Les administrations publiques sont, comme tous les employeurs, concernées par les problèmes de gestion des infractions liées à l'usage des véhicules de service, dans le contexte du durcissement par le Ministère de l'intérieur de la sanction de l'infraction de non-dénonciation de conducteur lorsque la personne morale est titulaire du certificat d'immatriculation.

Un fonctionnaire d'un établissement public local, défère au tribunal administratif de la Martinique une délibération du conseil syndical autorisant le président à prendre en charge les dépenses afférentes aux amendes relatives à des contraventions routières, pour un montant de 26.638 euros, et à mettre en œuvre les procédures réglementaires pour faire rembourser les amendes aux contrevenants identifiés.

Le requérant, qui est désigné contrevenant, soutient que sa responsabilité peut être engagée sans qu'il ne soit possible, eu égard au contenu de la délibération, de distinguer selon que la contravention est due pour l'infraction routière elle-même, qui pourrait avoir été commis par lui, ou plutôt, pour l'infraction de non-désignation de conducteur, qui ne peut avoir été commise que par l'autorité territoriale.

Le tribunal lui donne raison sur la forme à plusieurs titres.

Le tribunal admet d'abord la recevabilité de la requête, car bien que la délibération ne constitue pas juridiquement une décision individuelle qui lui est opposable ou le déclare débiteur, elle n'est pas pour autant un simple vœu ou une simple déclaration d'intention. En ses deux aspects, d'une part, l'autorisation donnée au président d'engager une dépense de 26.638 euros, d'autre part, l'autorisation donnée au président de poursuivre le remboursement directement auprès de l'agent, qui est nommément désigné, la délibération fait grief à ce dernier.

En la forme, elle est triplement illégale, ce qui permet au tribunal d'annuler sans pour autant se prononcer sur la matérialité de la créance.

La délibération est d'abord illégale faute de quorum du conseil syndical, réuni seulement à moitié, alors qu'il devait l'être à majorité (c’est-à-dire à moitié + 1). L'autorité territoriale soutient que les dispositions de l'état d'urgence sanitaire lui permettaient de réunir le conseil avec un quorum d'un tiers, mais le tribunal administratif de la Martinique relève que ces dispositions dérogatoires ont cessé de recevoir application un mois avant la délibération attaquée.

Le tribunal relève en deuxième lieu que la délibération n'avait pas donné lieu à un ordre du jour transmis avec la convocation des élus. Le président du conseil syndical a inscrit le point à la va-vite, au début de la séance, ce qui, eu égard à l'importance de la question de fond – le point de savoir si les amendes sont dues par l'agent en raison de l'infraction routière elle-même, ou sont dues par l'établissement en raison de l'infraction de non-désignation de conducteur – nécessitait de respecter le délai de préavis légal.

Enfin, la délibération est illégale faute pour la convocation d'avoir été accompagnée d'une note explicative de synthèse permettant aux conseillers d'avoir une information adéquate leur permettant de délibérer de façon éclairée, et ce, au moins cinq jours francs avant la séance.