Ayant été, très récemment, concerné par un débat judiciaire correctionnel inhérent à une problématique de diffamation, il m'a semblé intéressant de rappeler ici quelques points essentiels de ce délit tout comme les limites de son champ d'application.
En l'espèce, des habitants d'un petit village avait adressé des remarques écrites à un commissaire-enquêteur dans le cadre d'une enquête publique ayant trait à la modification du PLU de leur commune.
Le maire en fonction avait mal pris ces remarques et déclenché ainsi une action judiciaire ayant abouti au renvoi de ces citoyens devant le tribunal correctionnel par le magistrat instructeur.
Spécificité de cette infraction, le juge d'instruction est placé dans une situation particulière puisqu'il lui est impossible d'apprécier tant la véracité des propos qualifiés de diffamants que la bonne foi des mis en cause, d'où l'importance de l'audience de fond.
Matériellement, la diffamation est définie par l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881 "comme un message dans lequel l'honneur ou la considération d'une personne ou d'un corps est ternie par le reproche qui lui est fait d'avoir mal agi"
En outre, il est également nécessaire de démontrer l'intention infamante de l'auteur des propos au titre de l'élément moral de l'infraction.
Fort heureusement pour nos libertés publiques et au premier rang celle consacrée par l'article 11 de la DDHC, il existe plusieurs fondements d'irresponsabilité pénale à la disposition de la défense permettant ainsi de plaider la relaxe des prévenus.
Ainsi de l'article 122-4 du code pénal - l'odre de la Loi, l'article 122-9 du même code sur les lanceurs d'alerte ou les articles L1152-2 et L. 4131-1, alinéa 1er, du code du travail sur la dénonciation par les salariés du harcèlement dont ils seraient victimes.
A côté de ces dispositions légales largement reprises par la jurisprudence, l'exceptio veritatis et la bonne foi du prévenu constituent pareillement une cause d'irresponsabilité pénale.
La bonne foi ou l'honnêteté intellectuelle érode le risque de poursuites dès lors qu'elle recouvre 4 critères tels que définis par la jurispudence - Crim. 27 févr. 2001, no 00-82.557 - lesquels sont : l'absence d'animosité personnelle, la prudence et la mesure dans l'expression, la légitimité du but poursuivi et le sérieux de l'enquête.
Dans l'espèce rapportée plus haut, une double question était posée : Ces honnêtes citoyens étaient-ils de bonne foi en transmettant leurs commentaires incriminés et avaient-ils connaissance que ceux-ci allaient être rendus publics ?
Le Parquet a répondu par l'affirmative pour la première partie et par la négative pour la seconde partie ouvrant donc la voie à des réquisitions de relaxe.
Au-delà d'une approche juridique, c'est aussi toute la question de la liberté de parole et des critiques éventuelles de l'action publique qui était également posée ici.
Sauf insultes violentes totalement inacceptables, accusations infondées ou attaques ad hominem, il est logique d'accepter qu'un citoyen lambda émette de sévères réserves sur l'action d'un élu lequel n'est jamais que titulaire d'un mandat devant, à ce titre, rendre des comptes sur son action durant son accomplissement.
Et la voie judiciaire ne peut et ne doit servir à museler l'expression publique....
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