La résidence habituelle d’un enfant est, en vertu des dispositions du Règlement Bruxelles-II-bis, le point de rattachement pour déterminer la juridiction internationalement compétente dans des litiges relevant de la responsabilité parentale. Les règles de compétence établies par ce texte sont conçues en fonction de l’intérêt supérieur de l’enfant et en particulier du critère de proximité. Ce sont donc en premier lieu les juridictions de l’Etat membre dans lequel l’enfant a sa résidence habituelle qui devraient être compétentes.
Or le Règlement ne définit pas la notion de la résidence habituelle.
Lorsque l’enfant réside au moment de la saisine de la juridiction dans l’Etat-membre dans lequel il est né, la détermination de sa résidence habituelle ne pose guère problème. Sa résidence habituelle se trouve dans l’Etat où il a vécu de manière continue depuis sa naissance. Il en est différemment, si la résidence dans cet Etat était discontinue. En effet, la question de la résidence habituelle de l’enfant peut se poser à l’occasion d’un déménagement permanent à l’étranger, d’un déménagement consistant en un test d’une durée illimitée ou potentiellement illimitée ou simplement d’un séjour à l’étranger de durée déterminée.
Lorsque dans un texte communautaire une définition fait défaut, seule La Cour de Justice de l’Union Européenne peut l’interpréter pour en donner une. A cette fin, il appartient aux juges nationaux de poser des questions préjudicielles aux juges luxembourgeois. La CJUE statue dans une procédure rapide spécialement conçue à cet effet. La définition donnée est une notion autonome du droit communautaire devant être appliquée dans tous les Etats-membres de l’Union.
Ainsi à ce jour, la CJUE a été saisie de trois affaires dans lesquelles il fallait déterminer la résidence habituelle d’enfant. Dans un arrêt rendu le 2 avril 2009 (1) la CJUE a dit pour la première fois ce qu’il fallait entendre par résidence habituelle au sens du droit communautaire : la notion de résidence habituelle au titre de l’article 8, paragraphe 1er du Règlement 2201/2003 doit être interprétée en ce sens que cette résidence correspond au lieu qui traduit une certaine intégration de l’enfant dans un environnement social et familial. A cette fin, doivent notamment être pris en considération la durée, la régularité, les conditions et les raisons du séjour sur le territoire d’un Etat membre et du déménagement de la famille dans cet Etat, la nationalité de l’enfant, le lieu et les conditions de scolarisation, les connaissances linguistiques ainsi que les rapports familiaux et sociaux entretenus par l’enfant dans ledit Etat.
Lesdits critères ont été affinés par un arrêt rendu le 22 décembre 2010 (2) dans une affaire dans laquelle était impliqué un nourrisson âgé de deux mois : …au lieu qui traduit une certaine intégration de l’enfant dans un environnement social et familial. A cette fin, et lorsque est en cause la situation d’un nourrisson qui séjourne avec sa mère depuis quelques jours seulement dans un Etat membre autre que celui de sa résidence habituelle, vers lequel il a été déplacé, doivent être pris en considération, d’une part, la durée, la régularité, les conditions et les raisons du séjour sur le territoire de cet Etat membre et du déménagement de la mère dans ledit Etat, et, d’autre part, en raison notamment de l’âge de l’enfant, les origines géographiques et familiales de la mère ainsi que les rapports familiaux et sociaux entretenus par celle-ci et l’enfant dans le même Etat membre.
Interrogée pour la troisième fois dans une situation où un enfant, né en Belgique, passait régulièrement des séjours de vacances en Pologne d’où était originaire sa mère, âgé de 18 mois au moment de la saisine de la juridiction polonaise par sa mère entretemps séparée de son père, qui le voyait régulièrement, la CJUE dans un arrêt rendu le 28 juin 2018 (3) a dit que : la résidence habituelle de l’enfant, au sens du Règlement, correspond au lieu où se situe, dans les faits, le centre de sa vie. Il appartient à la juridiction nationale de déterminer ce centre au moment de l’introduction de la demande sur la base d’un faisceau d’éléments de fait concordants.
La résidence habituelle de l’enfant doit correspondre au lieu qui traduit une certaine intégration de l’enfant dans un environnement social et familial compte tenu de l’ensemble des circonstances de fait particulières de chaque cas d’espèce. L’environnement d’un enfant en bas âge est essentiellement un environnement familial, la détermination de la résidence habituelle de l’enfant reposant dans cette situation essentiellement sur des circonstances objectives, l’intention des parents n’est, en principe, pas en soi décisive à cet égard, c’est la philosophie qu’il convient de retenir de ce dernier arrêt.
(1)CJUE, 2 avr. 2009, C-5223/07
(2) CJUE, 22 déc. 2010 C-497/10
(3)CJUE, 28 juin 2018 C-512/17
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