Le casier judiciaire national est la mémoire de la justice pénale. Son organisation en bulletins de contenus et d’accès différents en fait sa spécificité, sorte d’« échelle légale », opérant un classement entre différentes catégories de destinataires, et visant ainsi à protéger le citoyen contre un accès trop large ou indu à certaines informations. 

1. Histoire du casier judiciaire national

Le casier judiciaire national a été impulsé en 1848 par Arnould BONNEVILLE de MARSANGY, un magistrat et publiciste français. Il est l’héritier des sommiers judiciaires, créés en messidor an VIII (juin-juillet 1800) sous le nom de registre général des condamnations et qui avaient pour fonction de mémoriser la peine, à la préfecture de police. L’objectif était de rassembler et de classer les fiches de condamnations au greffe de la juridiction du lieu de naissance des personnes condamnées. Son application a été organisée par une circulaire du 6 novembre 1850 du garde des Sceaux Eugène ROUHER.

La loi du 4 janvier 1980 et le décret du 6 novembre 1981 ont institué un service national placé sous l’autorité du ministre de la Justice qui permet de rassembler les fiches des casiers judiciaires de toutes les personnes nées en France et d’en automatiser les traitements. Le casier judiciaire national a été inauguré par le garde des Sceaux Robert BADINTER le 8 juin 1982. Il a été localisé à NANTES, où le casier central (compétent pour les personnes nées à l'étranger, enrichi des fichiers issus de la décolonisation) a été délocalisé en 1966 (il était initialement Place Vendôme). Il n’est cependant pas encore compétent pour l’ensemble des territoires d’outre-mer.

Le casier judiciaire national est tenu sous l’autorité du ministre de la Justice (article 768 du code de procédure pénale). Il est dirigé par un magistrat de l'administration centrale du ministère de la Justice sous le contrôle et l'autorité du directeur des affaires criminelles et des grâces (article R. 62 du code de procédure pénale).

2. Données traitées par le casier judiciaire national

Le casier judiciaire concerne tant les personnes physiques que morales et comprend les condamnations pénales, ainsi que les décisions disciplinaires, civiles, commerciales et administratives qui privent les personnes physiques de l’exercice de certains droits.  

Les décisions suivantes ne font pas l’objet d’un enregistrement :

  • la relaxe et l’acquittement,
  • la restitution de scellés,
  • les contraventions des quatre premières classes non inscriptibles,
  • les compositions pénales des contraventions des quatre premières classes,
  • la condamnation effacée par l’amnistie,
  • la décision sur requête irrecevable,
  • la dispense de peine assortie d’une exclusion au bulletin n°1,
  • l’exemption de peine et la constitution abusive de partie civile,
  • la mesure de réparation s’agissant d’un mineur délinquant, la responsabilité pécuniaire en matière de circulation et l’amende civile.

Le casier judiciaire restitue l’information sous forme de relevé et extraits : le relevé intégral appelé bulletin n°1, les bulletins n°2 et n°3, ainsi que le bulletin électoral. 

Outre les transmissions des bulletins, le service du casier judiciaire communique lui aussi certaines informations (articles 772 et suivants du code de procédure pénale) :

  • aux autorités militaires (les condamnations et les décisions de nature à modifier les conditions d'incorporation des individus soumis à l'obligation du service militaire et toutes les modifications apportées à la fiche ou au casier judiciaire) ;
  • à l’INSEE (l’identité des personnes privées de leurs droits électoraux) ;
  • au sommier de police technique tenu par le ministre de l’intérieur (une copie de chaque fiche constatant une condamnation à une peine privative de liberté prononcée pour crime ou délit).

3. Principaux bulletins du casier judiciaire national 

3.1. Bulletin n°1

Le bulletin n°1, relevé intégral du casier judiciaire, n’est délivré qu’aux autorités judiciaires nationales (sauf accord de réciprocité), aux greffes des établissements pénitentiaires et aux directeurs des services pénitentiaires d'insertion et de probation (articles 774 et 774-1du code de procédure pénale).

Le bulletin n°1 peut être communiqué par l’autorité judiciaire notamment aux experts et avocats en ce qu’il constitue une pièce de la procédure (Circulaire du 23 mai 2014).

Par ailleurs, toute personne justifiant de son identité obtient, sur demande adressée au procureur de la République, communication du relevé intégral des mentions du casier judiciaire la concernant. Aucune copie ne peut être remise, il s’agit en pratique d’une simple consultation au palais de Justice (article 777-2 du code de procédure pénale).

Le bulletin n°1 est délivré sur instruction de l’autorité requérante, après vérification de l’identité de l’intéressé ou de l’immatriculation de la personne morale (articles R. 76 et suivants du code de procédure pénale). En l’absence de vérification positive, la mention « aucune identité applicable » est indiquée et si l'intéressé est né hors de la France métropolitaine, si son lieu de naissance est inconnu ou s'il est âgé de moins de douze ans, le service inscrit sur le bulletin n°1 « Identité non vérifiable par le service » (article 77 du code de procédure pénale).

