Cass. crim., 04 décembre 2018 n°17-86.511
Dans l'arrêt commenté, la Cour de cassation a été amenée à se prononcer sur la régularité d'un procès-verbal de constatation d'infraction de Chasse, dans lequel il n'était pas mentionné le port des signes distinctifs de leurs fonctions par les agents de l'ONCFS.
I. Rappel des faits et de la Procédure
Les faits de l'espèce sont simples: dans le cadre d’un dispositif de surveillance mis en place par une commune pour chasse « à la passée » de la bécasse des bois, le prévenu a été interpellé le 6 novembre à 6 heures 45 du matin, par deux inspecteurs de l’environnement, affectés à l’Office national de la chasse et de la faune sauvage, qui, gyrophare de leur véhicule allumé, ont décliné leurs fonctions.
Le prévenu a été renvoyé devant la juridiction de proximité, pour diverses infractions à la réglementation sur la chasse. Après avoir rejeté les exceptions de nullité de la procédure, les premiers juges l'ont condamné de sorte que ce dernier a interjeté appel.
La Cour d'appel a, en revanche, infirmé le jugement en ce qu'elle a accueilli l'exception de nullité du procès-verbal de constatation soulevée par le prévenu servant de base aux poursuites au motif que ce dernier ne mentionnait pas le port de signes distinctifs par les inspecteurs de l'environnement.
La Cour d'appel a retenu que cette absence, a fortiori lors d'un contrôle du prévenu effectué de nuit, « a nécessairement porté atteinte à ses intérêts». Ce dernier est relaxé.
Un pourvoi est donc formé.
II. Décision de la Cour de cassation, Cass. crim., 04 décembre 2018 n°17-86.511
La Cour de cassation casse et annule l'arrêt d'appel au double motif que:
- d'une part, aucun texte n'impose aux inspecteurs de l'environnement de mentionner le port de leurs signes distinctifs dans les procès-verbaux qu'ils dressent ;
- d'autre part, « les procès-verbaux font foi jusqu'à preuve contraire, laquelle ne peut être rapportée que par écrit ou témoins ».
La Cour de cassation censure donc l'arrêt de la cour d'appel, qui n'avait pas constaté qu'une preuve contraire aux énonciations des procès-verbaux avait été rapportée. L'on peut néanmoins s'interroger sur la motivation de la Cour de cassation, dans cet attendu. En effet, il est acquis qu'il ressort des dispositions de l’article L.172-16 du Code de l’environnement que les infractions sont prouvées par procès-verbal jusqu’à preuve du contraire.
Mais sur ce point, la Loi et la Jurisprudence se sont montrées exigeantes quant à l’établissement de cette preuve afin qu’elle puisse éventuellement être contestée, de sorte que les procès-verbaux doivent contenir nombre d’éléments indispensables pour établir la matérialité des faits: par exemple, les éléments d'identification de l'agent verbalisateur, un exposé relatif à la constatation des faits, la description du comportement de l'auteur présumé de l'infraction, l'identité de l'auteur présumé, etc.
En ce qui concerne plus particulièrement la qualité de l'agent verbalisateur, les dispositions de l'article R.421-22 du Code de l’environnement énoncent : « Dans l'exercice de leurs fonctions, les agents de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage mentionnés au deuxième alinéa de l'article R. 421-18 sont tenus au port de signes distinctifs (…) ».
Ainsi, la Cour de cassation a pu estimer au contraire que tout procès-verbal établi par un agent qui ne ferait pas mention d’un signe distinctif relevant de sa fonction, entraînait la nullité du procès-verbal.
Il en va ainsi des procès-verbaux dressés par des agents de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage. Par exemple, dans un arrêt du 20 septembre 2005 (Cass. crim. 20 septembre 2005, n° 05-82.072) la Haute juridiction jugeait, dans une procédure dans laquelle les agents de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage s'étaient rendus, en civil, sur un marché afin de rechercher si des animaux appartenant à des espèces protégées y faisaient l'objet de transactions:
"Que sans préciser leur qualité, ils ont constaté qu'Hélène X..., qui exposait diverses sortes de canards, affichait en outre dans son véhicule une liste d'oiseaux qui n'étaient pas représentés sur son étal ; qu'à leur demande, elle leur a indiqué qu'il s'agissait d'espèces dont la vente était prohibée et dont elle dissimulait des spécimens dans son coffre ; qu'elle leur a alors présenté des couples de bernaches nonette et de tadornes de Belon, espèces protégées, dont elle leur a précisé le prix ;
Attendu qu'Hélène X... a été poursuivie du chef de transport et de mise en vente d'animaux appartenant à des espèces protégées ; que l'arrêt confirmatif attaqué l'a relaxée après avoir annulé le procès-verbal au motif qu'il relatait des constatations opérées par des agents qui n'étaient pas revêtus de l'uniforme attaché à leur fonction ;
Attendu qu'en prononçant ainsi la cour d'appel a justifié sa décision ; (...)".
Dès lors, on ne peut à notre sens faire grief à la Cour d'appel qui avait, sans doute à bon droit, retenu l'exception de nullité du procès-verbal de constatation au motif qu'il ne mentionnait pas le port de signes distinctifs par les inspecteurs de l'environnement... Mais, bien évidemment, moins il y a de Loi, plus il y a de Droit.
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