Le cadre législatif posé par l'article L631-7-1-A du Code de la construction

Le législateur a prévu la faculté de prévoir localement un régime d'autorisation temporaire de changement d'usage pour les meublés de tourisme.

La délibération adoptée doit prévoir les critères de cette autorisation temporaire qui peuvent porter sur la durée des contrats de location, les caractéristiques physiques du local et sa localisation.

Le législateur ajoute que ces critères peuvent être modulés en fonction du nombre d'autorisations accordées à un même propriétaire personnes physiques.

"Une délibération du conseil municipal peut définir un régime d'autorisation temporaire de changement d'usage permettant à une personne physique de louer pour de courtes durées des locaux destinés à l'habitation à une clientèle de passage qui n'y élit pas domicile.

La délibération fixe les conditions de délivrance de cette autorisation temporaire par le maire de la commune dans laquelle est situé l'immeuble après avis, à Paris, Marseille et Lyon, du maire d'arrondissement concerné. Elle détermine également les critères de cette autorisation temporaire, qui peuvent porter sur la durée des contrats de location, sur les caractéristiques physiques du local ainsi que sur sa localisation en fonction notamment des caractéristiques des marchés de locaux d'habitation et de la nécessité de ne pas aggraver la pénurie de logements. Ces critères peuvent être modulés en fonction du nombre d'autorisations accordées à un même propriétaire personne physique." (Code de la construction et de l'habitation, L631-7-1-A).

 

Les caractéristiques du règlement adopté : quotas par propriétaires et par quartiers

Le règlement adopté à Saint-Malo prévoit à la fois des quotas par propriétaire et par zones géographiques :

  1. l’autorisation ne peut être accordée que dans la limite d’une seule autorisation par personne physique propriétaire du local.
  2. en considération des différentes zones du territoire communal, des pourcentages de logements pouvant être simultanément autorisés dans chaque zone à la location meublées pour de courtes durées, par rapport au nombre total de logements de chacune des zones.

Le règlement ainsi adopté semble avoir dépassé le cadre d'une modulation du nombre d'autorisations accordées à un même propriétaire personne physique, en prévoyant également un quota par quartier (pourcentage maximal par rapport au nombre total de logement).

 

Position des juges et portée de ce jugement

Les juges valident les quotas par propriétaire :

"Le dispositif mis en place, en tant qu’il est limité à un bien par personne physique propriétaire, n’apparaît pas discriminatoire, au regard des modalités particulières de l’autorisation et des objectifs poursuivis, qui visent à limiter les fortes tensions qui s’exercent dans la commune sur le marché de la location de locaux à usage d’habitation." (Tribunal Administratif de Rennes, 17 octobre 2024, n°2104171).

Ils valident également les quotas par secteur géographique :

"S’agissant de l’instauration de quotas par quartiers, l’article L. 631-7-1 A du code de la construction et de l’habitation prévoit expressément que la localisation des locaux peut figurer parmi les critères de l’autorisation temporaire sous certaines conditions.

[...]

Par ailleurs, les règlements adoptés successivement comportent des dispositions suffisamment claires, transparentes et accessibles, dès lors qu’ils précisent les conditions d’obtention des autorisations, notamment selon que le pourcentage de logements susceptibles d’obtenir une autorisation dans le secteur considéré est atteint ou non, l’inscription sur une liste d’attente, l’éventuel accord tacite en cas de défaut de réponse de l’administration dans un délai de deux mois ou le suivi d’une demande d’un propriétaire lorsqu’une réponse négative est apportée pour cause de pourcentage déjà atteint dans le secteur. "  (Tribunal Administratif de Rennes, 17 octobre 2024, n°2104171).

Ce jugement interpelle en ce que la modulation par quartiers n'apparaît fondée sur aucune habilitation législative claire, prévoyant de tels quotas. Or, les restrictions au droit de propriété relèvent du législateur (Conseil Constitutionnel, Décision n° 2014-691 DC du 20 mars 2014, Loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, 7°).

Si le texte prévoit effectivement que la localisation du local soit un critère de l'autorisation, ce dont on peut déduire que certains quartiers peuvent légitimement être privés de la possibilité d'une telle autorisation, il n'est fait aucune référence claire à des quotas.

Le législateur n'a d'ailleurs aucunement précisé comment départager les propriétaires et une règle fondée sur le maintien des bénéficiaires en place et une liste d'attente paraît peu satisfaisante du point de vue de l'égalité de traitement.

Les rédacteurs des règlement doivent donc demeurer prudents dans l'attente d'une évolution législative ou d'une jurisprudence plus complète et stabilisée, à tout le moins d'une Cour administrative d'appel, confirmant cette interprétation du Tribunal Administratif de Rennes.

Les propriétaires doivent également redoubler d'attention concernant le maintien de l'autorisation temporaire dont ils bénéficient.

Les acquéreurs doivent également tenir compte des potentielles difficultés pour obtenir une telle autorisation, lorsqu'une acquisition est motivée par le souhait d'en obtenir une.

 

Le cabinet est à votre écoute :

  • Pour vous assister dans l'analyse et la mise en oeuvre de la règlementation nationale et locale concernant les meublés de tourisme ;
  • Pour vous aider à prévenir, mesurer et éviter les risques induits dans le cadre de votre projet ;
  • Pour vous accompagner dans la régularisation, et le cas échéant, en cas de litige lié aux mesures adoptées par l'administration locale ;
  • Plus globalement, sécuriser juridiquement votre projet en identifiant, évaluant et prévenant les risques juridiques.

Goulven Le Ny, avocat au Barreau de Nantes

goulven.leny@avocat.fr - 06 59 96 93 12 - glenyavocat.bzh