Face à la pandémie du virus Covid-19, l’Assemblée nationale et le sénat ont adopté en urgence afin d’en limiter les conséquences dramatiques.  L’Etat d’Urgence sanitaire, déclaré en conseil des Ministres pour une durée de deux mois, s’est concrétisé par des mesures restrictives de liberté d’aller et venir dans les territoires concernés. 

I - Les contours de la restriction de la liberté d’aller et venir 

Ainsi, et depuis le 17 mars 2020 à midi,  les individus qui viendraient à se déplacer doivent se munir impérativement d’une attestation de déplacement, en application du décret du 16 mars 2020 portant règlementation des déplacements dans le cadre de la lutte contre la propagation du virus Covid 19. 

Ainsi, les usagers de la voie public, qu’ils soient piétons ou automobilistes, sont autorisés à quitter leur domicile dans les cas suivants :

·        Déplacements entre le domicile et le lieu d’exercice de l’activité professionnelle, lorsqu’ils sont indispensables à l’exercice d’activités ne pouvant être organisées sous forme de télétravail ou déplacements professionnels ne pouvant être différés.

·       Déplacements pour effectuer des achats de fournitures nécessaires à l’activité professionnelle et des achats de première nécessité dans des établissements dont les activités demeurent autorisées (liste sur gouvernement.fr).

·       Consultations et soins ne pouvant être assurés à distance et ne pouvant être différés ; consultations et soins des patients atteints d'une affection de longue durée.

·       Déplacements pour motif familial impérieux, pour l’assistance aux personnes vulnérables ou la garde d’enfants.

·       Déplacements brefs, dans la limite d'une heure quotidienne et dans un rayon maximal d'un kilomètre autour du domicile, liés soit à l'activité physique individuelle des personnes, à l'exclusion de toute pratique sportive collective et de toute proximité avec d'autres personnes, soit à la promenade avec les seules personnes regroupées dans un même domicile, soit aux besoins des animaux de compagnie. 

·       Convocation judiciaire ou administrative.

·       Participation à des missions d’intérêt général sur demande de l’autorité administrative.

En cas de contrôle des forces de l’ordre, l’automobiliste devra présenter son attestation dument complétée, avec date et heure de sortie, mais également le justificatif permettant de prouver le motif de sortie, sa carte d’identité mais également son permis de conduire et ses papiers. 

Attention,  le champ du personnel verbalisateur a également été élargi aux :

  • Agents de police municipale (L. 511-1 Code de la sécurité intérieure) ; 
  • Gardes champêtres (L. 521-1 Code de la sécurité intérieure) ; 
  • Agents de la ville de PARIS (L. 531-1 Code de la sécurité intérieure) ; 
  • Contrôleurs de la préfecture de police et agents de surveillance parisienne (L. 532-1 du Code de la sécurité intérieure). 

En cas de refus de soumission au contrôle, l’automobiliste peut se rend coupable de délits de droit commun classiques du droit pénal routier : 

  • Le refus d’obtempérer par exemple, tel que défini à l’article L. 233-1 du Code de la Route comme étant :  "Le fait pour tout conducteur d'omettre d'obtempérer à une sommation de s'arrêter émanant d'un fonctionnaire ou agent chargé de constater les infractions et muni des insignes extérieurs et apparents de sa qualité est puni d'un an d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende."  EN SAVOIR +
  • La rébellion, telle que définie par l’article L. 433-6 du Code pénal : « Constitue une rébellion le fait d'opposer une résistance violente à une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public agissant, dans l'exercice de ses fonctions, pour l'exécution des lois, des ordres de l'autorité publique, des décisions ou mandats de justice »
  • Le refus de se soumettre à des vérifications concernant son véhicule ou sa personne, tel que défini par l’article LL. 233-2 du Code de la Route : « Le fait pour tout conducteur de refuser de se soumettre à toutes vérifications prescrites concernant son véhicule ou sa personne est puni de trois mois d'emprisonnement et de 3 750 euros d'amende. » EN SAVOIR +

Dernièrement, une jeune femme a été condamnée par le Tribunal correctionnel d’EVRY en comparution immédiate à la peine de sept mois d’emprisonnement fermes et 350 euros d’amende pour avoir craché au visage des policiers lors d’un contrôle de son attestation de déplacement, et avoir violenté les forces de l’ordre. 

