Le Projet de loi instituant un système universel de retraite est considéré comme adopté par l’assemblée nationale en première lecture au bénéfice de l’utilisation par le gouvernement de l’article 49, alinéa 3, de la constitution.

 

En ce qui concerne les avocats cela signifie (projet de loi, article 2) :

 

  • Qu’à partir du 1/1/2022 les avocats nés à partir du 1/1/2004 ne cotiseront qu’au système universel de retraite
  • Qu’à partir du 1/1/2025 tous les avocats cotiseront au même taux :
    • Les avocats nés après le 1/1/1975 au profit du régime nouveau institué au sein du système universel de retraite
    • Les avocats nés avant le 1/1/1975 au profit du régime de base et du régime complémentaire de la CNBF selon une clé de répartition des cotisations qui reste à définir

 

Aux termes de ce projet de loi et d’autres textes à intervenir, selon les annonces qui ont été faites :

 

  • Le taux de cotisation des avocats augmentera sur une période de transition de 15 ans pour atteindre le taux cible (envisagé 28,12%) (projet de loi, article 16, renvoyant à une ordonnance)
  • L’assiette des cotisations sera une assiette élargie intégrant les cotisations sociales obligatoires mais affectée d’un abattement de 30% (projet de loi, article 21, renvoyant à une ordonnance)

 

Le projet de loi tel que présenté par le gouvernement et sur lequel il a engagé sa responsabilité conformément à l’article 49, alinéa 3, de la constitution intègre un nouvel article 2 bis rédigé de manière conforme à l’amendement proposé par le gouvernement le 21/2/2020.

 

Aux termes de cette nouvelle disposition le droit de plaidoirie et la contribution équivalente, actuellement affectés au financement du tiers des charges du régime de base, seraient à payer par les avocats en plus de leurs cotisations au profit respectivement du système universel ou des régimes de base et complémentaire de la CNBF (selon que les avocats sont nés avant ou après le 1/1/1975).

 

Le conseil d’administration (et non l’assemblée générale) de la CNBF fixerai annuellement le mécanisme de calcul de la contribution équivalente.

 

Jusqu’à présent et selon les annonces qui avaient été faites, on aurait pu imaginer que l’augmentation des cotisations aurait pu service à financer un « mécanisme de solidarité interne à la profession » (rapport Delevoye page 43).

 

Cependant il s’agit ici bel et bien d’une sur-cotisation, à la charge de la profession, en plus de ce que prévoit le système universel de retraite.

 

Cette sur-cotisation pourrait être affectée, selon décision du conseil d’administration de la caisse (et non de l’assemblée générale) au paiement de cotisations des avocats assises sur leurs revenus d’activité dans la limite de 3 plafonds annuels de sécurité sociale (123.408 € en 2020) – et non pas dans la limite de 80.000 € comme annoncé par Madame BELLOUBET.

 

Ce dispositif aurait pour but de compenser l’augmentation des cotisations sur les revenus d’activité inférieurs à 3 plafonds.

 

La raison du choix d’une cotisation supplémentaire est la suivante :

 

Le régime actuel de la CNBF finance la solidarité interne à la profession par des cotisations dues sur des revenus jusqu’à plus de 7 plafonds de la sécurité sociale.

 

Le régime universel prévoit une cotisation au taux plein jusqu’à 1 plafond, à un taux réduit jusqu’à 3 plafonds et à un taux tout à fait symbolique au-delà.

 

Le gouvernement a estimé que pour pallier cet effet pervers lié à la conception même du régime universel, pour permettre le financement d’un dispositif de solidarité, il fallait instituer une cotisation supplémentaire à la charge de toute la profession, sous la forme de la reprise du système du droit de plaidoirie et de la contribution équivalente.

 

Actuellement les recettes tirées du droit de plaidoirie en 2018 sont de l’ordre de 8 millions d’euros et celles tirées de la contribution équivalente de l’ordre de 79 millions d’euros (rapport CNBF 2018 page 52).

 

Le montant global des recettes encaissées de la CNBF en 2018 sur les régimes de retraites sont de 316 millions pour le régime de base (rapport CNBF 2018 page 51) et de 285 millions d’euros pour le régime complémentaire (rapport CNBF 2018 page 55) soit au total 601 millions d’euros.

 

En dehors de ces chiffres il est impossible de savoir dans quelle mesure les fonds tirés de la sur-cotisation pourraient être utilisés pour compenser la hausse globale des cotisations.

 

En effet si l’idée est de limiter l’augmentation des cotisations sur les bas-revenus, il faudrait également compenser la hausse de cotisation liée à la sur-cotisation elle-même.

 

Par conséquent on ne peut pas raisonner sur la somme de 87 millions d’euros que représentent en 2018 les recettes tirées des droits de plaidoirie et de la contribution équivalente mais uniquement sur la part qui en est acquittée sur les tranches de revenus supérieures à 3 plafonds, soit des sommes largement inférieures et probablement peu amènes à permettre le financement de la hausse de cotisations.

 

Mais il y a plus :

 

A l’origine il était affirmé que le « dispositif de solidarité interne à la profession » devait permettre de garantir aux avocats l’équivalent de leur retraite de base.

 

Le dispositif introduit dans le projet de loi ne le permet aucunement puisque le produit de la sur-cotisation ne peut être affecté qu’aux cotisations et aucunement aux pensions.

 

Tout ce que démontre la mise en place d’un tel dispositif est le fait que le gouvernement a conscience que les mesures de compensation qu’il envisage, selon les affirmations qui ont été faites, par lesquelles 6,6 points de la hausse des cotisations seraient compensées par la baisse de cotisations hors retraite, sont controuvées au besoin d’ajouter à la loi un tel dispositif censé compléter la compensation de la hausse inéluctable et massive des cotisations.

 

Enfin, on soulignera que les charges de la caisse, actuellement financées par le produit du droit de plaidoirie, resteront d’actualité et devront être assumées en tout état de cause.

 

Par conséquent l’affirmation selon laquelle les avocats seraient les « grands gagnants » de la réforme est pour le moins téméraire pour ne pas dire totalement controuvée.

 

Aucun chiffre n’est avancé de nature à démontrer l’effet utile de cette disposition et les chiffres dont on dispose laissent plutôt à penser le contraire.