De plus en plus de salariés révèlent avoir été forcés à travailler par leur employeur alors qu’ils étaient dans le même temps placés en activité partielle, au mépris des dispositions légales.
C’était notamment le cas d’une salariée d’un club de sport, qui a ainsi assigné son employeur devant le Conseil de prud’hommes, et a fait condamner celui-ci à lui verser diverses indemnités en réparation.
Une affaire qui permet de revenir sur les règles applicables en matière d’activité partielle (1), les indemnités que peuvent réclamer les salariés victimes d'une fraude au chômage partiel (2), avant d’étudier en détail la condamnation infligée à la Société par le Conseil de prud’hommes en l’espèce (3).
1- Le placement en chômage partiel exclut tout travail durant la période concernée
A titre de simple rappel, le salarié placé en activité partielle voit son contrat de travail suspendu (mais non rompu), pendant la période où il n’est pas en activité[1].
En conséquence, l’employeur a l’interdiction de demander à son salarié placé en activité partielle de travailler durant les heures indemnisées au titre du chômage partiel. Et ce y compris en télétravail.
Il en résulte que les salariés placés en activité partielle à 100% (comme ce fut le cas pour des centaines de milliers d’entre eux au printemps en raison de la pandémie de COVID19) ne peuvent se voir demander par l’employeur la moindre prestation de travail.
Dans le même esprit, les salariés placés en chômage partiel à 80% ne peuvent travailler que durant les 20% restants, et pas davantage.
Demander à un salarié de travailler ou télétravailler pendant la période durant laquelle il est placé en activité partielle s’apparente ainsi à une fraude et est assimilé à du travail illégal[2].
2- Une situation qui peut donner droit à plusieurs indemnités pour les salariés concernés
Le salarié conduit à travailler durant ses heures chômées au titre de l’activité partielle pourra réclamer et obtenir plusieurs indemnités de la part de son employeur, à commencer par :
- Un rappel de salaire, correspondant à la différence entre l’allocation d’activité partielle perçue et son salaire habituel (en fonction du nombre d’heures travaillées) ;
- Une indemnité pour travail dissimulé correspondant à 6 mois de salaire dans l’hypothèse où son contrat de travail serait rompu[3].
3- Condamnation d’un club de sport pour fraude au chômage partiel
Dans une affaire que le cabinet a eu l’honneur de porter, une salariée d’un club de sport, placée pendant plusieurs mois en chômage partiel à 100% par son employeur durant le confinement de 2020, avait en réalité été contrainte par son employeur de travailler quotidiennement (alors même que le club de sport aurait dû rester fermé pendant une partie de la période concernée).
La salariée a saisi le Conseil de prud’hommes en invoquant une fraude au chômage partiel, une situation de travail dissimulé, et en réclamant la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de son employeur (et donc sa condamnation à lui verser une indemnité de licenciement, une indemnité compensatrice de préavis et une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse).
La salariée a obtenu satisfaction sur la quasi-totalité de ses demandes devant le Conseil de prud’hommes, grâce notamment aux nombreuses preuves des manquements subis.
En effet, le Conseil de prud’hommes a jugé que l’employeur s’était bel et bien livré à une fraude au chômage partiel, parmi d’autres manquements, et a condamné le club de sport à verser à sa salariée (sur la base d’un salaire mensuel brut de 1 612,97 €) :
- 953,50 € à titre de rappel de salaire ;
- 95,35 € au titre des congés payés afférents ;
- 9 677,82 € à titre d’indemnité pour travail dissimulé ;
- 4 838,91 € à titre de dommages-intérêts pour manquement à l’obligation de loyauté.
En outre, le Conseil de prud’hommes a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de la salariée aux torts de son employeur, comme elle le demandait, compte tenu de la gravité des manquements de ce dernier, et a condamné le club de sport à lui verser :
- 806,48 € à titre d’indemnité légale de licenciement ;
- 3 225,94 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;
- 322,59 € à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis ;
- 5 645,39 € à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- 1 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
Se livrer à une fraude au chômage partiel peut ainsi coûter cher.
[1] Article L 5122-1 du Code du travail
[2] Article L 8211-1 du Code du travail
[3] Article L 8223-1 du Code du travail
[4] Article L 8272-1 du Code du travail
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