Notre gouvernement a décidé d'instaurer un état d'urgence sanitaire, qui lui permet de s'arroger le droit de prendre des mesures restrictives de liberté extrêmement contraignantes et attentatoires aux fondements mêmes de notre démocratie.

Depuis longtemps il apparaît que beaucoup de personnes aspirent à la sécurité plus qu'à la liberté : pour caricaturer on peut dire qu'ils préfèrent se sentir en sécurité dans une dictature, que libres en démocratie.

Or, de nombreuses modifications législatives de ces dernières années font trembler beaucoup de juristes, comme l'éminent professeur Rousseau https://www.publicsenat.fr/article/debat/coronavirus-c-est-en-temps-de-crise-que-le-respect-des-droits-fondamentaux-est-encore?fbclid=IwAR0bjw08YRkkw_glR1nzb23DSGt-4vkipJ9fxKkitPB3otsgQnxDpsU6Aw8.

On peut y ajouter les nombreuses évolutions des prérogatives policières, ainsi que les modifications procédurales qui, sous couvert d'une simplification prétendue, ont considérablement compliqué l'accès à la Justice.

Le premier épisode a été celui des gilets jaunes, dont la base est la liberté d'aller et venir, qui a évolué sur le droit à une vie décente.

Le combat des avocats de ces derniers mois contre la réforme des retraites est aussi symbolique, puisqu'au-delà de la seule revendication financière (ô combien justifiée), se pose la question de leur indépendance face à nos gouvernants. Et l'amer ressenti d'une volonté de musellement par ces derniers.

Face au sensationnalisme omniprésent des médias - qui pour l'essentiel ont cédé aux sirènes du pouvoir et de la nécessité d'être bien en Cour - c'est le pouvoir qui fait souvent l'actualité.

La réforme des retraites dans son ensemble en est la démonstration : au départ il était indiqué que comme ce n'était pas urgent il était temps d'en parler et de débattre, surt la base des propositions du gouvernement.

Mais lorsque celui-ci s'est aperçu qu'il avait ouvert la boîte de Pandore et que son projet risquait de ne pas survivre à tout ce qu'il avait libéré comme reproches, revendications, haines et contestations, alors le projet est devenu urgent, au motif fallacieux qu'il fallait que l'assemblée le vote avant les municipales, avant de s'apercevoir que tous les parlementaires n'étaient pas de serviles affidés justifiant un recours au 49 al.3 !

En clair : quand le pouvoir est dépassé par sa contestation, il passe en force, au mépris de la démocratie.

Il est vrai que l'aventure macroniste y est propice tant elle a bombardé, telle la noblesse d'Empire en son temps (et encore avec bien moins de classe !) des parvenus au pouvoir, avec ce que cela entraîne à la fois de décalage, d'incompétence, et d'esprit de récompense envers le faiseur de députés.

Mais revenons à l'état d'urgence sanitaire, qui intervient dans ce contexte de défiance des élites et des forces vives, à l'encontre des gouvernants.

Pour les juristes, le bricolage et l'empressement législatif et règlementaire sont assez risibles.

Le conseil d'état est heureusement venu ramener un peu de droit dans tout cela. https://www.conseil-etat.fr/actualites/actualites/statuant-en-urgence-le-conseil-d-etat-rejette-la-demande-de-confinement-total-et-enjoint-au-gouvernement-de-preciser-la-portee-de-certaines-interd?fbclid=IwAR0T6m8NEwU3TKWbRLDBJAk1U3LUo7g1PB8OiTvmROPBIdbG7CJ2KuXoJ-s

J'en viens à la conclusion qu'une des erreurs fut peut-être le quinquennat, dont je ne percevais pas réellement l'intérêt à l'époque, avec la concomittance des élections législatives, qui américanisent le Président de la République et vassalise le Premier Ministre en simple collaborateur.

La période du tweet à outrance et des démentis successifs pour revenir à des choses réalistes et adaptées est usante et anxiogène.

Le besoin de sécurité ne peut m'empêcher de penser à l'allemagne de Weimar et son long glissement vers la tyrannie.

L'avocat que je suis ne peut alors que se rapporter aux quelques lettres ancrées au fond de lui-même dans Cyrano de Bergerac, ode à la liberté et à l'indépendance. https://libretheatre.fr/tirade-non-merci-cyrano-de-bergerac/

Le temps dira s'il fallait s'inquiéter.

Mais la coiffure de Sibeth NDiaye ou le blanchissement de la barbe d'Edouard Philippe ne sont-ils pas, pour l'heure, plus importants ?

 

Julien Dumas-Lairolle