La Cour de cassation affine sa jurisprudence en matière de modification du lieu de travail dans un même secteur géographique, et des justifications pouvant être invoquées par le salarié pour échapper au caractère fautif d’un éventuel refus.

En effet, en l’absence de clause de mobilité dans le contrat, l’employeur peut imposer au salarié une modification de son lieu de travail. Pour que l’employeur s’exonère de recueillir l’accord du salarié, la nouvelle affectation doit toutefois être située dans le même « secteur géographique ».

Si cette condition « d’identité de secteur » est remplie, le refus du salarié de modifier son lieu de travail est alors considéré comme fautif et peut justifier un licenciement disciplinaire.

Les justifications pouvant être invoquées par le salarié pour échapper au caractère fautif de son refus demeurent très exceptionnelles.

La Cour de cassation avait déjà considéré que le refus du salarié pouvait être justifié lorsque la nouvelle affectation portait atteinte à sa vie personnelle et familiale (Cass. Soc. 7 juillet 2016, n°15-15342).

Nouvelle illustration désormais, lorsque l’affectation porte atteinte aux droits du salarié à la santé et au repos (Cass. Soc. 16 novembre 2016, n°15-23375).

Dans le cas présent, l’employeur avait imposé à la salariée un changement de son lieu de travail d’Evron à Laval, deux établissements distants de 34 km. La salariée a refusé ce changement d’affectation en invoquant d’une part une désorganisation de sa vie familiale, et, d’autre part, une atteinte à sa santé en raison de l’augmentation de son temps de trajet pour se rendre à son travail.

La salariée, pour démontrer l’atteinte à sa santé et à son droit au repos, produisait un certificat médical d’un médecin hospitalier et un avis du médecin du travail qui confirmaient les motifs médicaux s’opposant à une telle mutation.

La salariée était malgré tout, licenciée pour faute grave.

La Cour d’appel d’Angers a considéré que les éléments justificatifs apportés par la salariée permettaient uniquement d’écarter la qualification de faute « grave ». Mais le licenciement était tout de même justifié, puisque le refus du salarié restait fautif, malgré les explications données.

La Cour de cassation, en cassant l’arrêt d’appel, considère quant à elle qu’une atteinte aux droits à la santé et au repos pourrait légitimer le refus par un salarié du changement de son lieu de travail.

Selon la Cour de cassation, les justifications médicales et familiales enlèveraient ainsi tout caractère fautif au refus du salarié. Pour autant, ces justifications ne sont pas suffisantes pour priver de cause réelle et sérieuse le licenciement, dès lors que le changement d’affectation est justifié par la tâche à accomplir et proportionné au but recherché.

En d’autres termes, la Cour de cassation demande donc aux juges du fond d’opérer un contrôle de « proportionnalité » entre les intérêts du salarié et la justification de la mesure par l’employeur.

Il appartiendra donc au salarié de rapporter la preuve de son atteinte par la production d’éléments de preuve tels que des certificats ou des avis médicaux, par exemple.

Les juges étudieront ensuite au cas par cas, les motifs de refus et les éléments de preuve apportés respectivement, pour se prononcer sur la légitimité du refus.