S'il existe une ou plusieurs fiches du casier judiciaire, la teneur ainsi que celle des mentions prévues à l'article 769 de code de procédure pénale, en est reproduite sur le bulletin n° 1. A défaut, le bulletin n° 1 est revêtu de la mention « néant » (article R. 78 du code de procédure pénale).

Les mentions figurant au bulletin n°2 sont définies par l'article 769 du code de procédure pénale :

  • peines ou dispenses de peines prononcées après ajournement du prononcé de la peine
  • grâces
  • commutations ou réductions de peines
  • décisions qui suspendent ou qui ordonnent l'exécution d'une première condamnation
  • décisions prises en application du deuxième alinéa de l'article 728-4 ou du premier alinéa de l'article 728-7
  • décisions de libération conditionnelle et de révocation
  • décisions de surveillance judiciaire et de réincarcération prises en application de l'article 723-35
  • décisions de surveillance de sûreté
  • décisions de rétention de sûreté
  • décisions de suspension de peine,
  • réhabilitations
  • décisions qui rapportent ou suspendent les arrêtés d'expulsion
  • date de l'expiration de la peine et du paiement de l'amende
  • Il est fait mention, sur les fiches du casier judiciaire relatives à des décisions de rétention de sûreté ou de surveillance de sûreté, des décisions de renouvellement de ces mesures...

3.2. Bulletin n°2

Le bulletin n°2 ne peut être délivré qu’aux administrations et autorités énumérées par la loi et le règlement (articles 776, 776-1 et R. 79 du code de procédure pénale). Un grand nombre peuvent désormais en obtenir une copie dans des situations variables comme l’accès à un emploi public, l’accès à certaines professions, l’obtention d’une distinction honorifique, une demande d’agrément en vue d’adoption, une demande d’autorisation de port d’arme ou d’un titre de séjour, une demande d’acquisition de la nationalité française…

Lorsqu'il n'existe pas au casier judiciaire de fiche ou lorsque les mentions que portent les fiches ne doivent pas être inscrites sur le bulletin n°2, celui-ci est revêtu de la mention « néant » (article R. 81 du code de procédure pénale).

Les mentions figurant au bulletin n°2 sont définies par les articles 775 et 775-1 A du code de procédure pénale. Il s’agit de la plupart des condamnations pour crimes ou délit, à l’exclusion notamment des condamnations contre les mineurs, des compositions pénales, des dispenses et ajournement de peine, des condamnations non-avenues (sauf en cas de suivi socio-judiciaire, d’interdiction d’exercer une activité en contact habituel avec un mineur, d’inéligibilité, d’interdiction, incapacités ou déchéances définitives à titre de peine complémentaire qui restent inscrites le temps de la mesure).  

3.3. Bulletin n°3

Le bulletin n°3 ne peut être délivré qu’à la personne qu’elle concerne ou son représentant légal. La demande peut être faite directement sur internet, un nouveau site ayant d’ailleurs été mis en place à cet effet en septembre 2018, permettant un retour numérique du document (https://casier-judiciaire.justice.gouv.fr - articles 777 et R. 82 du code de procédure pénale). Ce bulletin est parfois demandé par des employeurs privés avant un recrutement.  

Contrairement aux bulletins n°1 et n°2, lorsqu'il n'existe pas au casier judiciaire de fiche ou lorsque les mentions que portent les fiches ne doivent pas être inscrites sur le bulletin n°3, celui-ci est oblitéré par une barre transversale et non une mention « néant ». C’est dans cet unique cas que la délivrance du bulletin peut être faite par voie électronique, sinon la délivrance du bulletin est faite soit par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, soit par remise en mains propres si le demandeur s'est présenté au service du casier judiciaire pour présenter la demande (article R. 84 du code de procédure pénale).

Les mentions figurant au bulletin n°3 sont restrictivement définies par l’article 777 du code de procédure pénale :

  • les condamnations françaises ou étrangères à des peines privatives de liberté d'une durée supérieure à deux ans qui ne sont assorties d'aucun sursis ou qui doivent être exécutées en totalité par l'effet de révocation du sursis
  • condamnations à des peines privatives de liberté d'une durée inférieure ou égale à deux ans qui ne sont assorties d'aucun sursis ou qui doivent être exécutées en totalité par l'effet de révocation du sursis (si la juridiction en a ordonné la mention au bulletin n° 3)
  • condamnations à des interdictions, déchéances ou incapacités prononcées par une juridiction nationale sans sursis, en application des articles 131-6 à 131-11 du code pénal32 (pendant la durée des interdictions, déchéances ou incapacités)
  • décisions prononçant le suivi socio-judiciaire ou la peine d'interdiction d'exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs (pendant la durée de la mesure). 

 


EN SAVOIR + : 


SOURCES :