Mesure phare de la loi ALUR, l’encadrement des loyers par arrêté préfectoral dans les zones tendues n’était effectivement appliqué pour l’instant qu’à Lille et Paris.

Ainsi, conformément à l’article 17 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, il échoit au Préfet, dans les «  zones d'urbanisation continue de plus de 50 000 habitants où il existe un déséquilibre marqué entre l'offre et la demande de logements…» de fixer « chaque année, par arrêté, un loyer de référence, un loyer de référence majoré et un loyer de référence minoré, exprimés par un prix au mètre carré de surface habitable, par catégorie de logement et par secteur géographique ».

 

Par un arrêté du 16 décembre 2016, le Préfet du Nord a fixé les loyers de référence applicables sur la seule commune de Lille. Cette décision a été contestée par plusieurs acteurs de l’immobilier et annulée par le Tribunal administratif de Lille, suivant jugement du 17 octobre 2017 précisant :

« qu’il résulte de ces dispositions (Article 17 de la loi du 6 juillet 1989) que les « zones d'urbanisation » visées au I de l’article 17 de la loi du 6 juillet 1989 correspondent nécessairement soit aux ensembles de communes formant une agglomération au sens de l’annexe au décret du 10 mai 2013, soit, le cas échéant, aux communes hors agglomération énumérées par cette même annexe ; que, dans ces conditions, une commune qui appartient à une agglomération au sens de l’annexe du décret du 10 mai 2013 ne saurait à elle seule constituer, pour l’application de l’article 17 de la loi du 6 juillet 1989, une « zone d’urbanisation », alors même qu’elle remplirait les conditions en termes de nombre d’habitants et de déséquilibre entre l’offre et la demande de logement mentionnées au I de cet article, comme c’est le cas pour la commune de Lille.

Considérant qu’il résulte des mentions figurant sur la liste annexée au décret du 10 mai 2013 que la commune de Lille fait partie d’une agglomération qui comprend 58 autres communes (…) que c’est cette agglomération, ainsi en tendue, qui constitue la « zone d’urbanisation » au sein de laquelle le dispositif d’encadrement des loyers doit être mis en œuvre ; que, par suite, l’UNPI Nord de France - chambre régionale de la propriété immobilière Nord Pas-de-Calais Somme est fondée à soutenir qu’en limitant le périmètre de l’arrêté en litige au seul territoire de la commune de Lille, le préfet du Nord a méconnu les dispositions mentionnées ci-dessus du I de l’article 17 de la loi du 6 juillet 1989 et celles de l’article 1er du décret du 10 juin 2015 prises pour leur application, et à demander pour ce motif l’annulation de cet arrêté »

 

Par arrêtés des 25 juin 2015, 20 juin 2016 et 21 juin 2017, le Préfet de la région Ile-de-France fixait les loyers de référence pour la seule commune de Paris, sans s’intéresser aux 411 autres communes de l’agglomération parisienne. Le résultat d’un recours contentieux contre ces arrêtés devait donc être le même qu’à Lille. Le Tribunal administratif de Paris estimant dans un jugement du 28 novembre 2017 :

« Considérant qu’il résulte des dispositions citées aux points 4 et 5 que les « zones d’urbanisation continue de plus de 50 000 habitants », qui doivent être dotées d’un observatoire local des loyers et dans lesquelles le préfet doit fixer chaque année, par arrêté, des loyers de référence, comprennent nécessairement toutes les communes qui s’y rattachent figurant sur la liste annexée au décret du 10 mai 2013 ; qu’ainsi, s’agissant de l’agglomération parisienne, cette « zone d’urbanisation» est constituée des 412 communes dont la liste est établie par ladite annexe ; que, par suite, le préfet de la région d’Ile-de-France devait fixer des loyers de référence pour toutes les communes concernées, et non pour la seule commune de Paris »

 

Même si le Gouvernement envisage de faire appel de ce jugement, celui-ci ne sera pas suspensif en application de l’article R. 811-14 du code de justice administrative.

Ainsi, pour l’heure, l’encadrement des loyers par application d’un loyer de référence ne s’applique plus sur le territoire national, les bailleurs retrouvant leur pleine liberté.

Reste toutefois posée la question des conséquences d’une éventuelle réformation de ce jugement sur les baux conclus entre son prononcé et la date de l’arrêt d’appel. En effet, dans un tel cas de figure, les arrêtés querellés seraient de nouveau en vigueur et les loyers encadrés au titre de l’année 2017.

 

Jugement n°1610304 du tribunal administratif de Lille en date du 17 octobre 2017

Jugement n°1511828, 1513696, 1514241, 1612832, 1711728 du Tribunal administratif de Paris en date du 28 novembre 2017