Le préjudice subi par un agent du fait de son éviction illégale peut ne pas être indemnisable si la faute qui lui est reprochée est d’une gravité suffisante pour justifier son éviction définitive du service, et ce même dans l’hypothèse où l’annulation de la mesure de révocation aurait été prononcée pour un motif de légalité interne. (CE, 5 octobre 2016, n°380783)
Au cas d’espèce, l’agent concerné était ouvrier d’Etat affecté à la direction des constructions navales de Toulon.
Celui-ci a été été révoqué, par décision du 30 mars 1999 du ministre de la défense, à compter du 9 avril 1999, avec suspension de ses droits à pension.
Il a été reconnu coupable par la Cour d’Appel d’Aix-en-Provence, statuant le 15 mai 2002 en matière correctionnelle, d’avoir sollicité ou accepté, de la part d’entreprises en relation avec le service, des cadeaux et avantages pour lui-même et sa famille et a été condamné à une amende de 45 734 euros, à un emprisonnement de 24 mois dont 6 mois fermes, et à la privation de ses droits civiques pour une durée de cinq ans.
Par un arrêt du 19 juin 2007, la cour administrative d’appel de Marseille a annulé la décision du 30 mars 1999 du ministre de la défense, en jugeant qu’en assortissant la mesure de révocation de la suspension de ses droits à pension sans tenir compte de facteurs d’atténuation de sa responsabilité individuelle, le ministre avait commis une erreur manifeste d’appréciation.
A la suite de cet arrêt, le ministre de la défense, par une décision du 15 janvier 2008, a prononcé la réintégration de M. B… dans les cadres à compter du 9 avril 1999 et sa radiation de ceux-ci à compter du 15 mai 2002, date de sa condamnation pénale avec privation des droits civiques.
Le 15 juillet 2005, M. B…a été admis au bénéfice de la liquidation de sa pension de retraite.
M. B…s’est pourvu en cassation contre l’arrêt du 23 juillet 2013 de la Cour Administrative d’Appel de Marseille, en tant que celui-ci a rejeté ses appels contre les jugements du 17 décembre 2010 et du 12 avril 2013 du Tribunal Administratif de Toulon qui ont rejeté ses demandes tendant à la condamnation de l’Etat à l’indemniser des préjudices résultant de sa révocation à compter du 9 avril 1999 puis de sa radiation des cadres à compter du 15 mai 2002, ainsi qu’au versement d’une allocation de retour à l’emploi entre le 15 mai 2002 et le 15 juillet 2005.
Après avoir rappelé les principes généraux régissant la responsabilité de la puissance publique, selon lesquels « un agent public irrégulièrement évincé a droit à la réparation intégrale du préjudice qu’il a effectivement subi du fait de la mesure illégalement prise à son encontre. Sont ainsi indemnisables les préjudices de toute nature avec lesquels l’illégalité commise présente, compte tenu de l’importance respective de cette illégalité et des fautes relevées à l’encontre de l’intéressé, un lien direct de causalité, » le Conseil d’Etat valide le refus d’indemnisation opposé à M. B. par la Cour Administrative d’Appel de Marseille, au motif que « si sa révocation avec perte des droits à pension était entachée d’illégalité, il avait commis des fautes dont la gravité était suffisante pour justifier son éviction définitive du service et n’était donc pas fondé à demander l’indemnisation de la perte de revenu liée à son éviction. »
Mauvais temps pour les agents évincés ayant commis des faits justifiant leur éviction définitive du service, quand bien même la décision d’éviction serait jugée illégale…
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