Loi n° 2024-120 du 19 février 2024 parue au Journal Officiel le 20.022024

Texte d’application immédiate

 

Les réseaux sociaux font partie de notre vie et nous sommes tous, ou presque connectés à un réseau.

Ce fil de communication avec les autres est devenu un lien social.

Nombre postent des photographies ou vidéo de leurs coups de cœur, de leurs lectures, de leurs voyages mais également de photographies ou des vidéos dans lesquelles ils apparaissent ou se mettent en scène.

Ce sont aussi parfois des vidéos ou photographies de leurs enfants.

Les enfants ont également leur propre réseau, voire leur chaine YouTube ou TikTok

Mais voilà ce monde que l’on croit virtuel ne l’ai pas et les images peuvent être détournées, offensantes, et porter atteinte à la vie privée de la personne.

Lorsque cette personne est un mineur, l’atteinte est encore plus grave.

La loi du 19 février 2024 vient rappeler aux parents qu’ils doivent protéger leur enfant et vient modifier l’article du Code civil qui donne la définition de l’autorité parentale.

Article 371-1

Version en vigueur depuis le 21 février 2024,

« L'autorité parentale est un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l'intérêt de l'enfant.

Elle appartient aux parents jusqu'à la majorité ou l'émancipation de l'enfant pour le protéger dans sa sécurité, sa santé, sa vie privée et sa moralité, pour assurer son éducation et permettre son développement, dans le respect dû à sa personne.

L'autorité parentale s'exerce sans violences physiques ou psychologiques.

Les parents associent l'enfant aux décisions qui le concernent, selon son âge et son degré de maturité. »

La notion de vie privée de l’enfant fait son apparition.

Les parents doivent protéger la vie privée de leur enfant.

Mais qu’est-ce que la vie privée au sens juridique du terme ?

Les différents ouvrages reprennent les notions suivantes : la vie privée concerne ce qui relève de la sphère privée par opposition à la vie publique.

Cette vie privée est protégée par la Constitution la Convention Européenne des droits de l’homme, le code Civil, un règlement de l’Union Européenne.

La sphère privée doit rester à l’abri du regard des autres.

Appartiennent notamment à la vie privée, le domicile, la voix, l’image, et tout ce qui relève de l’intime.

On comprend que la difficulté va se poser pour la publication de vidéos ou d’images d’enfants sur les réseaux sociaux.

En publiant un parent commet-il une violation de la vie privée de son enfant ?

La loi apporte des précisions en modifiant également les dispositions d’autres articles du Code civil :

Article 372-1

Version en vigueur depuis le 21 février 2024,

« Les parents protègent en commun le droit à l'image de leur enfant mineur, dans le respect du droit à la vie privée mentionné à l'article 9.

Les parents associent l'enfant à l'exercice de son droit à l'image, selon son âge et son degré de maturité. »

La loi rappelle que le consentement de l’enfant doit exister : on ne peut pas publier une vidéo dans laquelle un enfant se ridiculise (chute, maladresse, etc.) au prétexte que « c’est drôle » comme on peut le voir parfois

Cet enfant a le droit de refuser la publication, mais pour qu’il puisse refuser encore faut-il que son avis ait été sollicité.

Des débats vont très certainement apparaitre, et on pourra même imaginer un enfant représenté par un administrateur ad ’hoc ou devenu majeur se retournant contre un ou ses parents

Pour les parents séparés, un des parents ne pourra pas, et malgré l’accord de l’enfant, publier sans l’autorisation de l’autre parent.

Les parents ont parfois des conceptions différentes et la loi modifie également les compétences du Juge aux Affaires Familiales.

Article 373-2-6 Code civil

Version en vigueur depuis le 21 février 2024

« Le juge du tribunal judiciaire délégué aux affaires familiales règle les questions qui lui sont soumises dans le cadre du présent chapitre en veillant spécialement à la sauvegarde des intérêts des enfants mineurs.

Le juge peut prendre les mesures permettant de garantir la continuité et l'effectivité du maintien des liens de l'enfant avec chacun de ses parents.

Il peut notamment ordonner l'interdiction de sortie de l'enfant du territoire français sans l'autorisation des deux parents. Cette interdiction de sortie du territoire sans l'autorisation des deux parents est inscrite au fichier des personnes recherchées par le procureur de la République.

Il peut également, en cas de désaccord entre les parents sur l'exercice du droit à l'image de l'enfant, interdire à l'un des parents de diffuser tout contenu relatif à l'enfant sans l'autorisation de l'autre parent.

