Le taux des prélèvements obligatoires en France est de plus de 48%, soit le niveau plus élevé au monde.

Malgré une certaine qualité de vivre dans notre pays, le contribuable français est soumis à une réelle pression fiscale et il est tenté d’opérer des opérations diverses pour alléger cette charge.

Les démarches de défiscalisation, d’allégement de l’impôt sont multiples, complexes et de surcroît instables au gré de la publication des lois de finances. En matière immobilière, la plupart des dispositifs ont pris le nom du Ministre à l’origine de la loi votée (Pinel, Duflot, Scellier, Robien, Borloo…).

Les fameuses niches donnent toujours l’envie de s’y réfugier.

L’économie d’impôt générée est un argument de vente qui séduit le contribuable associant un investissement dans la pierre et une opération de défiscalisation.

Mais parfois la mariée était trop belle : des désordres grèvent la construction, des problèmes surgissent dans la gestion de la copropriété ou du bien loué, une pénurie de locataire ou des impayés malmènent le rendement et enfin, pour parfaire le tout, la valeur vénale du bien acquis est bien inférieure à son prix d’acquisition.

Le contribuable meurtri par cet investissement immobilier insatisfaisant s’interroge nécessairement sur le processus d’acquisition :

-La promotion du programme immobilier a été assurée ou relayée par un expert-comptable, un conseiller en gestion de patrimoine, un banquier ou un agent immobilier

-Le rendement locatif et l’économie d’impôt générée sont détaillées par le promoteur-vendeur, le conseiller en gestion de patrimoine, le banquier ou l’agent immobilier. C’est un argument de vente qui peut supplanter la notice descriptive du bien ou sa simple localisation…

-La construction du programme est financée par la banque qui octroiera parallèlement un crédit au contribuable investisseur.

-Le notaire se chargera du montage de l’opération, de la mise en copropriété de l’immeuble et sa vente par lot

 

Naturellement, tous ces intermédiaires percevront une rémunération substantielle qui demeure supporter in fine par le contribuable investisseur, acquéreur.

 

A côté des manquements du vendeur, qu’en est-il des responsabilités ?

-Le Conseiller en gestion de patrimoine : Intervenant en amont de l'opération, le conseiller en gestion de patrimoine est tenu à un devoir de conseil. Ainsi, il engage sa responsabilité sur le contenu de l'étude financière personnalisée établie pour le compte de l’acquéreur (Cass., 1ère civ., 17 juin 2015, n°13-19.760, Cf ; C. SIZAIRE, Construction Urbanisme, Mars 2021, n°44) Le conseil en gestion de patrimoine doit informer son client des conditions de succès de l'opération projetée et des risques qui découlent du défaut de réalisation de ces conditions (Cass. 1re civ., 26 sept. 2019, n° 18-17.074 et 18-17.402).

 

-L’expert-comptable est débiteur, envers son client, d'une obligation de conseil et d'information et (…) en matière fiscale, il lui appartient d'informer son client sur les différentes options qui sont à sa disposition et de l'éclairer sur leurs avantages et inconvénients respectifs (Cass, com., 13 janvier 2021, n° 19-10.509)

 

-L’agent immobilier : un agent immobilier qui s'entremet habituellement dans des opérations immobilières de placement se doit d'informer et de conseiller l'acquéreur éventuel sur les caractéristiques de l'investissement qu'il lui propose et sur les choix à effectuer (Cass. 1re civ., 2 oct. 2013, n° 12-20.504). Prêtant son concours à des opérations de défiscalisation, l’agent immobilier engage ainsi sa responsabilité en cas de manquement à son obligation de conseil.

 

-Le notaire : a un devoir de conseil étendu en matière fiscale. Il est tenu d’informer et d’éclairer ses clients sur les effets et portée de leurs actes, de les leurs déconseiller le cas échéant en raison des incidences fiscales ou des incertitudes affectant le régime fiscal applicable (Cf. Responsabilité des Notaires Dalloz, 2018, n°132.122)

 

-Le banquier : a un devoir de mise en garde et d’information. Par exemple, la banque doit informer ses clients de ce que, au regard du tableau d’amortissement, l’effort financier attendu de leur part pourrait être supérieur à celui initialement prévu et que, en l’absence de différé et dans l’attente de la livraison du bien immobilier, ils seraient tenus de supporter le remboursement de leur emprunt sans percevoir de loyers en contrepartie (Cass. 1re civ., 16 avr. 2015, n° 14-16536). Le banquier doit donc être dans l’analytique et dans l’anticipation. Aussi, la banque aura une obligation d’information renforcée dans l’hypothèse où elle aura participé au montage de l’opération, ou sa commercialisation, pour le compte du promoteur (CA Bordeaux, 30 janv. 2012, n° 10/05742).

 

Selon les préjudices supportés par le contribuable investisseur et en parallèle d’un éventuel recours contre le Vendeur, une analyse du contexte peut donc conduire à mettre en cause la responsabilité des intermédiaires qui ont participé à une opération de défiscalisation peu optimale.