Depuis 2002, la Cour de cassation affine sa jurisprudence en matière de clause de non concurrence insérée à un contrat de travail. Elle a notamment fait de la contrepartie financière une condition de validité de la clause, à condition que cette contrepartie ne soit pas dérisoire. Elle vient d'apporter deux précisions importantes concernant d'une part, la date de versement de cette indemnité de non concurrence, et d'autre part son mode de calcul (Soc. 7 mars 2007).

Liminairement, il faut rappeler que le montant de la contrepartie financière doit être fonction de l'importance de l'atteinte portée à la liberté de travailler du salarié, et donc fonction tant de la durée de l'interdiction, que des activités visées et de son champ géographique. Une fois déterminée, cette indemnité doit consister soit en un montant forfaitaire, soit en un pourcentage du salaire, à condition pour ce dernier cas de préciser le salaire de référence (par exemple, moyenne des 12 derniers mois). A cet égard, le premier intérêt de l'arrêt du 7 mars 2007 rendu par la Cour de cassation est de rappeler que la contrepartie financière ne saurait être fonction de la seule durée d'exécution du contrat de travail. A défaut de quoi, et en dépit d'une durée de contrat faible, l'entreprise obtiendrait une indemnité de non concurrence tout aussi faible malgré une durée de non concurrence importante.

S'agissant du paiement, il est dorénavant acquis que l'indemnité de non concurrence doit être versée quel que soit le mode de rupture du contrat, qu'il s'agisse d'une démission du salarié, d'un licenciement pour faute grave ou inaptitude physique..., sauf bien sûr pour l'employeur à renoncer au bénéfice de la clause de non concurrence lors de la rupture. Aussi, dès cessation du contrat, l'entreprise doit régler l'indemnité sans que le salarié n'ait besoin de prouver un quelconque préjudice, ce qui signifie que le paiement intervient même en présence d'un salarié qui a retrouvé un emploi immédiatement (et en ayant bien sûr respecté le champ d'application de la clause). Mais qu'en est-il des modalités de paiement autorisées ? En premier lieu, la contrepartie financière peut être réglée en totalité dès la fin du contrat (excepté le cas où la convention collective l'interdit), mais il n'est par contre pas possible de la verser en totalité à l'issue du délai de non concurrence (Soc. 2 mars 2005). En second lieu, ce qui constitue la pratique la plus répandue, le versement est périodique (mensuel voir trimestriel). Et enfin, il était jusque là admis que l'indemnité de non concurrence puisse être versée par anticipation, c'est à dire au cours de l'exécution du contrat sous la forme d'une majoration mensuelle de salaire identifiée comme tel dans le bulletin de paie. Par sa décision du 7 mars 2007, la Cour de cassation met un terme à cette pratique en affirmant que le paiement de la contrepartie financière de la clause de non concurrence ne peut pas intervenir avant la rupture du contrat.

En l'espèce, le contrat de travail d'un VRP comportait une clause de non concurrence d'une durée de deux années dès acquisition d'une ancienneté de 5 ans, et par laquelle il était stipulé que la contrepartie financière équivalait à 7 % du salaire et se trouvait incluse dans le fixe et le taux de commissionnement par ailleurs détaillé. Le salarié a saisi le juge du travail après son licenciement en sollicitant une indemnité pour avoir respecté une clause de non concurrence nulle. L'employeur s'y est opposé en se prévalant des dispositions claires du contrat. Il a même soutenu que, dans l'hypothèse où il serait fait droit à la demande indemnitaire du salarié, il conviendrait de condamner ce dernier à restituer la majoration perçue en cours d'exécution du contrat puisqu'elle l'aurait alors été « sans cause », ajoutant que l'absence de remboursement conduirait à régler la clause de non concurrence à deux reprises.

La Cour de cassation a non seulement jugé que la contrepartie financière devait être réglée après la rupture du contrat, mais n'a pas censuré les juges d'appel qui avaient également débouté l'employeur de sa demande de remboursement des majorations payées en cours de contrat.

Soc. 7 mars 2007 pourvoi n° 05-45511