L'embauche d'un ou plusieurs salariés d'une entreprise concurrente n'est pas nécessairement un comportement fautif. Pour que cela constitue un acte de concurrence déloyale, il est nécessaire que ce recrutement entraîne soit une désorganisation de l'entreprise, soit qu'il viole une clause de non-concurrence.

En l'absence de clause de non-concurrence, et dans le cadre de la libre concurrence, une entreprise a le droit de chercher à embaucher les meilleurs talents, et en l'absence de contrats contraires, un salarié peut tout à fait rompre son contrat pour travailler chez un concurrent.

Ainsi, le simple fait d'embaucher un salarié d'une entreprise concurrente ne constitue pas, en soi, un acte de concurrence déloyale. Pour que cela soit considéré comme tel, il faut démontrer concrètement que le nouvel employeur a commis une faute ayant entraîné une désorganisation de l'entreprise.

Les juges se basent sur certains indicateurs pour établir la faute du nouvel employeur. Il sera nécessaire de prouver le caractère simultané et/ou massif des embauches, ou encore des "manœuvres" de la part du concurrent pour attirer le ou les salariés. Ces manœuvres peuvent être retenues, par exemple, si le nouvel employeur propose des conditions d'embauche exceptionnellement favorables, notamment un salaire excessivement élevé.

Il faut également démontrer que les recrutements litigieux ont effectivement perturbé la structure de l'entreprise. Une simple perturbation ne suffit pas. Il faut prouver que l'organisation même de la société est menacée. En la matière, le principe est celui de la liberté du travail. Il est donc permis à un autre employeur de proposer un nouvel emploi à une personne encore salariée dans une autre entreprise.

  • Com., 21 janv. 1997, pourvoi n°94-17800).

En conséquence, l'embauche par un employeur d'un salarié ayant appartenu récemment à une entreprise exerçant une activité dans le même secteur ne fait pas présumer, par elle-même, de l'existence d'un acte de concurrence déloyale.

  • Com., 19 oct. 1999, pourvoi n° 97-15795).

Le débauchage ne devient déloyal que si une faute peut être imputée au nouvel employeur.

Ainsi, au-delà de l’embauche par une Société d’anciens salariés d’une Société concurrente, doit être prouvé, de manière cumulative :

  • d'une part, l'existence de manœuvres déloyales accompagnant l’embauche ;
  • d'autre part, que les faits invoqués ont entraîné la désorganisation du fonctionnement de l'entreprise concurrente, et non une simple perturbation ou un déplacement de clientèle.
  • Com., 23 oct. 2007, pourvoi n°05-17155 ; Cass. com., 5 nov. 20023, pourvoi n°01-03665

Ainsi, justifie légalement sa décision de rejeter le grief de concurrence déloyale la Cour d’appel qui retient que le recrutement par une Société de vingt-deux anciens représentants d’une Société concurrente :

« n'a pas eu pour effet de désorganiser l'entreprise de l'ancien employeur, que la meilleure rémunération obtenue par ces représentants chez leur nouvel employeur correspond à leur réelle qualification et qu'enfin leur affectation au même secteur que celui auquel ils l'étaient auparavant s'est fait dans le cadre de la libre concurrence »

  • Com., 21 janv. 1997, pourvoi n°94-17800, précité

De même, le débauchage par le nouvel employeur doit être caractérisé, tout comme l'existence des manœuvres déloyales des anciens salariés.

Il ne suffit pas, pour condamner une nouvelle société, de relever que, très rapidement, trois salariés ayant une connaissance précise des activités commerciales de l'ancien employeur sont partis pour la rejoindre, utilisant les connaissances précédemment acquises, deux d'entre eux ayant souscrit au capital.

  • Com., 1er juin 1999, pourvoi n°97-15421

Par ailleurs, le recrutement ne peut être considéré comme fautif lorsque l'ancien employeur est lui-même responsable du départ des salariés, entraînant ainsi indirectement la désorganisation de son entreprise.

Il s’ensuit qu’un recrutement massif de salariés d’une entreprise par une entreprise concurrente n’a pas à être sanctionné dans la mesure où leur démission était liée aux difficultés de celle-ci et à leurs inquiétudes en termes d'emploi (Cass. com. 22-5-2007 no 06-13.421).