Un arrêt intéressant de la Cour de cassation vient rappeler que seules les fonctions réellement exercées sont prises en compte pour apprécier le statut du salarié, et donc le cas échéant la demande de rappel de salaires lorsque c'est un statut supérieur qui est revendiqué.

Dans cette affaire, il s'agissait de savoir si le salarié, embauché comme agent de maîtrise, était en droit de revendiquer le statut cadre avec toutes les conséquences dont cela découlent.

La cour de cassation précise ;

- qu'un salarié au statut de cadre est investi de certaines responsabilités et a un minimum d'autonomie dans l'exercice de ses fonctions,

- que ce sont les fonctions qu'exerce réellement le salarié qui permettent d'apprécier s'il peut bénéficier d'un tel statut.

De cet arrêt du 6 mai 2009, il résulte que ne peut pas prétendre à la classification de cadre, le salarié qui :

- est investi d'une responsabilité limitée nécessitant une prise d'initiative sous la responsabilité d'un chef de service,

- ne gère pas de mission globale,

- n'a pas de personnel sous ses ordres,

- est placé sous la subordination d'un cadre sans disposer d'un pouvoir décisionnaire.

Jean-Philippe SCHMITT

Avocat à DIJON (21)

Spécialiste en droit du travail

03.80.48.65.00

Cass. soc. 6 mai 2009, n° 07-41262 FD

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Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du mercredi 6 mai 2009

N° de pourvoi: 07-41262

Non publié au bulletin Rejet

M. Blatman (conseiller le plus ancien faisant fonction de président), président

SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, SCP Thomas-Raquin et Bénabent, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bastia, 10 janvier 2007), que Mme X..., engagée à partir du 1er juillet 2001 par l'Agence du tourisme de la Corse (ATC) pour assister une chargée de mission de l'agence en pré-retraite progressive, a signé un avenant à son contrat de travail aux termes duquel elle était nommée à compter du 1er juillet 2002, chargée de mission affectée au service promotion de l'ATC, au coefficient 213 correspondant au grade d'assistant, catégorie 2, niveau 2 de la convention collective nationale des organismes de tourisme du 5 février 1996 ; que revendiquant le statut de cadre, position 3.1, elle a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement d'un rappel de salaire ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt d'avoir dit qu'en application de la convention collective, elle était classée agent de maîtrise 2.2, coefficient 213, à compter du 1er juillet 2002 et 2.3 indice 1900, depuis le 1er mars 2004, et de l'avoir déboutée de ses demandes de condamnation au paiement de rappels de salaire et de délivrance de bulletins de paie rectifiés, alors, selon le moyen :

1°/ que l'article 1er de l'avenant n° 3 du 7 octobre 2002 au contrat de travail énonçait que Mme X... "occupera le poste de chargé de mission et exercera ses fonctions conformément aux termes de la fiche de poste ci-annexée" ; qu'en estimant que la mention d'un classement 3.1 figurant dans cette fiche – dont il importait peu qu'elle ait été annexée par erreur dès lors que la cour relève que les parties s'accordaient sur le fait que l'emploi de référence litigieux était un emploi de chargé de mission 3.1 – n'obligeait pas l'employeur à l'égard de la salariée, à raison de ce qu'il se serait agi d'une fiche non nominative, présentée comme une description générale et indicative du poste, ce qui est le sens du terme de "fiche repère", et ne comportait aucune indication quant à la rémunération ou à l'indice, alors que le renvoi exprès du contrat conférait à cette fiche un caractère contractuel, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;

2°/ que l'avenant n° 1 du 7 octobre 2002 au contrat de travail, s'il prévoyait que celle-ci percevrait une rémunération correspondant au coefficient 213 correspondant lui même au grade d'assistant catégorie 2 niveau 2, stipulait dans son article 2 qu'il était procédé à une requalification "permettant, in fine, d'obtenir une adéquation entre le poste défini à l'article 1 et le grade correspondant", l'article 1 prévoyant lui-même que la salariée occuperait le poste de chargé de mission et exercerait ses fonctions conformément aux termes de la fiche de poste annexée au contrat ; qu'en estimant que les mentions de l'avenant indiquant un classement 2.2 étaient claires, alors que les énonciations des articles 1 et 2 engendraient une ambiguïté sur le contenu de la reclassification convenue entre les parties, qui imposait aux juges du fond d'opérer une interprétation, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;

3°/ qu'en faisant droit aux thèses de l'employeur soutenant que la classification qu'il avait attribuée était conforme aux dispositions de la convention collective, sans s'expliquer, comme elle y était invitée, sur les conditions dans lesquelles avaient été établies l'organisation et les pièces sur lesquelles se fondait cette thèse, postérieurement à la saisine du conseil de prud'hommes et afin de nuire au salarié qui avait engagé une procédure, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du principe "nul ne peut se constituer de preuve à lui-même" et de l'article 1315 du code civil ;

Mais attendu d'abord, que, recherchant quelles étaient les fonctions réellement exercées par la salariée, la cour d'appel qui a apprécié souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, a retenu que cette dernière, investie d'une responsabilité limitée pour la prospection des marchés étrangers nécessitant une prise d'initiative sous la responsabilité d'un chef de service, ne gérait pas de mission globale, n'avait pas de personnel sous ses ordres, et était elle-même placée sous la subordination d'un cadre sans disposer d'un pouvoir décisionnaire dans l'agence ; qu'ayant ensuite relevé que la "grille Lanzalavi" à laquelle se référait la fiche de poste annexée par erreur au premier avenant, n'avait jamais reçu d'application, faute d'un accord entre l'employeur et les représentants du personnel et était dépourvue de caractère contractuel, elle a pu décider, sans encourir les griefs du moyen, que Mme X... ne pouvait prétendre à la classification de cadre qu'elle demandait ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que la salariée fait également grief à l'arrêt d'avoir dit qu'en application de la convention collective, elle était classée agent de maîtrise 2.2., coefficient 213 à compter du 1er juillet 2002 et 2.3, indice 1900 depuis le 1er mars 2004 et de l'avoir déboutée de ses demandes de rappels de salaire, alors, selon le moyen, que s'il appartient au salarié qui se prétend lésé par une discrimination salariale de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de traitement, il incombe à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments étrangers à toute discrimination, justifiant l'inégalité de traitement dont se plaint le salarié ; qu'en écartant sa demande fondée sur le fait que d'autres salariés ayant la qualité de chargés de mission étaient classés dans la catégorie cadres, au motif que cet intitulé commun de "chargé de mission" ne pouvait suffire à justifier un alignement de salaire sans qu'il soit démontré une identité des situations de travail, et que cette dénomination courante dans le personnel de l'agence, cadre et non cadre, correspondait à des postes de contenu très divers, notamment quant au niveau de formation, aux responsabilités exercées ou à l'ancienneté et à des niveaux de rémunération variables, alors que, dès lors que la salariée avait fait état de l'identité de sa situation avec d'autres chargés de mission, il incombait à l'employeur d'établir que sa situation était différente de celle de ces autres salariés, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du principe "à travail égal, salaire égal" ainsi que de l'article 1315 du code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel qui a constaté, sans inverser la charge de la preuve, que l'employeur justifiait de ce que la salariée exerçait des fonctions tout à fait comparables à celles des salariés classés agent de maîtrise 2.3, et qu'elle ne se trouvait pas dans une situation de travail identique à celle de ses collègues classés cadres 3.1 qu'elle citait en référence, notamment au regard d'une expérience et d'une ancienneté professionnelles plus réduites, n'encourt pas les griefs du moyen ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six mai deux mille neuf.