La question de l’indemnisation des victimes d’accidents corporels est souvent complexe, notamment lorsqu’il s’agit de dépenses médicales qui s’étendront dans le temps : renouvellement d’appareils, assistance par tierce personne, soins réguliers…
Un arrêt récent de la Cour de cassation du 14 janvier 2025 apporte une précision importante sur la manière dont ces frais peuvent être évalués et indemnisés.
Le contexte
Dans cette affaire, une victime d’accident de la route, très gravement blessée, devait percevoir une indemnisation de plusieurs millions d’euros.
Une partie de cette somme concernait les dépenses futures : appareillages médicaux, aides techniques, assistance humaine, perte de revenus à venir.
Problème : comment calculer le montant exact à allouer, alors que ces dépenses ne sont pas ponctuelles mais récurrentes ?
C’est ici qu’intervient la capitalisation : plutôt que d’indemniser la victime petit à petit au fur et à mesure des dépenses, le juge détermine un capital (fondé sur l’âge de la victime et les barèmes en vigueur) qui sera censé couvrir, une fois pour toutes, l’ensemble des besoins futurs.
La question posée
Deux options s’offraient aux juges :
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Prendre en compte l’âge de la victime au jour de la décision de justice ;
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Ou bien retenir l’âge qu’elle aura lors du premier renouvellement des matériels médicaux (par exemple lors du remplacement d’un fauteuil roulant, d’une prothèse ou d’un équipement technique).
L’âge retenu est déterminant, car il influe directement sur le calcul de la rente viagère et donc sur le montant final versé à la victime.
La Haute juridiction adopte une position souple :
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Elle ne fixe pas une règle unique et intangible ;
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Elle confirme que le juge dispose d’un pouvoir souverain pour choisir la date la plus adaptée, à condition de respecter le principe fondamental de la réparation intégrale du dommage, sans perte ni profit pour la victime.
Autrement dit, les juges peuvent retenir l’âge de la victime au jour du jugement ou au jour du premier renouvellement, tant que l’équilibre est respecté.
Les enjeux pratiques
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Pour les victimes : cette solution garantit une certaine sécurité car la capitalisation évite les discussions à répétition avec l’assureur. Toutefois, un risque subsiste : les montants fixés aujourd’hui pourraient s’avérer insuffisants demain, si les matériels médicaux deviennent plus performants… et plus coûteux.
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Pour les assureurs : cette jurisprudence clarifie leur marge de manœuvre. Elle leur évite de devoir gérer des remboursements récurrents sur des décennies, tout en les obligeant à provisionner une somme importante dès le départ.
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Pour les praticiens du droit : cette décision illustre à quel point la question du calcul des préjudices corporels reste technique et stratégique.
En résumé
La Cour de cassation confirme une règle essentielle :
✅ La capitalisation des dépenses de santé futures est une opération prospective (tournée vers l’avenir, jamais vers le passé).
✅ Le juge est libre de choisir la méthode de calcul (âge au jugement ou au renouvellement) tant que la réparation est intégrale.
Pourquoi se faire accompagner ?
Ces décisions montrent que derrière des notions très techniques se jouent des sommes considérables pour les victimes comme pour les assureurs.
Comprendre la logique des barèmes, anticiper les conséquences d’une méthode de calcul plutôt qu’une autre, défendre ses intérêts devant le juge : tout cela nécessite une expertise juridique et financière.
➡️ Que vous soyez victime d’un accident corporel ou compagnie d’assurance, il est recommandé de vous faire accompagner par un professionnel du droit afin de sécuriser vos démarches et d’éviter des erreurs lourdes de conséquences.
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