Le saviez-vous ? La Cour de cassation subordonne la faute du notaire qui a instrumenté un acte litigieux - annulé pour consentement non lucide -  à la démonstration de « l'existence de circonstances particulières lui permettant de mettre en doute les facultés mentales du client » (Civ. 1ère, 9 févr. 1999, n° 97-10.317).

Appliquant cette jurisprudence, les juges ont sanctionné la légèreté et les négligences fautives du notaire ayant omis de s’assurer de la capacité de sa cliente (Cass., civ. 1ère, 02 octobre 2013).

Les faits : vente d'un bien immobilier par procuration d'une personne insance d'esprit

Un an avant d’être placée sous tutelle, Claudine A a vendu l'immeuble affecté au logement familial qui lui appartenait en propre.

Son mari avait autorisé cette vente (domicile conjugal), même si le couple ne résidait plus dans cet immeuble mais au domicile de M. et Mme D.

Par acte notarié reçu le 10 janv. 2003, l'immeuble de Claudine A a été vendu à Brigitte C, puis revendu par celle-ci, le 1er juin 2006, à Lionel Y.

Or, ni Claudine A, ni son mari n'étaient présents pour signer l'acte du 10 janv. 2003.

La veille, Claudine A avait donné procuration à Mme D, et Claude B à un clerc de l'étude.

Confirmation de la décision de la Cour d’appel d’ORLÉANS

Pour annuler la vente litigieuse et engager la responsabilité du notaire, l'arrêt relève que :

« La venderesse était représentée à l'acte litigieux par Mme D..., chez laquelle elle résidait, tandis que ni son activité professionnelle déclarée ni l'éloignement de son domicile ne justifiaient le recours à une procuration, signée en présence d'une secrétaire de l'étude devant laquelle elle s'était présentée à l'improviste, circonstances qui étaient de nature à permettre au notaire de douter des facultés mentales de la mandante qu'il n'avait pu rencontrer.

De ces constatations et appréciations, la cour d'appel a exactement déduit que le notaire avait fait preuve de légèreté et de négligences fautives en omettant de s'assurer personnellement de la capacité à disposer de sa cliente, obligation dont il ne pouvait être dispensé par l'intervention d'un autre professionnel de l'immobilier lors de la signature de la promesse de vente ».

Dès lors qu'un notaire connaît l'impossibilité d'une partie à délivrer un consentement lucide, il doit s'abstenir de dresser l'acte authentique jusqu'à ce qu'elle soit valablement représentée (par un tuteur ou l'époux habilité sur le fondement de l'art. 219 c. civ.).

L’essentiel à retenir : En cas de doute sur l'aptitude d'une personne à délivrer un consentement lucide, le notaire doit demander un certificat médical attestant de l'absence d'empêchement à consentir à un acte important de la vie civile.

À défaut, le notaire s’expose à être déclarer responsable de l'annulation d'un acte pour défaut total de consentement.


Claudia CANINI

Avocat au Barreau de TOULOUSE

Droit des majeurs protégés

https://consultation.avocat.fr/avocat-toulouse/claudia-canini-3250.html


Sources : Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 2 octobre 2013 – N° 12-24.754 12-25.862 12-26.223 12-27.874