De l’obligation de sécurité de résultat à l’obligation de prévention de résultat

Dans le but d’assurer l’effectivité des devoirs mis à la charge des employeurs par la loi et la réglementation en matière de prévention et de sécurité, la jurisprudence a imposé à l’employeur une obligation de sécurité de résultat (soc. 28 février 2002, n°99-17.201, arrêts amiante).

Une telle obligation a pour conséquence d’engager la responsabilité de l’employeur et ce, même en l’absence de toute faute de sa part[1], il suffit de démontrer l’existence d’un préjudice (lésion ou maladie) ainsi qu’un lien de causalité entre le travail et le dommage.

L’employeur ne peut ainsi s’exonérer de sa responsabilité que s’il démontre que l’accident serait dû à la faute exclusive de la victime ou à des circonstances imprévisibles, irrésistibles et extérieures relevant de la force majeure.

Cette jurisprudence a depuis perduré et a trouvé à s’appliquer, notamment, aux risques liés au tabagisme, au harcèlement moral et, de façon plus générale, aux risques psycho-sociaux.

 

Cependant, l’année 2015 a marqué un virage dans cette politique prétorienne, par un arrêt en date du 25 novembre 2015[2], publié au Bulletin, la Cour de cassation a affirmé que :

«  …ne méconnaît pas l'obligation légale lui imposant de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, l'employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail ».

Autrement dit, l’employeur peut dorénavant s’exonérer de sa responsabilité s’il justifie avoir pris les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Au titre de ces mesures, l’article L.4121-1 du Code du travail prévoit qu’il appartient à l’employeur de mettre en œuvre :

  • Des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail,
  • Des actions d’information et de formation,
  • La mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.

L’article L.4121-2 énonce, quant à lui, les principes généraux sur lesquels se fondent ces mesures en vertu desquels l’employeur doit éviter les risques, évaluer ceux qui ne peuvent être évités, combattre les risques à leur source, adapter le travail à l’homme, tenir compte de l’état d’évolution de la technique, remplacer ce qui est dangereux par ce qui n’est pas ou moins dangereux, planifier la prévention, prendre les mesures de protection collective et donner les instructions appropriées aux travailleurs.

Cette évolution jurisprudentielle reflète ainsi la volonté de privilégier la prévention à la réparation, prévention qui « consiste non pas à faire cesser le dommage mais à prendre des mesures permettant de l’éviter »[3].

 

Elise ECOMBAT

Avocat au Barreau de Laon

 


[1] Soc. 1er mars 2011, n°09-69.616

[2] Soc. 25 novembre 2015, n°14-24.444

[3] Paul-Henri ANTONMATTEI, Obligation de sécurité de résultat : virage jurisprudentiel sur l’aile !, Droit Social 2016 p. 457.