La prestation compensatoire est destinée à compenser, autant qu’il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives des époux (article 270 du Code civil).

Selon l’article 271 du Code civil, « La prestation compensatoire est fixée (…) en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l’évolution de celle-ci dans un avenir prévisible ».

La question de la date d’appréciation de la disparité des conditions de vie des époux est sans doute un peu plus complexe qu’il n’y paraît au premier abord.

Le principe posé à l’article 271 du Code civil – simple a priori – est régulièrement rappelé par la Cour de cassation : la disparité des conditions de vie des époux s’apprécie donc au moment de la disparition du lien matrimonial contenu dans le jugement définitif de divorce.

Cette solution ne pose aucune difficulté lorsque, le divorce ayant été prononcé en première instance, aucune des parties n’interjette appel. L’éventuelle prestation compensatoire figurant au dispositif du jugement aura en effet nécessairement été fixée en tenant compte d’une situation contemporaine à la dissolution du mariage.

Il ne devrait pas davantage y avoir de difficulté lorsque l’un des époux relève appel tant de la décision de divorce que des conséquences de celui-ci.

Dans ce cas, le prononcé du divorce étant en quelque sorte suspendu à l’arrêt de la Cour d’appel, celle-ci devra apprécier la disparité à la date à laquelle elle sera amener à statuer.

C’est ce que confirme un arrêt rendu le 14 mars 2018 (Civ. 1re , 14 mars 2018, n° 17-15524 ; non publié au Bulletin).

La Cour de cassation y applique sans surprise l’article 271 du Code civil en censurant l’arrêt d’une Cour d’appel qui n’avait pas cru bon de prendre en considération l’achat par l’intimé d’un immeuble d’une valeur de plus de 300.000 euros réalisé postérieurement au premier jugement.

Cet élément « nouveau », significatif du point de vue de l’appréciation d’une disparité de patrimoine entre époux, devait à juste titre être intégré au raisonnement de la Cour d’appel sur la prestation compensatoire.

Un tel raisonnement est parfaitement cohérent avec les effets suspensif et dévolutif de l’appel.

La situation eu été différente si l’appelant avait limité son recours à la seule question de la prestation compensatoire.

Dans cette hypothèse en effet, le prononcé du divorce serait devenu définitif, laissant à la Cour le soin d’apprécier uniquement la demande relative à la prestation compensatoire.

La Cour aurait alors du se replacer quelques mois en arrière pour apprécier la réalité de la disparité existant entre les époux.

Elle n’aurait donc pas eu à prendre en compte l’achat immobilier réalisé par le mari postérieurement au prononcé du divorce.

Cette solution, que l’on retrouve régulièrement dans la jurisprudence de la Cour de cassation (Civ. 1re , 22 mars 2005, n° 02-18648 ; Bull. civ. I, n° 145) permet incidemment de mesurer l’une des conséquences qui s’attachent à l’étendu de l’appel.