En matière de bail commercial, il est d’usage de prévoir au contrat que le paiement des charges se fait sur appels provisionnels desdites charges, lesquels doivent ensuite faire l’objet d’une régularisation au besoin sur présentation de justificatifs.

                                                                                                                                         

La 3ème chambre civile de la Cour de cassation a récemment rendu un arrêt concernant la restitution des charges non justifiées.

En l’espèce, le garant d’un preneur, actionné en paiement, a soutenu que la créance en remboursement de dépense au titre de charges et impôts n’étant pas établie, la société bailleresse devait restituer les sommes non justifiées.

La Cour de cassation approuve la Cour d’appel de Paris d’avoir suivi le raisonnement du preneur :

« Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Paris, 5 décembre 2018), à la suite de la résiliation d’un bail commercial stipulant que le preneur remboursera au bailleur un certain nombre de dépenses annuelles, la société Oursel, bailleresse, a assigné M. X..., en sa qualité de garant solidaire du cessionnaire pour l’exécution de toutes les conditions du bail, en condamnation à lui payer diverses sommes au titre d’un arriéré locatif.

2. M. X..., qui a soutenu que la créance en remboursement de dépenses au titre de charges et impôts n’était pas établie, a demandé la restitution des provisions appelées à ce titre.

Examen du moyen

Énoncé du moyen

3. La société Oursel fait grief à l’arrêt d’accueillir la demande en remboursement des provisions versées, alors :

« 1°/ qu’il incombe à celui qui réclame la restitution de sommes qu’il prétend avoir indûment payées de prouver le caractère indu du paiement ; qu’en condamnant la société bailleresse à restituer au garant du locataire les sommes correspondant à des provisions sur charges et à la taxe foncière faute pour elle d’en justifier, quand il incombait au contraire au demandeur à la restitution de prouver que les charges et taxes s’ajoutant au loyer n’étaient pas dues, la cour d’appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé l’article 1353 du code civil ;

2°/ que commet un déni de justice le juge qui, au motif de l’insuffisance des éléments produits par les parties, refuse d’évaluer une créance dont il constate l’existence en son principe ; qu’il résulte des propres constatations de l’arrêt que le bail du 23 mars 2013 mettait exclusivement à la charge du preneur les charges et la taxe foncière afférentes au bien immobilier loué ; qu’en jugeant néanmoins que faute de fournir les justificatifs y afférents, la société bailleresse ne pouvait obtenir paiement au titre de l’appel des charges et de la taxe foncière mentionnées aux avis d’échéance, la cour d’appel a méconnu son office et violé l’article 4 du code civil.  »

Réponse de la Cour

4. Il incombe au bailleur qui réclame au preneur de lui rembourser, conformément au contrat de bail commercial le prévoyant, un ensemble de dépenses et de taxes, d’établir sa créance en démontrant l’existence et le montant de ces charges.

5. La cour d’appel a relevé que la SCI Oursel, bailleresse, avait appelé des provisions pour charges et pour taxes foncières.

6. Elle a, sans inverser la charge de la preuve ni méconnaître son office, exactement retenu que la bailleresse devait pour conserver, en les affectant à sa créance de remboursement, les sommes versées au titre des provisions, justifier le montant des dépenses et que, faute d’y satisfaire, elle devait restituer au preneur les sommes versées au titre des provisions.

7. Le moyen n’est donc pas fond ».

(Cass. Civ. 3, 17 septembre 2020, pourvoi n°19-14168)

La Cour de cassation rappelle ainsi, à bon droit, que faute pour le bailleur  de pouvoir justifier de l’existence et du montant des charges appelées à titre provisionnel, il est tenu de les restituer au preneur.