Dans un arrêt du 2 juin 2021 (Cass. com., 2 juin 2021, n° 20-10.690), la Cour de cassation est venue apporter une précision importante sur l'acte de cautionnement, censurant un arrêt de la Cour d'appel de LIMOGES en date du 5 novembre 2019 sur renvoi de cassation (Cass. com., 3 avril 2019, pourvoi n° 17-22.501).

 

I. Rappel des faits 


Les faits sont on ne peut plus classiques :

par un acte du 7 novembre 2008, une banque accorder à une société un prêt, garanti par le cautionnement d'un tiers. L'engagement de caution a été consenti dans un acte annexé au contrat de prêt, le tout étant établi en deux exemplaires originaux, remis l'un à la banque, l'autre à la caution.

La société ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires, la banque a obtenu une ordonnance d'injonction de payer contre la caution, à laquelle celle-ci a formé opposition, en faisant valoir que la mention manuscrite de l'acte de cautionnement n'était pas conforme à la loi.

Statuant sur renvoi après cassation, la Cour d'appel de LIMOGES jugeait que l'omission du mot « caution » dans la mention manuscrite légale affectait le sens et la portée de celle-ci et justifiait dès lors l'annulation de l'acte de cautionnement, peu importe que la banque détienne un second exemplaire de l'acte qui comportait quant à lui la mention légale intégrale, dès lors que la mention était incomplète sur un des exemplaires et que la différence qui en résultait avec la mention légale était déterminante du consentement de la caution.

 

La Haute juridiction, censure cet arrêt en considérant que le cautionnement est un contrat unilatéral, de sorte qu'un seul original est requis pour en apporter sa preuve par application des dispositions de l'article 1375 du Code civil.

Pour la Cour de cassatin, il suffit que la banque créancière détienne un exemplaire original comportant la mention manuscrite intégrale exigée par les dispositions de l'article L. 331-1 du Code de la consommation.

La Cour casse et annule au motif que "le cautionnement étant un contrat unilatéral, un seul original était requis et que M. [A] ne contestait pas avoir écrit de sa main les mentions conformes aux prescriptions légales sur l'exemplaire original détenu par le créancier (...)".

 

II. Analyse


Cette décision nous apparaît logique.

D’abord, parce que, par définition, une caution s'engage envers un créancier d'une obligation principale sans qu'il y ait d'engagement réciproque. Le contrat de cautionnement est donc unilatéral au sens des dispositions de l'article 1106 du Code civil, qui rappelle que le contrat est :

- synallagmatique lorsque les contractants s'obligent réciproquement les uns envers les autres ;

- unilatéral lorsqu'une ou plusieurs personnes s'obligent envers une ou plusieurs autres sans qu'il y ait d'engagement réciproque de celles-ci.

 

Ensuite, il est normal que tout contrat unilatéral par lequel une personne s'engage à payer à une autre une somme d'argent soit revêtu d'une mention écrite : c’est ce qui ressort des dispositions du Code de la consommation (mention exigée sous peine d’invalider l’acte) et de l’article 1376 du Code civil.

Dès lors, c’est à bon droit que la Cour de cassation juge que la formalité du double original ne vaut que pour les contrats synallagmatiques et ne s’applique donc pas aux contrats unilatéraux.

 

Au cas d’espèce, la Haute juridiction considère que le créancier détenait un original qui satisfait aux exigences prévues en termes de cautionnement, rapportant ainsi la preuve de l'engagement qui a été pris envers lui et lui permettant d’en obtenir l'exécution.

Néanmoins, si l’existence d’un second original importe peu en matière de contrat unilatéral, il nous apparaît néanmoins nécessaire de permettre à la caution d'obtenir un second exemplaire original afin de lui permettre de garder une trace des engagements qu'elle a pris à l'égard du créancier.