Deux époux, tous deux de nationalité marocaine, résident habituellement en France. L’un des conjoints engage une procédure de divorce devant une juridiction française. Aucun choix préalable de loi applicable n’a été effectué par les époux.
Quelle est la loi applicable à la dissolution du mariage dans le cadre d’un divorce introduit en France entre deux époux marocains, au regard du droit international privé français et des textes européens et bilatéraux en vigueur ?
I. Application du Règlement Rome III : la loi française comme droit commun du divorce international
La détermination de la loi applicable à un divorce en France est régie, depuis le 21 juin 2012, par le Règlement (UE) n° 1259/2010, dit Rome III, qui s’applique même en présence de ressortissants d’États tiers dès lors que la juridiction saisie est celle d’un État participant, ce qui est le cas de la France.
En l’absence de choix exprès des époux quant à la loi applicable (article 5), l’article 8 du Règlement prévoit une hiérarchie de critères, au premier rang desquels figure la résidence habituelle commune des époux au moment de la saisine.
En l’espèce, les deux époux sont domiciliés en France au moment de l’introduction de l’instance. Par conséquent, la loi française est désignée comme loi applicable au divorce.
II. Incidence limitée de la Convention franco-marocaine du 10 août 1981
La France et le Maroc sont liés par une convention bilatérale relative au statut des personnes et de la famille. L’article 2 de cette convention prévoit l’application de la loi nationale commune des époux pour régir les effets personnels du mariage.
Cependant, la jurisprudence française estime que le Règlement Rome III, en tant que norme européenne directement applicable, prévaut sur cette convention, y compris dans les rapports avec des États tiers. Ainsi, la convention bilatérale ne fait pas obstacle à l’application de la loi française en l’absence de choix contraire des parties.
III. Choix éventuel de la loi marocaine et limite de l’ordre public international
Les époux ont la faculté, en vertu de l’article 5 du Règlement, de désigner expressément la loi marocaine comme loi applicable à leur divorce. Ce choix doit être formalisé selon les conditions prévues par le Règlement.
Néanmoins, ce choix ne saurait conduire à l’application de dispositions contraire à l’ordre public international français, notamment en matière d’égalité entre les époux ou de répudiation unilatérale, comme l’ont rappelé plusieurs décisions jurisprudentielles (ex. : CA Paris, 5 juin 2002 ; Cass. 1re civ., 17 février 2004).
En définitive, dans une procédure de divorce introduite en France entre deux époux marocains domiciliés sur le territoire français :
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La loi française s’applique de plein droit à la dissolution du mariage, conformément au Règlement Rome III ;
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La convention franco-marocaine est sans incidence sur ce point, en raison de la primauté du droit européen ;
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L’application de la loi marocaine reste possible, mais uniquement en cas de choix exprès des parties et sous réserve de compatibilité avec l’ordre public français.
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