Les accidents de la circulation sont bien souvent à l’origine de séquelles importantes. Pourtant, et alors que la victime lutte pour survivre, une deuxième bataille l’attend : l’indemnisation de ses préjudices par les compagnies d’assurance.
1° L’importance du médecin conseil et de l’avocat dommages corporels dans les négociations
° L’offre d’indemnisation de la compagnie d’assurance à la victime
Les accidents de la circulation peuvent parfois causer des séquelles irrémédiables et des infirmités permanentes : c’est toute une vie à indemniser.
En effet, le préjudice entier est indemnisable, tant qu’il est la conséquence de l’accident. Aussi, il y aura une évaluation des dommages corporels et l'indemnisation des préjudices visés au moment de l’expertise médico-légale, mais également des préjudices futurs qui résulteront de l’évolution des séquelles et des dépenses afférentes.
Dans les huit mois qui suivront l’accident de la circulation et après déclaration, les compagnies d’assurance seront tenues de présenter à la victime une offre d’indemnisation, si cette dernière est bien consolidée.
Si la victime a préalablement fait une demande d’indemnisation, alors la compagnie devra lui proposer l’offre provisionnelle, dans les trois mois qui suivent la demande. Cette demande d’indemnisation se fait en remplissant un questionnaire corporel fournit par la compagnie d’assurance elle-même et doit être renvoyée dans les six semaines.
Il ne faut pas s’y tromper, les compagnies d’assurance vont systématiquement calculer l’indemnisation à la baisse, voire tenter d'échapper tout simplement à leur devoir d’indemnisation des préjudices de la victime.
Il faut donc être particulièrement vigilant à réception de l’offre définitive.
Si le montant proposé par les compagnies peut paraitre de prime abord élevé, c’est souvent bien en deçà de la valeur réelle des postes de préjudices subis par la victime.
Pour cette raison, l’assistance d’un avocat expert en réparation des dommages corporels, est essentielle pour garantir à la victime de la route, une indemnisation juste et intégrale.
Si la victime a accepté l’offre définitive, elle dispose d’un délai de quinze jours pour changer d’avis par l’envoi d’un courrier avec accusé de réception.
En cas de non dénonciation de l’accord, elle recevra un règlement dans les quarante cinq jours suivant l’acceptation.
Au-delà de ce délai, le taux légal sera majoré de moitié pour les deux premiers mois, puis doublé pour les mois qui suivront.
Si la victime estime l’offre insuffisante, elle peut demander une nouvelle offre à l’amiable ou engager des poursuites devant le tribunal judiciaire.
° Prudence dans la réalisation des expertises médicales
Afin de présenter l’offre d’indemnisation définitive, plusieurs expertises peuvent être menées par la compagnie d’assurance, notamment lorsque les blessures de la victime n’étaient pas consolidées au moment de la première expertise.
L’expertise la plus importante sera celle menée quelques semaines après la consolidation de l’état de santé de la victime : c'est-à-dire, le moment à partir duquel l’état de santé de la victime cessera d’évoluer. On parle de l'expertise de consolidation.
Pour faire face à ces examens médicaux majeurs, la victime accidentée aura besoin d’être assistée d’un avocat spécialisé en droit de la réparation des dommages corporels, lequel saura la conseiller au mieux.
Le premier réflexe pour l’avocat (et de la compagnie d’assurance) sera de se rapprocher des autorités policières en charge de l’enquête en récupérant la procédure TRANSPV afin d’évaluer les responsabilités de chacun dans la survenance des faits et donc de l'accident de la circulation.
Si la victime est responsable pour moitié de l’accident (responsabilité partagée), alors la compagnie d’assurance ne prendra en charge que la moitié de l’indemnisation, à moins de n’avoir souscrit une garantie du conducteur en amont.
De même, l’avocat dommages corporels s’assurera que la victime n’ait pas commis lors de l’accident de cause exonératrice d’indemnisation : par exemple, la présence de stupéfiants et de dosages d’alcool à des taux délictuels entrainent la déchéance du contrat d’assurance.
Autre exemple, la loi prévoit une seule cause exonératoire s’agissant des victimes piétonnes : le suicide. Les compagnies d’assurance vont donc en priorité, vérifier l’hypothèse en consultant les témoignages dans TRANSPV.
Le second réflexe de l’avocat dommages corporels, sera de mettre en relation la victime accidentée avec un médecin conseil de victimes, indépendant et impartial, afin de lui garantir une égalité des armes lors de l’examen de ses préjudices au cours de l'expertise médicale.
Sur ce point, afin de garantir la qualité des services, le médecin conseil devra être nécessairement issu de l’Association Nationale des Médecins conseil de Victimes d’Accident avec dommage corporel (ANAMEVA) ou autre association de médecins de victimes de la route (ANMCR). Les médecins membres de ces associations ont en effet les connaissances médico-légales indispensables et l’expérience nécessaire dans le domaine spécifique aux accidents corporels de la circulation et, réservent leurs services exclusivement aux victimes de la route.
Ainsi, avant l’expertise médicale, le médecin conseil désigné par la victime de la route pour l’accompagner prendra soin de s’enquérir du dossier médical complet.
