Dans une récente décision, le Conseil d'Etat a précisé que l'attribution d'un titre d'occupation du domaine public devait respecter les principes de transparence, de publicité et d'impartialité prévus par la Directive "services" adoptée au niveau européen, y compris avant la réforme de 2017 du Code général de la propriété des personnes publiques dans lequel l'obligation de mise en concurrence a été posée par le législateur.
"5. Par ailleurs, si l'article L. 2122-1-1 du code général de la propriété des personnes publique, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 19 avril 2017 relative à la propriété des personnes publiques, dispose que, sauf dispositions législatives contraires, la délivrance par l'autorité compétente d'un titre permettant à son titulaire d'occuper ou d'utiliser le domaine public en vue d'une exploitation économique doit être précédée d'une procédure de sélection préalable présentant toutes les garanties d'impartialité et de transparence, et comportant des mesures de publicité permettant aux candidats potentiels de se manifester, ces dispositions, applicables aux titres délivrés à compter du 1er juillet 2017, ne l'étaient donc pas à la date de signature de la convention contestée. 6. Toutefois, aux termes des dispositions de l'article 12 de la directive du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur, dont le délai de transposition expirait le 28 décembre 2009 : " Lorsque le nombre d'autorisations disponibles pour une activité donnée est limité en raison de la rareté des ressources naturelles ou des capacités techniques utilisables, les Etats membres appliquent une procédure de sélection entre les candidats potentiels qui prévoit toutes les garanties d'impartialité et de transparence, notamment la publicité adéquate de l'ouverture de la procédure, de son déroulement et de sa clôture ". Ces dispositions, relatives à la liberté d'établissement des prestataires, sont susceptibles de s'appliquer aux autorisations d'occupation du domaine public, ainsi que l'a jugé la Cour de justice de l'Union européenne par son arrêt du 14 juillet 2016, Promoimpresa Srl, aff. C-458/14 et C-67/15, y compris lorsqu'est en cause une situation dont tous les éléments pertinents se cantonnent à l'intérieur d'un seul Etat membre, comme l'a jugé la Cour par son arrêt du 30 janvier 2018, College van Burgemeester en Wethouders van de gemeente Amersfoort contre X BV et Visser Vastgoed Beleggingen BV contre Raad van de gemeente Appingedam, aff. C-360/15 et C-31/16. La cour administrative d'appel, qui était saisie d'un moyen tiré de ce que la réglementation édictée par le Sénat en matière de contrats d'occupation du domaine public méconnaissait le droit de l'Union européenne à la fois au regard du principe de non-discrimination issu de l'article 49 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et des dispositions de la directive du 12 décembre 2006, s'est bornée à relever que la convention contestée ne présentait pas d'intérêt transfrontalier certain, pour en déduire que le requérant ne pouvait utilement se prévaloir du principe de non-discrimination. En jugeant que l'absence d'intérêt transfrontalier certain avait pu légalement dispenser le Sénat d'organiser une procédure de mise en concurrence avant la signature du contrat, alors qu'une telle circonstance était sans incidence sur l'application de la directive du 12 décembre 2006, la cour a entaché son arrêt d'erreur de droit."
En d'autres termes, et y compris avant la réforme de 2017, une procédure de mise en concurrence pourrait être considérée comme requise et cette obligation méconnue si les formalités n'ont pas respectées.
Ce faisant, le Conseil d'Etat revient sur sa traditionnelle jurisprudence "Jean Bouin" selon laquelle la conclusion d'autorisations documentation du domaine public ou de conventions et contrats relevant de cette catégorie n'était pas précédée d'une procédure de mise en concurrence. Cette situation génère une insécurité juridique pour les gestionnaires du domaine public que sont les collectivités territoriales, leurs satellites et partenaires (sociétés d'économie mixte, sociétés publiques locales, délégataires et concessionnaires) qu'il faut évaluer au cas par cas. Les risques peuvent être :
- administratifs (contestation ou demande de résiliation par un tiers, nécessité éventuelle de résilier ou remettre de concurrence) ;
- pénaux, notamment en application des dispositions relatives au devoir de probité des personnes exerçant une fonction publique (élus ou agents) ;
- financiers, dans le cadre du contrôle exercé par les chambres régionales des comptes.
Le cabinet est à votre écoute pour étudier votre situation, évaluer ces risques et vous conseiller sur les mesures à adopter.
Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 10/07/2020, 434582
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