Dans le droit de l’indivision, le contentieux relatif à l’indemnité d’occupation est abondant et récurrent. L’indemnité d’occupation est prévue par l’article 815-9 du Code Civil qui énonce : « …. L’indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité ».
Il résulte de ce texte que l’indivisaire qui a bénéficié d’une jouissance exclusive ou privative du bien indivis doit verser une indemnité d’occupation à l’indivision.
L’indemnité d’occupation peut être assimilée à un loyer.
En revanche, l’indivisaire qui occupe un bien indivis en qualité de locataire ne doit pas d’indemnité d’occupation même si la valeur locative du bien occupé est nettement supérieure au montant du loyer acquitté (Arrêt Civ. 1ère du 18 mars 2020 no 19-11.206).
De nombreuses décisions de justice ont été rendues relativement à l’évaluation de l’indemnité d’occupation.
Pour être redevable d’une indemnité d’occupation, il n’est pas exigé une jouissance effective du bien indivis par l’indivisaire.
Si dans le principe le calcul de l’indemnité d’occupation se fait par référence à la valeur locative du bien indivis, d’autres critères peuvent interférer sur celui-ci.
Diverses circonstances peuvent avoir une incidence sur le calcul de l’indemnité d’occupation et des abattements, dont les pourcentages sont variables, pourront lui être appliqués.
Tel peut être le cas dans le cadre d’une procédure de divorce au cours de laquelle, la jouissance gratuite de l’immeuble en indivision peut être décidée.
Une réduction de l’indemnité d’occupation a pu parfois être accordée du fait que les enfants communs résidaient dans l’immeuble indivis avec l’un des époux en instance de divorce (Arrêt du 9 juin 2004 jugeant : « le montant de l’indemnité due par M. S. et qui est due non à Mme K. mais à l’indivision post-communautaire et pour l’ensemble de l’appartement doit tenir compte toutefois de la présence de l’enfant D. dans l'appartement commun ».
Tel peut être le cas lorsque le bien indivis est vétuste, un abattement de 20 % est généralement appliqué sur le montant de l’indemnité d’occupation.
C’est ce qui résulte d’un arrêt rendu le 11 mai 2022 (Cour d'Appel de PARIS - Pôle 03 ch. 01 n° 20/04289) en vertu duquel il a été jugé :
" Alors que les opérations d'expertise ont montré l'état très moyen, voire de vétusté du bien indivis, s'agissant notamment des éléments d'équipements relatifs à l'installation électrique, au chauffage et à la production d'eau chaude et que les parties n'ont pas produit d'estimation de la valeur locative d'un bien comparable et suivant le même état, c'est à juste titre que le premier juge pour déterminer le montant de l'indemnité d'occupation s'est basé sur le prix du loyer mensuel (1 168 €) d'un appartement de quatre pièces outre deux emplacements de parking dépendants d'une résidence de standing situé dans la même commune selon un avis produit par Mme A H et a appliqué un abattement afin de tenir du caractère précaire de l'occupation d'un bien indivis. Il en résulte que l'indemnité d'occupation dont est redevable M. K H s'élève à 935 € par mois. Partant, le jugement est confirmé en ce qu'il a fixé l'indemnité d'occupation mensuelle due par M. K H à l'indivision à la somme de 935 € à compter du 25 avril 2013 et jusqu'à la complète libération des lieux ou jusqu'au jour du partage."
Un abattement de l’ordre de 20 % peut aussi être appliqué afin de tenir compte de la précarité de l’occupation.
Si l’indemnité d’occupation est comparable à un loyer elle ne lui est pas pour autant assimilable dans la mesure où, l’indivisaire occupant n’est pas dans la situation d’un locataire puisqu’il ne bénéficie pas de la protection légale assurée à ce dernier.
C’est ce qu’illustre un arrêt rendu le 22 mars 2022 (Cour d’Appel de PARIS - n° 21/03112).
Dans le cas d’espèce, le 29 septembre 1999, pendant leur concubinage, Mme ML et M. RH ont acquis en indivision, chacun pour moitié, un terrain situé [Adresse] au prix de 33 538,78 € réglé par un prêt de même montant consenti par la Société Générale. Ils ont construit sur ce terrain, sans intervention de tiers professionnels, une maison qu'ils ont occupée ensemble jusqu'au départ de Mme L le 22 mai 2016.
Saisi par Mme L, le tribunal judiciaire de MEAUX a, par jugement du 27 novembre 2020, notamment (…) fixé à la somme mensuelle de 1 000,00 € l'indemnité d'occupation due par M. H à l’indivision à compter du 11 mai 2016.
Le tribunal s’est référé aux avis de valeur locative produits par les parties estimant qu'il disposait ainsi des éléments suffisants pour fixer le montant de cette indemnité à la somme mensuelle de 1 000,00 €.
M. H a fait appel de ce jugement.
S’agissant du montant de l’indemnité d’occupation, les parties ont produit devant la cour les mêmes estimations de valeur locative, soit pour Mme L deux avis du 16 février 2018 faisant chacune état d’une valeur locative comprise entre 1 200 et 1 300 € et pour M. H un avis de valeur du 21 février 2017 compris entre 850 et 900 € et un autre, daté du 29 novembre 2018, à 1 200 € par mois, soit une valeur locative moyenne de 1 143 €.
La Cour a retenu qu’il convient d’appliquer un coefficient de précarité de 20 % et fixer en conséquence le montant de l’indemnité d’occupation due à l’indivision à 915,00 € par mois.
Il en résulte que si de manière théorique le calcul d’indemnité d’occupation paraît aisé, des contingences spécifiques peuvent avoir un impact non négligeable sur son montant.
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