Il peut, même d'office, ordonner une astreinte pour assurer l'exécution de sa décision. Si les circonstances en font apparaître la nécessité, il peut assortir d'une astreinte la décision rendue par un autre juge ainsi que l'accord parental constaté dans l'un des titres mentionnés aux 1° et 2° du I de l'article 373-2-2. Les dispositions des articles L. 131-2 à L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution sont applicables.

Il peut également, lorsqu'un parent fait délibérément obstacle de façon grave ou renouvelée à l'exécution de l'un des titres mentionnés aux 1° à 6° du I de l'article 373-2-2, le condamner au paiement d'une amende civile d'un montant qui ne peut excéder 10 000 €. »

Et la loi prévoir même la possibilité de présenter une demande de délégation de l’autorité parentale « lorsque la diffusion de l'image de l'enfant par ses parents porte gravement atteinte à la dignité ou à l'intégrité morale de celui-ci »

Article 377

Version en vigueur depuis le 21 février 2024

« Les père et mère, ensemble ou séparément, peuvent, lorsque les circonstances l'exigent, saisir le juge en vue de voir déléguer tout ou partie de l'exercice de leur autorité parentale à un tiers, membre de la famille, proche digne de confiance, établissement agréé pour le recueil des enfants ou service départemental de l'aide sociale à l'enfance.

En cas de désintérêt manifeste ou si les parents sont dans l'impossibilité d'exercer tout ou partie de l'autorité parentale ou si un parent est poursuivi ou condamné pour un crime commis sur la personne de l'autre parent ayant entraîné la mort de celui-ci, le particulier, l'établissement ou le service départemental de l'aide sociale à l'enfance qui a recueilli l'enfant ou un membre de la famille peut également saisir le juge aux fins de se faire déléguer totalement ou partiellement l'exercice de l'autorité parentale.

Dans ce dernier cas, le juge peut également être saisi par le ministère public, avec l'accord du tiers candidat à la délégation totale ou partielle de l'exercice de l'autorité parentale, à l'effet de statuer sur ladite délégation. Le cas échéant, le ministère public est informé par transmission de la copie du dossier par le juge des enfants ou par avis de ce dernier.

Lorsque la diffusion de l'image de l'enfant par ses parents porte gravement atteinte à la dignité ou à l'intégrité morale de celui-ci, le particulier, l'établissement ou le service départemental de l'aide sociale à l'enfance qui a recueilli l'enfant ou un membre de la famille peut également saisir le juge aux fins de se faire déléguer l'exercice du droit à l'image de l'enfant.

Dans tous les cas visés au présent article, les deux parents doivent être appelés à l'instance. Lorsque l'enfant concerné fait l'objet d'une mesure d'assistance éducative, la délégation ne peut intervenir qu'après avis du juge des enfants. »

Enfin sont modifiées les dispositions de la loi dite informatique et liberté du 6 janvier 1978 pour intégrer une extension de demande d’effacement de données à caractère personnel aux enfants (article 21 - IV modifié), modification applicable à tous les territoires (article 125 modifié)

Article 21 de la loi du 6 janvier 1978

Version en vigueur depuis le 21 février 2024

« I.-Lorsque le non-respect des dispositions du règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016 ou de la présente loi entraîne une violation des droits et libertés mentionnés à l'article 1er de la présente loi et que le président de la commission considère qu'il est urgent d'intervenir, il saisit la formation restreinte, qui peut, dans le cadre d'une procédure d'urgence contradictoire définie par décret en Conseil d'Etat, adopter l'une des mesures suivantes :

1° L'interruption provisoire de la mise en œuvre du traitement, y compris d'un transfert de données hors de l'Union européenne, pour une durée maximale de trois mois, si le traitement n'est pas au nombre de ceux qui intéressent la sûreté de l'Etat ou la défense ou de ceux relevant du titre III lorsqu'ils sont mis en œuvre pour le compte de l'Etat ;

2° La limitation du traitement de certaines des données à caractère personnel traitées, pour une durée maximale de trois mois, si le traitement n'est pas au nombre de ceux qui intéressent la sûreté de l'Etat ou la défense ou de ceux relevant du titre III lorsqu'ils sont mis en œuvre pour le compte de l'Etat ;

3° La suspension provisoire de la certification délivrée au responsable de traitement ou à son sous-traitant 

