L’article L. 600-1-2 du code de l’urbanisme tel que créé par l’ordonnance 2013-638 du 18 juillet 2013 est venu limiter l’intérêt à agir contre une autorisation d’urbanisme, en imposant au requérant de démontrer que le projet autorisé affecte « directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien » qu’il détient ou occupe.

 

Dans un arrêt du 10 juin 2015, M. B.D. et Mme C, n°386121, le Conseil d’Etat a fixé la méthode de contrôle de cet intérêt à agir, laquelle se déroule en trois temps.

Pour commencer, il revient au requérant « de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien ».

Ensuite, le défendeur peut, s’il l’estime utile, contester cet intérêt à agir en apportant « tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité ».

Enfin, il revient au juge de se faire sa conviction « en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque ».

 

Ce schéma d’analyse a été complété au sujet du voisin immédiat du projet autorisé, pour lequel les juges du Palais Royal estiment qu’il « justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction » (CE, 13 avril 2016, M. B.C., n°389798).

 

Par un nouvel arrêt du 28 avril 2017, M. C.F., n°393801, le Conseil d’Etat a encore affiné sa jurisprudence et s’est prononcé sur l’intérêt à agir du propriétaire d’un terrain non construit, en faisant une application classique des critères d’analyse énoncés ci-avant :

« Considérant que le propriétaire d'un terrain non construit est recevable, quand bien même il ne l'occuperait ni ne l'exploiterait, à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager si, au vu des éléments versés au dossier, il apparait que la construction projetée est, eu égard à ses caractéristiques et à la configuration des lieux en cause, de nature à affecter directement les conditions de jouissance de son bien »

 

Il est enfin à noter que même si, de prime abord, l’intérêt pour agir du propriétaire d’un terrain nu parait particulièrement difficile à démontrer, la haute juridiction administrative n’a pas souhaité créer de présomption d’absence d’intérêt à agir, comme elle a pu le faire, à l’inverse, pour le voisin immédiat.