Madame E., fonctionnaire territoriale d’une commune des Yvelines, a demandé la reconnaissance de l’imputabilité au service d’une maladie contractée dans l’exercice des fonctions. Sa demande a été rejetée par un arrêté municipal pris après avis de la commission de réforme constituée auprès du centre interdépartemental de gestion de la grande couronne.

Devant le tribunal administratif, le cabinet a soulevé le vice de procédure tiré de ce que le médecin du service de médecine professionnelle et préventive n’avait pas été informé de la séance de la commission de réforme, ni dès lors invité à transmettre à celle-ci un rapport relatif à la situation de l’agent concerné.

La jurisprudence est constante à juger que l’absence d’information du médecin de prévention (ou du médecin du travail dans la fonction publique hospitalière) et l’absence de rapport produit par ce dernier, sont des circonstances qui font perdre à l’agent le bénéfice d’une garantie de procédure et doivent entraîner l’annulation du refus d’imputabilité ou de CITIS.

En l’espèce la commune reconnaît que le médecin de prévention n’a pas été informé mais fait toutefois valoir que cette formalité lui était impossible à accomplir en l’absence, dans la collectivité, de médecin de prévention depuis que le praticien qui occupait préalablement cette fonction avait quitté son poste.

La théorie dite des « formalités impossibles » est « généralement définie comme la règle selon laquelle l'administration ne saurait voir une décision annulée pour vice de forme ou de procédure en cas de non-respect d'une formalité obligatoire lorsqu'il est impossible pour elle de l'observer, et constitue l'un des cas dans lesquels le vice n'entraîne pas l'annulation de l'acte administratif » (S. Saunier, RFDA 2020, p. 1081).

La défense de la commune vise ainsi à faire juger qu’en cas d’absence de médecin du travail ou de prévention, il n’est pas possible de le consulter et donc, les décisions qui doivent être prises après information ou avis de ce médecin, ne peuvent être annulées pour vice de procédure.

Heureusement, la jurisprudence administrative n’admet qu’à titre exceptionnel l’invocation d’une « formalité impossible » (dernier cas de figure en date pour le droit de la fonction publique : impossibilité justifiée pour l’évêché de Metz d’anticiper l’intervention de l’arrêt du Conseil d’Etat du 22 juillet 2016 qui, interprétant la convention du 26 messidor an IX passée entre le pape Pie VII et le gouvernement français et la loi du 18 germinal an X approuvant le Concordat, a assimilé la mense épiscopale de Metz à un établissement public administratif au sens du décret du 17 janvier 1986 relatif aux agents non-titulaires de l’Etat, la considérant en conséquence placée dans l’obligation de créer une commission consultative paritaire de la fonction publique d’Etat pour rendre un avis préalable au licenciement de ses salariés…).

L’exception est, en l’espèce, rejetée par le tribunal administratif de Versailles, qui retient que la commune ne démontre pas avoir accompli des démarches en vue de remédier à cette situation d’absence de médecin de prévention.

Le tribunal administratif précise que la seule circonstance que la commune ait choisi de faire appel aux services du centre interdépartemental de gestion de la grande couronne, lequel ne disposait pas non plus, alors, d’un médecin de prévention, ne suffit pas à démontrer qu’elle faisait face à une formalité impossible, comme elle le soutient, dès lors que la commune n’établit pas avoir, par exemple, relancé le centre interdépartemental de gestion pour faire recruter un médecin de prévention.

Le tribunal administratif note aussi que la commune ne démontre pas avoir entrepris, en vain, des démarches pour tenter de recruter un remplaçant.

Rappelant que l’information de ce médecin, attaché au service auquel appartient le fonctionnaire dont le cas est soumis à la commission de réforme, de même que la remise d’un rapport du médecin de prévention à cette commission, constituent des garanties pour l’agent intéressé, le tribunal administratif annule, en conséquence, la décision de refus d’imputabilité.