L'une des règles en matière de sanction disciplinaire est la prescription de deux mois, ce qui signifie que l'employeur ne peut plus se prévaloir de faits, qu'il estime fautifs, ancien de plus de 2 mois pour sanctionner son salarié (sauf à ce qu'il prouve qu'il n'en a pas eu immédiatement connaissance).

Cet arrêt de la Chambre sociale de la cour de cassation rappelle que l'employeur peut exceptionnellement tenir compte de fautes antérieures pour sanctionner des faits « récents » dont il a pris connaissance depuis moins de 2 mois. C'est notamment le cas lorsque les faits nouveaux, s'ajoutant à des faits antérieurs qu'il avait accepté de ne pas sanctionner en leur temps, témoignent de la persistance du salarié dans son comportement fautif.

Dans cette affaire, l'employeur avait licencié une salariée pour faute grave en raison notamment de ses absences injustifiées qui avaient causé la perte d'un marché. Celle-ci avait alors soutenu que ces absences injustifiées ne pouvaient plus être sanctionnées, car elles étaient antérieures de plus de 2 mois au jour où il avait engagé la procédure de licenciement.

La Cour de cassation relève que postérieurement à ces absences injustifiées ayant causé la perte d'un marché, la salariée avait été de nouveau absente sans motif légitime. Dès lors, aucun de ces manquements, qui étaient de même nature, n'était prescrit : ils pouvaient donc être sanctionnés.

Jean-Philippe SCHMITT

Avocat à DIJON (21)

Spécialiste en droit du travail

03.80.48.65.00

Cass. Soc. 17 juin 2009, pourvoi n°08-41462

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Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du mercredi 17 juin 2009

N° de pourvoi: 08-41462

Non publié au bulletin Rejet

M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président), président

Me Balat, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 20 septembre 2007), que Mme X..., engagée le 7 mars 2001 en qualité d'agent d'entretien par la société Das Neves nettoyage, a été licenciée pour faute grave le 14 septembre 2004 ;

Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes, alors, selon le moyen :

1°/ que l'employeur doit engager les poursuites dans les deux mois qui suivent la date à compter de laquelle il a connaissance des faits fautifs ; qu'en retenant à sa charge l'existence d'une faute grave constituée par des absences ayant causé la perte du marché de nettoyage de la "Résidence Val-de-Marne", cependant qu'il est constant que l'employeur a été informé des absences alléguées de la salariée et de la résiliation consécutive du marché par un courrier du syndic de l'immeuble du 26 avril 2004, et que la procédure de licenciement a été engagée le 3 septembre 2004, ce dont il résulte que les faits invoqués par l'employeur pour justifier le licenciement étaient prescrits au jour de l'engagement de la procédure de sanction, la cour d'appel a violé l'article L. 122-44, alinéa 1, du Code du travail, devenu l'article L. 1332-4 du même code ;

2°/ qu'en retenant à sa charge l'existence d'une faute grave constituée par des absences ayant causé la perte du marché de nettoyage de la "Résidence Val-de-Marne", résilié le 30 juin 2004, tout en relevant que la lettre de licenciement indiquait qu'à la suite de cette résiliation, la société Das Neves nettoyage avait tenté de l'affecter sur d'autres chantiers, ce dont il résultait nécessairement que l'employeur avait renoncé à sanctionner les absences alléguées afférentes au marché de nettoyage de la "Résidence Val-de-Marne", la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles L. 122-6 et L. 122-9 du code du travail, devenus les articles L.1234-1 et L. 1234-9 du même code ;

3°/ que la période ordinaire des vacances doit dans tous les cas être portée par l'employeur à la connaissance du personnel au moins deux mois avant l'ouverture de cette période ; que dans ses conclusions d'appel, elle faisait valoir qu'elle avait obtenu l'accord de l'employeur pour prendre ses congés jusqu'au 31 août 2004 ; qu'en estimant qu'elle avait commis une faute grave en prenant ainsi ses congés, "sans pour autant avoir obtenu l'autorisation de son employeur" et alors que la société Das Neves nettoyage "établit l'existence d'un usage pour les congés payés d'été pris alternativement une année en juillet et l'année suivante en août", les vacances de l'année 2004 devant être prises en juillet, sans constater que l'employeur avait précisé ces dates de congés deux mois avant l'ouverture de la période de vacances, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article D. 223-4, alinéa 1er, du code du travail, devenu l'article D. 3141-5 du même code ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui n'avait pas à effectuer la recherche visée à la troisième branche qui ne lui avait pas été demandée et qui a constaté que la salariée avait, postérieurement aux absences injustifiées mentionnées dans la lettre du client du 24 mai 2004, de nouveau été absente sans motif légitime pendant le mois d'août 2004, ce dont il résulte qu'aucun de ces manquements, de même nature, n'était prescrit, a pu décider que le comportement de l'intéressée rendait impossible son maintien dans l'entreprise et constituait une faute grave ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept juin deux mille neuf.