LE SOUS-ACQUEREUR ACHETE UN BIEN DONT IL CONNAIT LE VICE
Le principe de la garantie décennale étendu aux biens meubles ?
Ceci parait bien le cas à la lecture de cette décision rendu par la Chambre commerciale de la Cour de Cassation (Cass. com., 8 mars 2017, n° 15-21.155).
« Attendu, selon l’arrêt attaqué, que, le 9 mai 2006, la société BNP Lease Group a conclu avec la société Agora un contrat de crédit-bail portant sur un véhicule qu’elle avait acheté à cet effet, le 25 avril précédent, auprès de la société Sud Ouest véhicules industriels automobiles (la société Sovia), qui l’avait elle-même acheté à la société Nissan West Europe ; que l’article 5 de ce contrat prévoyait qu’en contrepartie de la renonciation du locataire à tout recours contre le bailleur en cas de défaillance ou de vice caché affectant le matériel loué, « le locataire exerce pendant toute la durée du contrat en vertu d’une stipulation pour autrui expresse les droits et actions en garantie vis-à-vis du constructeur ou du fournisseur du matériel loué notamment en annulation de la commande, récupération des acomptes versés et mise en jeu des garanties légales et conventionnelles pour lesquelles le bailleur donne en tant que de besoin mandat d’ester » ; que le véhicule ayant subi diverses pannes depuis le mois de septembre 2006, la société Agora a, le 21 juillet 2010, assigné la société Sovia en remboursement des loyers versés et en paiement de divers frais et dommages-intérêts ; que la société Sovia a assigné la société Nissan West Europe en intervention forcée ; que le 9 mai 2011, la société Agora a levé l’option d’achat du contrat de crédit-bail du véhicule et procédé à son acquisition ; qu’invoquant l’existence de vices cachés, elle a également demandé la résolution du contrat ;
Sur la recevabilité du moyen unique, pris en sa seconde branche, contestée par la défense :
Attendu que la société Nissan West Europe soutient que le moyen par lequel la société Agora fait valoir qu’elle agissait en qualité de sous-acquéreur à l’encontre du vendeur originaire, et qu’en conséquence, le caractère apparent du vice aurait dû être apprécié au regard de la personne du vendeur intermédiaire, est irrecevable comme étant incompatible avec ses écritures d’appel, dans lesquelles elle précisait agir sur le fondement de l’article 5 du contrat de crédit-bail et, partant, en sa seule qualité de crédit-preneur, et, en tout état de cause, qu’il est nouveau et mélangé de fait et de droit ;
Mais attendu que si la société Agora précisait, dans ses conclusions d’appel, avoir, lors de l’introduction d’instance, exercé, en vertu de l’article 5 du contrat de crédit-bail, l’action en garantie des vices cachés qui appartenait au crédit-bailleur, elle soutenait également que la levée d’option lui avait permis de poursuivre l’action engagée à l’encontre la société Sovia, ce dont il résulte qu’elle avait poursuivi l’exercice de cette action en sa qualité de sous-acquéreur ; que le moyen est donc recevable ;
Et sur le moyen :
Vu l’article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016, ensemble les articles 1641 et 1642 du code civil ;
Attendu que pour rejeter les demandes fondées sur la garantie des vices cachés, l’arrêt retient qu’au moment de l’acquisition du véhicule, la société Agora avait connaissance des vices dont il était affecté, qui présentaient donc un caractère apparent ;
Qu’en statuant ainsi, alors que le sous-acquéreur peut exercer l’action rédhibitoire qui accompagne, en tant qu’accessoire, le bien vendu, nonobstant sa connaissance des vices de celui-ci lors de son acquisition, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur l’autre grief :
CASSE ET ANNULE (…) »
Pas de contribution, soyez le premier