Un paiement à la date convenue : c’est l’espoir de tout constructeur qui mobilise ses moyens ou son énergie pour la réalisation de l’ouvrage.

L’entrepreneur en bâtiment peut tout de même subir des impayés ou des retards de règlement imputables au maître d’ouvrage.

Afin de protéger les constructeurs contre les défaillances du maître d’ouvrage dans le paiement des marchés privés de travaux, l’article 1799-1 du Code civil institue une garantie de paiement au profit des entrepreneurs. Cette garantie est légale et d’ordre public.

En pratique, on constate finalement qu’elle est peu usitée, la norme « Bâtiment » NF P03.001 y fait néanmoins référence expressément (§ 4.5).

Il pèse sur l’entrepreneur de nombreuses obligations (assurance, délai de réalisation, respect des règles de l’art, sécurité du chantier, etc. …) mais ce dernier a le droit aussi de réclamer et d’obtenir une garantie de paiement du maître d’ouvrage.

 

→Le Bénéficiaire de la garantie de paiement

Le bénéficiaire est donc l’entrepreneur d’ouvrage, en bâtiment (constructeur, promoteur, artisan, entreprise générale…). Les autres locateurs d’ouvrages au sens de l’article 1779 3° du Code civil (architecte et technicien) en seraient exclus.

 

→La qualité du maître d'ouvrage redevable de la garantie de paiement

Tous les maîtres d’ouvrage sont soumis à l’obligation de fournir une garantie de paiement à l’exception des cas suivants :

▪Le maître d’ouvrage qui conclut un marché de travaux pour son propre compte et pour la satisfaction de ses besoins sans rapport avec son activité professionnelle et sans que le montant total des travaux fasse l’objet d’un prêt (Le plus souvent, c’est le cas des particuliers réalisant des travaux chez eux)

▪Les organismes d’habitation à loyer modéré

▪Les maîtres d’ouvrages public (Etat, collectivité…). Cette garantie de paiement s’applique aux marchés privés de travaux

 

→Le moment de la délivrance de la garantie de paiement

Le maître d’ouvrage doit en principe remettre la garantie de paiement à l’entrepreneur dès la signature du marché de travaux. L’entrepreneur peut la réclamer à tout moment, pendant l’exécution des travaux et même après achèvement de l’ouvrage si le solde des travaux n’est toujours pas réglé.

 

→Le montant de la garantie de paiement

Conformément aux termes du Décret n°99-658 du 30 juillet 1999, la garantie de paiement doit être fournie par le maître d’ouvrage dès que le montant des travaux dépasse la somme de 12.000€HT déduction faite des arrhes et acomptes versés lors de la conclusion du marché. En cas d’avenant augmentant le montant du marché, la garantie de livraison doit être aussi réévaluée dans les mêmes proportions.

 

→La forme de la garantie de paiement

La garantie de paiement fournie par le maître d’ouvrage prend essentiellement deux formes alternatives:

▪Versement direct : En cas de prêt souscrit par le maître d’ouvrage pour financer exclusivement et intégralement ces travaux, la banque versera directement à l’entreprise les sommes dues avec l’accord préalable du maître d’ouvrage (article 1799-1 alinéa 2 du Code civil)

▪Cautionnement solidaire : Dans les autres cas c’est-à-dire en cas de financement partiel ou sur fonds propres du montant des travaux, la garantie fournie à l’entrepreneur prend la forme d’un cautionnement solidaire par un établissement bancaire ou assimilé (article 1799-1 alinéa 3 du Code civil)

Rarement constaté en pratique, le maître d’ouvrage peut aussi fournir une garantie particulière qui sera mentionnée dans le marché de travaux : hypothèque conventionnelle, privilège spécial de l’entrepreneur (article 2374 4° du Code civil), garantie autonome, séquestre, nantissement de parts sociales, etc. …

 

 

→La sanction du défaut de délivrance de la garantie de paiement en cas d’impayés

En l’absence de garantie fournie et si les travaux exécutés sont impayés, l’entrepreneur peut surseoir à l’exécution du contrat après une mise en demeure restée sans effet à l’issue d’un délai de 15 jours. Cette mise en demeure doit être adressée par Lettre recommandée avec Accusé réception. La non-fourniture par le maitre d’ouvrage de cette garantie pourrait donc justifier un arrêt de chantier. Cependant, dans l’hypothèse où l’entrepreneur poursuit le chantier alors que la mise en demeure est restée sans réponse, il ne pourra plus se prévaloir du droit de suspendre les travaux.

 

→La mise en jeu de la garantie de paiement

Comme indiqué ci-dessus, lorsque cette garantie de paiement fait l’objet d’un versement direct par la banque prêteuse, l’entrepreneur doit simplement s’assurer que le maître d’ouvrage a bien donné son accord écrit sur la facture présentée et transmise à la banque. A défaut d’accord écrit du maître d’ouvrage sans motif légitime ou en cas de défaillance de la banque pour le versement, l’entrepreneur pourra donc adresser une mise en demeure au maître d’ouvrage et suspendre les travaux si celle-ci reste sans effet à l’issue d’un délai de 15 jours.

Dans l’hypothèse où la garantie de paiement consiste en un cautionnement solidaire d’une banque ou entité assimilée, l’entrepreneur doit simplement, pour obtenir le règlement des sommes dues, justifier à la caution de la défaillance du maître d’ouvrage pour ce versement. Avec les délais de paiement maximun de l’article L411-6 du Code de commerce, il faudra attendre que la facture soit effectivement impayée pour former un recours contre la caution. Le Décrêt n°99-658 du 30 juillet 1999 exigeant que la créance de l’entrepreneur soit certaine, liquide et exigible.

 

BIBLIOGRAPHIE :

-C.SAINT-ALARY-HOUIN, L’article 1799-1 du Code civil, Revue de droit immobilier, janvier 2013

-Guide FNTP, Cautions et garanties dans les marchés de travaux, 2016

-C.CHARBONNEAU, Les garanties financières des marchés privés de travaux, Revue de droit immobilier, 2011, p.532

-Ph.MALINVAUD, Droit de la construction, Dalloz action 2018/2019