4° La suspension provisoire de l'agrément délivré à un organisme de certification ou un organisme chargé du respect d'un code de conduite ;

5° La suspension provisoire de l'autorisation délivrée sur le fondement du III de l'article 66 de la présente loi ;

6° L'injonction de mettre en conformité le traitement avec les obligations résultant du règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016 ou de la présente loi ou de satisfaire aux demandes présentées par la personne concernée en vue d'exercer ses droits, qui peut être assortie, sauf dans le cas où le traitement est mis en œuvre par l'Etat, d'une astreinte dont le montant ne peut excéder 100 000 € par jour de retard à compter de la date fixée par la formation restreinte ;

7° Un rappel à l'ordre ;

8° L'information du Premier ministre pour qu'il prenne, le cas échéant, les mesures permettant de faire cesser la violation constatée, si le traitement en cause est au nombre de ceux qui intéressent la sûreté de l'Etat ou la défense ou de ceux relevant du titre III de la présente loi lorsqu'ils sont mis en œuvre pour le compte de l'Etat. Le Premier ministre fait alors connaître à la formation restreinte les suites qu'il a données à cette information au plus tard quinze jours après l'avoir reçue.

II.-En cas de circonstances exceptionnelles prévues au 1 de l'article 66 du règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016, lorsque la formation restreinte adopte les mesures provisoires prévues aux 1° à 4° du I du présent article, elle informe sans délai de la teneur des mesures prises et de leurs motifs les autres autorités de contrôle concernées, le comité européen de la protection des données mentionné à l'article 68 du même règlement et la Commission européenne.

Lorsque la formation restreinte a pris de telles mesures et qu'elle estime que des mesures définitives doivent être prises, elle met en œuvre les dispositions du 2 de l'article 66 du règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016.

III.-Pour les traitements relevant du règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016, lorsqu'une autorité de contrôle compétente en application du même règlement n'a pas pris de mesure appropriée dans une situation où il est urgent d'intervenir afin de protéger les droits et libertés des personnes concernées, la formation restreinte, saisie par le président de la commission, peut demander au comité européen de la protection des données un avis d'urgence ou une décision contraignante d'urgence dans les conditions et selon les modalités prévues aux 3 et 4 de l'article 66 dudit règlement.

IV.-En cas d'atteinte grave et immédiate aux droits et libertés mentionnés à l'article 1er de la présente loi ou, lorsqu'il s'agit d'un mineur, en cas de non-exécution ou d'absence de réponse à une demande d'effacement des données à caractère personnel, le président de la commission peut en outre demander, par la voie du référé, à la juridiction compétente d'ordonner, le cas échéant sous astreinte, toute mesure nécessaire à la sauvegarde de ces droits et libertés. »

Article 125 de la loi du 6 janvier 1978

Version en vigueur depuis le 21 février 2024

« La présente loi est applicable en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2024-120 du 19 février 2024 visant à garantir le respect du droit à l'image des enfants. »

Enfin la loi modifie les dispositions pénales en ajoutant dans l’incrimination et la sanction les atteintes aux droits du mineur.

Article 226-1 du code Pénal Version en vigueur depuis le 21 février 2024

Modifié par LOI n°2024-120 du 19 février 2024 - art. 2

« Est puni d'un an d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende le fait, au moyen d'un procédé quelconque, volontairement de porter atteinte à l'intimité de la vie privée d'autrui :

1° En captant, enregistrant ou transmettant, sans le consentement de leur auteur, des paroles prononcées à titre privé ou confidentiel ;

2° En fixant, enregistrant ou transmettant, sans le consentement de celle-ci, l'image d'une personne se trouvant dans un lieu privé.

3° En captant, enregistrant ou transmettant, par quelque moyen que ce soit, la localisation en temps réel ou en différé d'une personne sans le consentement de celle-ci.

Lorsque les actes mentionnés aux 1° et 2° du présent article ont été accomplis au vu et au su des intéressés sans qu'ils s'y soient opposés, alors qu'ils étaient en mesure de le faire, le consentement de ceux-ci est présumé.

Lorsque les actes mentionnés au présent article ont été accomplis sur la personne d'un mineur, le consentement doit émaner des titulaires de l'autorité parentale, dans le respect de l'article 372-1 du code civil.

Lorsque les faits sont commis par le conjoint ou le concubin de la victime ou le partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité, les peines sont portées à deux ans d'emprisonnement et à 60 000 euros d'amende. »

En pièce jointe le texte de loi.