La preuve en droit du travail est essentielle, surtout lorsqu'il est question de la rupture du contrat de travail. Aussi, l'arrêt qui vient d'être rendu par la chambre Sociale de Cour de cassation ce 11 février 2009 mérite d'être commenté.

En l'espèce, pour trouver une solution aux vols constatés au sein de son usine, l'employeur avait décidé de contrôler plusieurs salariés à l'issue de leur journée de travail. Ce contrôle effectué en présence du directeur de l'établissement a consisté à faire ouvrir par les salariés leurs sacs personnels. Aucun d'entre eux n'a soulevé d'objection à cette demande. Dans le sac d'un salarié se trouvaient 300 sachets plastiques servant à conditionner les produits de l'usine. Le vol étant constaté, une procédure de licenciement pour faute a immédiatement été enclenché par l'employeur. Lors de l'entretien préalable, le salarié a reconnu les faits et précisé que ces sachets étaient destinés à une association caritative. Licencié pour faute grave, le salarié s'est finalement décidé à s'adresser au Conseil des prud'hommes pour contester le licenciement, soulevant pour cela un débat juridique tenant à la légalité du contrôle effectué par l'employeur.

Si le juge du fond a estimé que le licenciement était justifié par la faute grave, la Cour de cassation n'est pas du même avis. Au visa des articles L1121-1 du Code du travail et 9 du Code civil, « l'employeur ne peut apporter aux libertés individuelles ou collectives des salariés que des restrictions justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché ; qu'il ne peut ainsi, sauf circonstances exceptionnelles, ouvrir les sacs appartenant aux salariés pour en vérifier le contenu qu'avec leur accord et à la condition de les avoir avertis de leur droit de s'y opposer et d'exiger la présence d'un témoin ».

Ainsi, le fait que le contrôle du sac du salarié ait été fait en sa présence et avec son consentement n'a aucune incidence directe sur la possibilité pour le salarié de contester la légalité de l'opération, ceci dès lors qu'il n'avait pas été informé de ses droits. En conséquence, l'employeur ne peut réaliser une fouille en toute légalité, en présence de témoin(s), qu'à la triple condition que :

- le salarié soit informé de son droit de s'opposer à la demande d'ouverture et de fouille de ses effets personnels,

- le salarié soit informé de son droit d'exiger la présence d'un témoin,

- le salarié soit présent lors de la fouille.

De ce fait, même si les faits qualifiables pénalement de vol ou d'abus de confiance sont établis par le contrôle, et même si le salarié a admis les faits qui lui étaient reprochés, l'employeur se trouve ici sanctionné pour n'avoir pas informé correctement le salarié de son droit de s'opposer à l'opération de contrôle, rendant donc la preuve du motif du licenciement illégale (l'aveu de vol lors de l'entretien préalable au licenciement se trouve lui aussi entaché d'illégalité, car l'entretien préalable lui même était fondé sur le constat illicite).

Jean-Philippe SCHMITT

Avocat à Dijon (21)

Spécialiste en droit du travail

03.80.48.65.00

Soc. 11 février 2009 pourvoi n° 07-42068