Lors de la rédaction d’un contrat de bail commercial, la clause portant sur la répartition des travaux a toujours fait l’objet de débats interminables. Avant la loi Pinel, la Cour de cassation jugeait au cas par cas et faisait courir un risque constant d’insécurité juridique. La loi Pinel a apporté son lot de consolation avec la précision des travaux relevant de l’article 606 – à la charge du bailleur – et les menues réparations et l’entretien courant – à la charge du locataire.

Car la grande distinction résidait – et réside toujours – dans les travaux d’amélioration et les travaux de gros œuvres ; les premiers étant à la charge du locataire des murs et les second à la charge du propriétaire. C’est dans cet esprit que le code civil, a tout le moins, avait conçu le contrat de louage.

C’est pourtant à nouveau la Cour de cassation qui a dû préciser la question des travaux liés à la vétusté. Dans un fonds de commerce de restauration, la rupture d’une canalisation à raison de sa vétusté avait contraint le locataire commercial à assigner son bailleur en dommages et intérêts. Le bail contenait les clauses classiques prévues par la loi Pinel à savoir une répartition des charges avec, à la charge du bailleur, les travaux de gros œuvres.

La question se posait en effet de savoir si les travaux de vétusté relevaient de la responsabilité du bailleur ou du locataire. Il faut noter que la Cour de cassation s’est très largement inspirée de l’article 1755 du Code civil qui répute que les travaux de vétusté ne sont pas à la charge du locataire qu’elle a combiné avec une lecture stricte du contrat qui a force de loi au titre de l’article 1103 du Code civil. Ce sont ainsi deux théories purement civilistes qui ont permis de résoudre cette question tranchante de responsabilité des travaux de vétusté.

Cela confirme un mouvement jurisprudentiel qui met à la charge des bailleurs des responsabilités de plus en plus lourdes en matière d’obligation de jouissance. Les rédacteurs d’acte sont constamment appelés à définir méticuleusement les travaux à la charge du locataire au regard de ce mouvement de jurisprudence. Il conviendra ainsi d’éviter les clauses « balaies » même si elles ne concernent qu'une seule stipulation du bail (clause balaie concernant les travaux par exemple), car la Cour de cassation semble aller au-delà de la lecture générale.

Cette trajectoire jurisprudentielle pousse ainsi à une rédaction précise pour une appréciation très stricte de la loi contractuelle. Cela renforce tant le consentement des signataires que, également, la responsabilité du rédacteur d’acte chargé d’éclairer le consentement des parties à des travers des stipulations précises. Ce mouvement de jurisprudence pousse également les Parties à négocier tous les différents travaux pouvant exister ce qui suppose, qu’avant la transmission du local commercial, des diagnostics techniques importants pour déterminer la conformité du local avec les obligations légales. Enfin, elle réduit de fait l'office du juge qui ne pourra que se contenter d'une lecture littéraliste et abandonner les conceptions d'équité qui le pousseront à invalider des clauses (sauf clauses dites abusives).

Attention donc à ne pas s’attacher à des interprétations in extenso qui ne semblent pas avoir le vent en poupe auprès de la Cour régulatrice.

 

Asif ARIF

Avocat à la Cour

asif.arif@cabinet-arif.com