et qu’elle n’était pas possible, le juge a retenu que l’interdiction de recevoir du public constituait bel et bien une fermeture administrative totale ou partielle du restaurant au sens du contrat d’assurance, ce qui justifiait son exécution forcée.

Cette décision encourageante doit amener les commerçants bénéficiant d’une assurance « pertes d’exploitation » à se rapprocher de leurs conseils afin d’étudier avec soin les clauses de leurs contrats pour faire pleinement valoir leurs droits.

Une attention toute particulière devra être portée en cas de clause excluant la garantie « si, à la date de la décision de fermeture, au moins un autre établissement a fait l’objet, sur le même territoire, d’une même mesure pour une cause identique » dont la validité est loin d’être évidente.