La transaction douanière constitue un mode classique de règlement amiable du litige douanier.

Elle est fondée sur l’article 350 du Code des douanes qui dispose que « l’administration des douanes est autorisée à transiger avec les personnes poursuivies pour infraction douanière ou pour infraction à la législation et à la réglementation relatives aux relations financières avec l’étranger » ainsi que sur le décret n°78-1297 du 28 décembre 1978.

Le règlement transactionnel répond aux dispositions de droit commun en matière de transaction, prévues aux articles 2044 et suivants du Code civil.

L’article 2051 du Code civil pose notamment le principe de l’effet relatif de transaction à l’égard des tiers.

En acceptant la proposition transactionnelle, l’auteur de l’infraction s’engage à verser une somme, ce qui pose la question de la reconnaissance de sa culpabilité (1.)

De son côté, l’administration des Douanes s’engage à abandonner les poursuites, ce qui doit conduire à s’interroger sur l’effet exact de la transaction douanière quant aux actions publiques et fiscales (2.).

1. L’effet à l’égard de l’auteur de l’infraction douanière

La transaction contient un engagement de l’auteur de l’infraction douanière à payer une amende dite « transactionnelle » et éventuellement à abandonner les marchandises saisies.

Si le débiteur ne s’exécute pas spontanément, l’administration des Douanes disposera des voies de recours classiques pour le recouvrement de la somme prévue à la transaction. L’article 382, 4 du Code des douanes permet au créancier de poursuivre ce recouvrement contre la succession lorsque l’auteur de l’infraction décède avant règlement.

Au-delà des conséquences ordinaires des stipulations d’une transaction, la nature particulière de la transaction douanière conduit à s’interroger sur ce qu’implique l’acceptation du débiteur quant à sa culpabilité.

En effet, il ne fait guère de doute que « la conclusion de la transaction vaut reconnaissance de la commission de l’infraction » (Poursuites et sanctions en droit pénal douanier, R.Cren, page 271). L’article 350 du Code des douanes s’applique en cas de commission d’infractions punies de peines d’amende voire d’emprisonnement.

Dans une décision relative à la transaction pénale en date du 23 septembre 2016, n°16-569 QPC, le Conseil constitutionnel estime que « pour que les droits de la défense soient assurés dans le cadre d’une procédure de transaction ayant pour objet l’extinction de l’action publique, la procédure de transaction doit reposer sur l’accord libre et non équivoque, avec l’assistance éventuelle de son avocat, de la personne à laquelle la transaction est proposée ». Elle conclut que « les dispositions contestées ne sauraient, sans méconnaître les droits de la défense, autoriser qu’une transaction soit conclue sans que la personne suspectée d’avoir commis une infraction ait été informée de son droit à être assistée de son avocat avant d’accepter la proposition qui lui est faite ».

Or, ni l’article 350 du Code des douanes, ni les dispositions réglementaires ne prévoient l’information du droit à l’avocat. En pratique, malgré les conséquences pécuniaires parfois importantes de l’accord à la transaction (amende, abandon de marchandises équivalent à une confiscation), ainsi que ses implications en terme de culpabilité, l’administration des douanes n’informe pas le contrevenant de son droit à l’assistance d’un avocat.

2. L’effet sur les actions publiques et fiscales

Aux termes de l’article 2052 du Code civil, dans sa rédaction issue de la loi du 18 novembre 2016, « la transaction fait obstacle à l’introduction ou à la poursuite entre les parties d’une action en justice ayant le même objet ». La nouvelle rédaction ne reprend pas le principe selon lequel la transaction a autorité de la chose jugée en dernier ressort.

L’article 343,1 du Code des douanes dispose que « l’action pour l’application des peines exercée par le ministère public » tandis que le deuxième paragraphe de la même disposition ajoute que « l’action pour l’application des sanctions fiscales exercée par l’administration des douanes ». Ainsi, seule l’action fiscale appartient aux Douanes.

Cependant, bien que l’administration des Douanes ne dispose pas de l’action publique, l’effet extinctif de la transaction douanière concerne aussi bien les sanctions pénales que les sanctions fiscales dès lors que l’autorité judiciaire en a admis le principe (Cass.crim, 12 février 1990, n°88-85567, Cass.crim, 8 octobre 2008, n°02-81609). Les dispositions de l’article 6, alinéa 3, du Code de procédure pénale, selon lesquelles l’action publique peut « s’éteindre par transaction lorsque la loi en dispose expressément », ont donc vocation à s’appliquer.

Le principe de l’extinction de l’action publique voit cependant son étendue limitée à la fois in rem et in personam.

In rem, est éteinte « l’action en répression des infractions au Code des douanes » (Cass.crim, 13 juin 1988, n°87-83452). Pareillement, le principe non bis in idem interdit de poursuivre les faits objet de la transaction sous une qualification de droit commun (Cass.crim, 7 mars 1984, n°83-91574).

Néanmoins, la transaction sur l’infraction douanière ne fait pas échec à l’engagement de l’action publique si l’infraction pénale comporte des éléments constitutifs différents et sanctionne la violation d’intérêts distincts (Cass.crim, 12 juin 2014, n°13-83390 ; Cass.crim, 10 décembre 1998, n°98-80553).

Naturellement, il en va de même si les faits pour lesquels il a été transigé sont différents de ceux pénalement poursuivis (Cass.crim, 3 juin 1991, n°90-83141).

In personam, la Chambre criminelle énonce clairement que la transaction « ne saurait limiter ni le principe ni l’étendue de l’exercice l’action publique à l’égard des co-auteurs et complices qui restent tenus de l’entière réparation du préjudice » (Cass.crim, 8 décembre 1971, n°70-91872). Ainsi, la peine de confiscation en valeur du véhicule de fraude pouvait être prononcée alors que ledit véhicule avait été restitué au propriétaire transigeant (idem).

En revanche, lorsque la transaction douanière est conclue avec une personne morale, l’effet extinctif s’étend à son représentant légal, à la double condition qu’il soit poursuivi en cette seule qualité pour le même fait (Cass.crim, 20 janvier 1992, n°89-94768). De même, la transaction accordée à la personne morale civilement responsable met fin aux poursuites contre son préposé (Cass.crim, 13 décembre 1993, n°92-85483).