Décès du salarié consécutif à la procédure de licenciement : la faute inexcusable de l’employeur pas forcément retenue.

 

Même dans des circonstances dramatiques, comme celles connues dans les deux affaires qui ont été jugées par la  Deuxième Chambre civile de la Cour de Cassation le même jour, la faute inexcusable de l'employeur n'est pas nécessairement retenue.

 

Rappelons que la faute inexcusable est définie comme celle d'une exceptionnelle gravité qui est telle que son auteur avait nécessairement, ou aurait dû avoir, conscience du danger auquel il exposait la victime.

 

Dans la première affaire,  quelques heures après avoir été licencié pour faute grave, un salarié s'est suicidé, laissant derrière lui une lettre ne laissant aucun doute sur la cause de son geste fatal.

 

La Cour d'appel a retenu la faute inexcusable, et la Cour de Cassation a rejeté le pourvoi de l’employeur, on s'appuyant sur les éléments suivants : L'employeur connaissait la fragilité psychologique de son salarié, le licenciement présentait un caractère brutal pour un salarié ayant plus de 23 ans d'ancienneté et n'ayant pas fait l'objet de sanctions disciplinaires antérieurement ; la procédure de licenciement était déloyale en raison d'une part de l'envoi, pendant les congés du salarié, de la convocation à un entretien préalable fixé deux jours après la fin desdits congés. Dans ces conditions la Cour de Cassation a approuvé la Cour d'appel d'avoir déduit que l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience des risques psychologiques encourus par le salarié et qu'il n'avait pas mis en œuvre les mesures nécessaires pour l'en préserver.

 

Mais dans la seconde affaire, ou la Cour d'appel avait retenu la faute inexcusable de l'employeur en retenant qu'elle résultait de la tenue d'un entretien disciplinaire au cours duquel le directeur de l'établissement avait été « insistant » au point que le salarié avait demandé que cet entretien fut écourté, et qu'il a ressenti un malaise l'ayant conduit aux urgences d'un hôpital sur sa demande, où il est malheureusement décédé. La Cour d'appel a jugé que même s'il ne peut être retenu que le directeur de l'établissement aurait tenu des propos déplacés, le risque induit par cet entretien disciplinaire, sur un salarié psychiquement fragile, exposait le salarié à un risque dont l'employeur ne pouvait pas ne pas avoir conscience.

 

La Cour de Cassation n'est pas du même avis : pour elle, ces éléments sont insuffisants à caractériser la conscience qu'avait ou devait avoir l'employeur du danger auquel était exposé le salarié.

 

Cassation Civile 2ème 28 Novembre 2019, Jurisdata n°2019-021319

Cassation Civile 2ème 28 Novembre 2019, Jurisdata n°2019-019733