Même si vous deviez vous trouvez en violation des nouvelles règles de confinement, nous ne saurions donc que trop vous conseiller de vous soumettre au contrôle des forces de l’ordre. 

II - Que se passe t-il en cas de non respect de ces obligations ? 

L’article L. 3136-1 du Code de la santé publique prévoit cinq alinéas afin de décrire les modalités de sanctions en cas de sortie sans motif légitime ou sans attestation. 

Ainsi, la loi prévoit qu’en cas de violation des règles de confinement, l’automobiliste se verra redevable d’une contravention de quatrième classe : soit 135 euros, ou, en cas de non paiement dans les 45 jours, à 375 euros d’amendes. Cette contravention peut faire l'objet de la procédure de l'amende forfaitaire prévue à l'article 529 du code de procédure pénale. Néanmoins, le texte n’apporte pas assez de précision quant à une éventuelle perte de points sur le permis de conduire. 

La loi ne semble pas prévoir la mise en place des contraventions pour le non respect du confinement « à la volée », mais la prudence sera de mise, surtout dans les hypothèses où un couvre feu devait être voté. 

La loi prévoit une gradation des sanctions encourues en cas de non respects successifs des mesures de confinement. 

En effet, le même article précise que dans les cas où une deuxième violation venait à être constatée dans un délai de quinze jours suivant la première infraction, une amende de cinquième classe viendrait à être prononcée. 

Dans ce cas, l’automobiliste contrevenant s’expose à une peine d’amende d’un montant de 1500 euros, voir 3 000 euros en cas de majoration.  Dans ces cas, une convocation devant le Tribunal de Police devrait vous être délivrée. 

Enfin, si l’automobiliste commet, dans un délai de trente jours, une violation des règles de confinement à trois reprises, il s’expose cette fois ci à la peine de six mois d’emprisonnement et de 3 750 euros d’amende. 

A titre complémentaire, une peine de travail d’ intérêt général peut être prononcée. 

Le juge judiciaire peut également assortir sa condamnation d’une peine de suspension du permis de conduire d’une durée maximale de trois ans. 

Le texte ne précise pas non si le préfet est habilité, comme en matière de grand excès de vitesse ou de conduite sous l’emprise de stupéfiants. Pour mémoire, dans ces situations, l’autorité administrative est autorisée à prononcer, dans un délai de 72 ou 120 (selon l’infraction), une suspension administrative du permis de conduire pour une durée maximale d’un an, en amont de tout procès. 

En outre, quid du cumul des infractions si les premières amendes venaient à être contestées par l’automobiliste ? En théorie, les contraventions de 4ème classe « ordinaires » peuvent être contestées dans un délai de 45 jours… 

Par ailleurs, certains procureurs ont affiché leur volonté de faire respecter le confinement et auraient donné le feu vert aux poursuites des individus contrevenants du chef de « mise en danger délibérée de la vie d’autrui », venant aggraver d’avantage la répression.

Si la loi d’urgence sanitaire ne vise pas ce type de délit, il semblerait que la lecture du texte puisse, en effet, s’appliquer aux circonstances de fait, à considérer que le « coronavirus » puisse être considéré comme « un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entrainer une mutilation ou une infirmité permanente ». 

 L’article L. 223-1 du Code pénal est libellé comme suit : « Le fait d'exposer directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente par la violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. » 

De nombreuses questions restent donc en suspend quant à l’application effective des sanctions sur le plan judiciaire. 

Michel Benezra, avocat associé
BENEZRA AVOCATS

Droit Routier & Dommages Corporels

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EN SAVOIR + :

LE REFUS D'OBTEMPÉRER
LE REFUS DE SE SOUMETTRE AUX VÉRIFICATIONS