Alors qu'il aurait été logique de penser que les magistrats allaient intégrer les conditions sanitaires déplorables des prisons françaises dans leurs décisions liées aux demandes de remise en liberté ou d'aménagement de peine, il s'avère que ce n'est pas forcément le cas.
Pour avoir récemment plaidé deux dossiers devant deux chambres de l'instruction différentes, les magistrats ne sont pas forcément sensibles à cet argument juridico-sanitaire lequel avait une assise juridique certaine dans les mémoires produits.
Notamment, j'y rappelais la position du CGLPL exprimée dans son avis du 17/03/2020 :
« Les conditions de détention des maisons d’arrêt les plus surpeuplés placent la population pénale en situation de risque sanitaire élevé... Leur sécurité n’est plus garantie. L’administration manquera donc à son obligation de protéger les personnes qu’elle a placées sous sa garde si elle ne prend pas d’urgence les mesures nécessaires. Le contrôleur général des lieux de privation de liberté recommande de réduire la population pénale un niveau qui ne soit pas supérieur à la capacité d’accueil des établissements en proposant, adoptant ou suscitant toute mesure utile pour favoriser les sorties de prison et limiter les entrées. »
En outre, je soulignais la position du Conseil Constitutionnel quant à la portée juridique du préambule de la Constitution de 1946 :
Le préambule de la Constitution de 1946 a réaffirmé que tout être humain possède des Droits inaliénables et sacrés parmi lesquels le Droit à la Santé. La décision récente du 31 janvier 2020 (sur question prioritaire de constitutionnalité N 2019-823) a rappelé à nouveau qu’il constitue un objectif de valeur constitutionnelle.
Enfin, je citais les articles L110-1 et L 110-3 du Code de Santé Publique.
Fort de ces solides appuis et d'autres éléments complémentaires des dossiers tenant aux garanties de représentation de mes clients, il m'était permis d'envisager une libération avec un placement sous contrôle judiciaire strict.
Les deux décisions furent négatives.....Au-delà de ce résultat insatisfaisant, il fut surprenant de constater que l'argument COVID-19 et ses conséquences sur les conditions de détention ont été balayés d'un simple revers de la main.
Quelle conclusion en tirer ?
Après avoir forcément analysé les arrêts de la Chambre de l'Instruction, j'ai également relu avec attention l'argumentaire développé dans les mémoires afin de me remettre en cause si cela s'avèrait nécessaire. Avais-je posé les bonnes questions ? Les références juridiques étaient-elles pertinentes ? etc....
Faisant preuve d'une vraie objecitivité, la conclusion s'imposait :
Les références juridiques cités précédemment étaient univoquement cohérentes avec le couple infernal actuel "détention / santé" mais les magistrats se focalisent prioritairement sur le dossier pénal de la personne et ne s'intéressent pas à ce qu'il pourrait être qualifié de périphérique.
La Chambre de l'Instruction fait du droit pénal et de la procédure pénale mais aucunement du droit sanitaire ou de l'humanisme.....nonobstant une acuité du risque mortel pour tous.
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