Le cabinet Arvis Avocats a représenté devant la Cour administrative d'appel de Paris une attachée d'administration de l'Etat, mise à disposition du gouvernement de la Polynésie française pour y occuper des fonctions d'agent comptable d'établissements d'enseignement secondaire et supérieur. Découvrant à sa prise de poste une situation comptable entachée d'irrégularités graves et nombreuses, elle émet des réserves lors de la passation et multiplie les alertes aux autorités polynésiennes. En retour, elle fait l'objet d'un rapport du chef d'établissement lui reprochant des fautes qui entraînent l'ouverture d'une procédure disciplinaire par le ministère polynésien de l'éducation, puis sa remise à disposition anticipée auprès du ministère de l'éducation nationale et son retour dans son académie d'origine.
Saisi par le cabinet Arvis Avocats de la décision de remise à disposition de l'administration d'origine, le Tribunal administratif de la Polynésie française en a suspendu l'exécution en référé, sur le constat de l'absence de toute faute susceptible d'être reprochée à l'agente, puis l'a annulée au fond. En revanche, le Tribunal avait rejeté la requête en annulation de la décision de refus de protection fonctionnelle en estimant que le ministère de l'éducation nationale n'était pas compétent pour statuer sur cette demande relevant uniquement du gouvernement polynésien.
Devant la Cour administrative d'appel, l'agente soutenait qu'il était impossible de demander au gouvernement polynésien une protection fonctionnelle que celui-ci rejetterait nécessairement au regard de son implication directe dans la fin brutale de ses fonctions.
La Cour accueille ce raisonnement en relevant en premier lieu, que le cadre juridique de la protection fonctionnelle des agents publics est applicable aux fonctionnaires d'Etat affectés en Polynésie française. La Cour relève ensuite qu'il en va de même du cadre juridique visant à identifier et lutter contre les conflits d'intérêt. Elle relève ensuite qu'en l'occurrence, les malversations et irrégularités comptables dénoncées par la requérante, et la procédure de fin de fonctions qui fut déclenchée en réaction, ont impliqué les responsables hiérarchiques de la requérante au sein des établissements locaux puis du ministère polynésien de l'éducation. La Cour en déduit que le gouvernement de la Polynésie française se trouvait en conflit d'intérêt et ne pouvait pas statuer sur la demande de protection fonctionnelle.
En conséquence, la Cour considère que le refus du ministère de l'éducation nationale de statuer sur cette demande est illégal et elle l'annule en tenant compte de la décision prise par la Défenseure des droits de reconnaître à la requérante l'état de lanceur d'alerte. Cette décision a été prise sur un dossier, présenté par le Cabinet Arvis Avocats auprès de l'adjointe du Défenseur des droits chargé de recevoir les réclamations des personnes s'estimant lanceur d'alerte. La reconnaissance de l'état de lanceur d'alerte suppose pour le demandeur de justifier du respect des dispositions les lois du 9 décembre 2016 et du 21 mars 2022 relatives aux étapes de la procédure d'alerte.
Reconnaissant que la requérante n'a commis aucune faute professionnelle, que ses signalements étaient justifiés, et que la procédure de fin anticipée de fonctions et la procédure disciplinaire ouvertes contre elle étaient des mesures de représailles, la Cour enjoint au ministère de l'éducation nationale de lui accorder la protection fonctionnelle.
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