Aux termes de l’article 233 du Code de procédure civile, « le technicien, investi de ses pouvoirs par le juge en raison de sa qualification, doit remplir personnellement la mission qui lui est confiée ».

Cette règle s’impose à toute mesure d’instruction exécutée par un technicien, comme le précise l’article 232 du Code de procédure civile qui dispose :

« le juge peut commettre toute personne de son choix pour l’éclairer par des constatations, par une consultation ou par une expertise sur une question de fait qui requiert les lumières d’un technicien ».

L’article 233 précité n’est donc nullement réservé aux opérations d’expertise, malgré le fait que la jurisprudence rendue sur ce visa concerne quasi-exclusivement ces mesures, mais s’applique également aux mesures de constat et aux consultations.

Afin de veiller au respect de cette disposition, il est jugé de manière constante que le juge, si la demande lui en est faite, doit rechercher si le technicien n’a pas délégué l’accomplissement de sa mission à un tiers.

  • voir en ce sens : Civ. 2ème, 8 avril 1999, pourvoi n°96-21.897 ; Civ. 1ère, 10 avril 1996, pourvoi n°95-10-707 ; Civ. 3ème, 26 novembre 2008, pourvoi n°07-20.071

Si tel est le cas, la mesure d’instruction encourt une nullité de fond.

  • voir en ce sens : Civ. 2ème, 27 avril 2000, pourvoi n°98-13.361 ; Civ. 2ème, 10 juin 2004, pourvoi n°02-15.129 ; Civ. 3ème, 26 novembre 2008, pourvoi n°07-20.071

Certes, il est admis que le technicien puisse être assisté par un expert dans un domaine précis, mais sous réserve que cette personne soit en permanence sous sa direction, son contrôle et sa surveillance, et qu’il n’effectue que des missions purement techniques ou matérielles.

Il a ainsi été jugé que le technicien « qui avait confié à M. A…, géomètre expert possédant le matériel nécessaire de photogrammétrie, un travail technique consistant à retranscrire des photographies sur un plan, sans avoir à interpréter les documents » avait exécuté sa mission conformément à l’article 233 précité.

  • Civ. 2ème, 15 octobre 2009, n°08-16.582

En revanche, des « opérations de mesurage des propriétés [constituent] des actes d’exécution à caractère purement technique inhérents à la mission de l’expert et comme tels, insusceptible d’être délégués, comme auraient pu l’être des tâches purement matérielles ».

Ainsi, « en l’absence de toute direction, contrôle ou surveillance par [le technicien], [ces opérations] ont été effectuées en méconnaissance de son obligation d’accomplir personnellement sa mission et ne pouvaient, en conséquence, valoir opérations d’expertise ».

  • Civ. 2ème, 10 juin 2004, n°02-15.129

Dans une autre affaire, la Cour d’appel de ROUEN a eu à se prononcer sur l’éventuelle nullité d’opérations de constat en raison du rôle d’un expert informaticien devant assister l’huissier.

La Cour d’appel de ROUEN retenait alors :

« S’agissant de la prétendue saisie par une personne tierce qui aurait exploité unilatéralement les données, il sera relevé que l'ordonnance autorisait expressément l'huissier à se faire assister par un technicien informatique, que dans son procès-verbal l'huissier précise bien qu'il est accompagné de Monsieur Desbuissons informaticien et que le matériel informatique appréhendé avec l'aide de ce dernier (et non par ce dernier seul en dépit de la formulation du reçu annexé) a été déposé immédiatement en son étude, le rapport établi par ce technicien faisant expressément mention d'une analyse de l'ordinateur en l'étude d'huissier et en présence de ce dernier ».

Ainsi, la Cour d’appel juge que les opérations de constat ne sont pas entachées de nullité parce qu’elle constate que l’expert a procédé « seulement à une analyse, en l'étude de l'huissier et en présence de ce dernier ».  CA Rouen, ch. civile et commerciale, 5 mai 2011, N°11/03200 ; SASU SYNCHRONIC c/ SAS NORD PROTECTION