Selon l'article L1226-8 du code du travail, lorsque, à l'issue d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, le salarié est déclaré apte par le médecin du travail, il retrouve son emploi ou un emploi similaire assorti d'une rémunération au moins équivalente. Ce même article précise que les conséquences de l'accident ou de la maladie professionnelle ne peuvent entraîner pour l'intéressé aucun retard de promotion ou d'avancement au sein de l'entreprise.

Dans cette affaire qui a conduit la Cour de cassation à rendre un arrêt le 24 mars 2010, le salarié chauffeur avait été déclaré apte à reprendre le travail après avoir bénéficié d'un arrêt pour accident du travail. A cette occasion, l'employeur avait modifié la tournée initiale de son salarié, ce qui impliquait un départ et un retour dans une ville qui n'était plus celle du lieu de résidence dudit salarié. Considérant que ces modifications changeaient la nature de son emploi et impliquaient un déménagement qui n'avait pas à lui être imposé, le salarié a refusé cette nouvelle tournée, ce qui a conduit l'employeur à lui notifier un licenciement pour faute grave.

Contestant la légitimité de son licenciement, le salarié s'est adressé au juge du travail. La cour d'appel a rejeté la demande du salarié en considérant notamment que « le seul changement du point de départ d'une tournée qui n'est pas modifiée en ce qui concerne les clients desservis ne constitue pas une modification du contrat de travail ; l'employeur n'imposait pas au salarié la fixation de son domicile au nouveau lieu de départ de la tournée ; un déménagement éventuel n'apparaissait alors que comme la conséquence d'un choix personnel du salarié ; au demeurant les fonctions de chauffeur routier impliquent nécessairement des changements d'itinéraires sans que cela entraîne une modification du contrat de travail ». Ainsi, les juges du fond ont estimé que l'employeur proposait bien un emploi similaire et que le refus de ce poste par le salarié légitimait le licenciement pour faute grave de ce dernier.

Après avoir rappelé que l'emploi similaire imposé par l'article L1226-8 du code du travail s'entend d'un emploi comportant le même niveau de rémunération, la même qualification, ainsi que les mêmes perspectives de carrière que l'emploi initial, la Cour de cassation impose aussi aux juges du fond de comparer concrètement les conditions du poste proposé par rapport à celui précédemment occupé et d'en tirer toutes les conséquences en cas de modifications importantes. En l'espèce, la haute juridiction estime que la Cour d'appel ne pouvait considérer que l'emploi proposé était un emploi similaire dès lors qu'elle avait constaté qu'avant la suspension de son contrat de travail pour accident du travail, le salarié prenait son service à Aubagne (département des Bouches-du-Rhône) près du lieu où il résidait pour effectuer des tournées dans la région PACA et qu'à l'issue de la suspension de son contrat de travail, il lui était demandé pour effectuer la même tournée de prendre désormais son service le lundi matin au départ de Bavilliers (département du Territoire de Belfort) avec retour le vendredi après la livraison des clients à Bavilliers.

En quelque sorte, au prétexte de proposer un même poste, une même rémunération et une même qualification, l'employeur ne peut imposer une modification substantielle d'exécution du contrat de travail au retour d'un accident du travail.

Jean-Philippe SCHMITT

Avocat à DIJON (21)

Spécialiste en droit du travail

11 Bd voltaire - 21000 DIJON

03.80.48.65.00

jpschmitt@audard-schmitt.com

Cass. soc., 24 mars 2010, n° 09-40.339 P+B