Il évaluera aussi l’état antérieur de la victime afin de rapporter la preuve d’un lien de causalité entre le fait générateur (accident) et les préjudices subis par la victime. Ce lien de causalité est systématiquement remis en doute par les compagnies d’assurance afin de limiter les montants dus. Sur ce point, l’analyse du certificat médical initial, réalisé par les médecins ayant pris en charge la victime juste après l’accident, aura un intérêt majeur : s’il est insuffisamment complété, la victime devra rapporter la preuve qu’elle était en bonne santé avant les faits.
Par exemple : d’anciens certificats médicaux de pratiques sportives.
Pendant l’expertise médicale, le médecin conseil et l'avocat dommages corporels, joueront un rôle de contre poids : ils s’assureront que la victime de la route est bel et bien interrogée sur l’ensemble des postes de préjudices réparables.
Bien souvent, la victime, seule, ignore l’existence même de certains postes de préjudices qui sont pourtant chiffrés dans le montant total final.
Par exemple, le préjudice d’agrément permet de compenser l’arrêt de la pratique d’un loisir, d’un sport, résultant des conséquences de l’accident.
Après l’expertise, il examinera le rapport dressé par l’expert de la compagnie d’assurance et pourra formuler les observations.
Finalement, le rapport sera transmis à un régleur de la compagnie qui se chargera d’évaluer le chiffrage monétaire de la réparation.
Si finalement aucun compromis n’est trouvé entre la compagnie et la victime, l’avocat dommages corporels pourra faire le choix d’assigner la compagnie d'assurance devant le tribunal judiciaire afin qu’un juge impartial puisse trancher la question.
Dans ce cas, les expertises seront diligentées par un médecin expert auprès des tribunaux : il sera donc impartial et indépendant vis-à-vis des compagnies d’assurance mais également de la victime.
2° Le chiffrage poste par poste des préjudices de la victime de la route
Les compagnies d’assurance et les avocats spécialisés en dommage corporel fondent essentiellement leurs calculs relatifs à l’indemnisation des préjudices sur la Nomenclature Dintilhac. Cet outil, imposé aux professionnels depuis la loi du 21 décembre 2006, a le mérite de présenter une série de préjudices indemnisables et de définir un chiffrage pour chacun d’entre eux. La liste des préjudices fournie par la nomenclature servira à l’avocat : la vigilance est de mise, puisque le juge ne sera tenu de se prononcer que sur les préjudices invoqués par l’avocat dans ses conclusions.
La nomenclature Dintilhac distingue les préjudices patrimoniaux des préjudices extra patrimoniaux afin de prendre en compte la réalité des souffrances endurées par la victime de la route, avant et après sa consolidation.
Les préjudices patrimoniaux temporaires (PPT) regroupent les dépenses de santé déjà effectuées par la victime avant sa consolidation, mais également les pertes de gains résultant directement de son état de santé ou les frais divers engagés à la suite du dommage.
Les préjudice patrimoniaux permanents, qui seront évalués après l’examen de consolidation, va permettre de déterminer le montant des dépenses de santé futures, la perte de gains futurs à combler, les frais de logements et de véhicules adaptés ou les recours à une tierce personne si besoin est. De même, la pénibilité de l’emploi ou l’obligation de se réorienter professionnellement peut aussi être compensé financièrement. Il en va de même en cas d’échec scolaire résultant de l’accident.
Pour permettre à la victime de pouvoir subvenir à des dépenses avant le prononcé du jugement (qui peut prendre un certain temps), l’avocat de victimes de dommages corporels, peut obtenir de l’assurance une provision d’un montant qu’il déterminera et justifiera. Ce montant sera à déduire du montant de l’indemnisation finale ou indemnisation définitive.
A coté des préjudices de nature économique, la nomenclature Dintilhac fixe aussi une série de postes de préjudices réparables.
Avant la consolidation, peuvent faire l’objet d’une indemnisation le déficit fonctionnel temporaire, c'est-à-dire le taux d’invalidité subi par la victime avant sa consolidation. Les souffrances endurées sont également un poste de préjudice classique. De même, l’altération esthétique éventuelle peut aussi être indemnisée.
Après la consolidation, d’autres postes de préjudices, moins connus du justiciable, doivent être évalués : c’est le cas notamment du préjudice d’agrément (l’impossibilité de pratiquer un loisir), le préjudice sexuel, le préjudice d’établissement (perte d’espoir en un projet de vie familiale normale… d’autres postes apparaitront plus classiques : préjudice esthétique permanent, déficit fonctionnel permanent et les préjudice extra patrimoniaux évolutifs (évolution des préjudices).
L’avocat de victimes de dommages corproels pourra, avec l’accord de son client, demander que soit diligenter des expertises complémentaires afin qu’il soit statuer sur l’évaluation de ces différents postes.
Une fois encore, il pourra solliciter le versement d’une provision de la part de la compagnie d’assurance pour financer la tenue de ces expertises.
Chloé Soulier, juriste | BENEZRA AVOCATS
Droit Routier & Dommages Corporels https://www.benezra-victimesdelaroute.fr 0145240040 / info@benezra.fr
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