Comment concilier la sécurité juridique et l’accès des particuliers aux juges ?

Telle est l’une des grandes interrogations qui anime le pouvoir législatif et judiciaire depuis de nombreuses années dans un contexte d’engorgement des juridictions.

Le décret n°2017-891 du 6 mai 2017 apporte, à lui seul, une solution partielle à cette difficile entente entre deux finalités a priori contradictoires.

En effet, ce décret opère une grande réforme de la procédure civile en modifiant substantiellement la procédure d’appel.

Ainsi, suite à ce décret, l’article 901 du code de procédure civile dispose que  :

« La déclaration d'appel est faite par acte contenant, outre les mentions prescrites par l'article 57, et à peine de nullité :

(...)

4° Les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible. »

De plus, l’article 562 du Code Civil dispose que :

« L'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent.

La dévolution ne s'opère pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible. »

Aussi, bien que les textes prévoyaient une nullité de l’appel en cas d’absence des chefs de jugement critiqués, les juges de l’ordre judiciaire avaient parfois tendance à assouplir ces règles pour permettre à l’appelant de régulariser sa déclaration d’appel.

Ce n’est que récemment, que la Cour de Cassation a rendu un arrêt qui tranche la question en la matière.

Ainsi dans un arrêt rendu le 30 janvier 2020, la Cour de Cassation juge que :

« Seul l’acte d’appel opère la dévolution des chefs critiqués du jugement.

Il en résulte que lorsque la déclaration d’appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l’effet dévolutif n’opère pas. »

Ainsi, une déclaration d’appel qui ne mentionne pas les chefs de jugement critiqués et se cantonne à former un « appel total » sans plus de précisions devra être déclarée nulle et inexistante.

La Cour d’Appel, alors saisie d’aucune déclaration d’appel existante ne pourra que confirmer le jugement des juges de 1ère instance.

Néanmoins, il existe une possibilité pour l’appelant de régulariser sa requête entachée d’un vice de forme par une nouvelle déclaration d’appel dans le délai imparti à l’appelant pour conclure au fond (Cour de cassation, Deuxième chambre civile, 30 janvier 2020, 18-22.528)

En outre, deux exceptions échappent à l’obligation de mention des chefs de jugement critiqués :

  • lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement
  • et lorsque l'objet du litige est indivisible

En définitive, la possibilité de régularisation ainsi que les exceptions à une règle très stricte quant à la déclaration d’appel permettent de trouver un compromis entre le maintien de la sécurité juridique et la protection de l’accès des particuliers aux juges.  

La Cour de Cassation ajoute, ainsi, justement dans l’arrêt susmentionné que :

« Il résulte de ce qui précède que ces règles ne portent pas atteinte, en elles-mêmes, à la substance du droit d’accès au juge d’appel. »

 

Maître Grégoire HERVET
Avocat en droit du travail
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