L’exception d’inexécution permet au Locataire de suspendre le règlement des loyers en cas de non-réalisation par le Bailleur de grosses réparations, relevant de son obligation de délivrance.

Cass. 3e civ., 27 févr. 2020, n° 18-20.865, F-D, Andonian c/ Sté Valcat (pourvoi c/ CA Rouen, 7 juin 2018) : JurisData n° 2020-002668

 

La pratique des baux commerciaux est souvent l’occasion, parfois litigieuse, d’un débat marqué entre le Bailleur et le Locataire au sujet de la prise en charge des travaux nécessaires.

La Loi Pinel, et son décret d’application, a permis de quelque peu clarifier l’imputabilité des travaux et les possibilités d’aménagements conventionnels.

A ce titre, l’article R145-35 1° du Code de commerce précisent que ne seront pas imputés au locataire notamment :

■ 1°  Les dépenses relatives aux grosses réparations mentionnées à l'article 606 du code civil ainsi que, le cas échéant, les honoraires liés à la réalisation de ces travaux 

 

Ce fameux article 606 du Code civil dont la rédaction remonte 1804 a directement été mentionné dans le Code de commerce.

Ainsi, les grosses réparations demeurent à la charge du Bailleur.

►Mais quels sont les moyens d’action du Locataire qui souffre d’une carence du Bailleur en la matière ?

Récemment, la Cour de Cassation a considéré que la non-réalisation par le Bailleur de grosses réparations, relevant de son obligation de délivrance, permet au Locataire de suspendre le règlement des loyers, en application de l’exception d’inexécution.

Cet arrêt du 27 février 2020 est rendu au visa de l’article 1184 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.

L’exception d’inexécution fait désormais l’objet d’un Sous-section spécifique dans le Code civil avec deux articles (1219 et 1220). L’article 1219 disposant : « Une partie peut refuser d'exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l'autre n'exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave. "

Effectivement, il est légitime que le Locataire suspende le règlement des loyers lorsque son Bailleur refuse ou tarde à exécuter des travaux d’importance (relevant de l’article 606 du Code civil) rendant les locaux impropres à leur destination. Ces travaux sont souvent contractuellement et désormais légalement à la charge du Bailleur qui manque donc à son obligation de délivrance en refusant de les exécuter.

La volonté de percevoir effectivement les loyers mobilisera davantage le Bailleur pour la réalisation des travaux nécessaires. Le locataire ne devra pas oublier de réclamer une indemnisation pour les troubles de jouissance et les pertes d’exploitation causés par la défaillance du Bailleur.

L’exception d’inexécution vient donc au secours du Locataire et contribue à un rééquilibrage des obligations réciproques des parties au bail commercial.