Une donation peut être assortie de charges, c’est à dire d’obligations que le bénéficiaire est tenu de respecter.
L’inexécution des charges par la donataire peut justifier une révocation de la donation.
Toutefois, deux conditions cumulatives doivent être réunies : La charge doit avoir été déterminante de la volonté du donateur de procéder à la donation. L’inexécution de la charge doit en outre être suffisamment grave.
L'action en révocation peut être intentée par le donateur mais aussi par ses héritiers.
La Cour de cassation s’est prononcée très récemment sur une demande de ce type émanant de la veuve de l’artiste plasticien Simon H.
En effet, l’artiste avait procédé en 1987 à la donation de plusieurs tableaux à une association, tout en précisant que « ces œuvres ne pourront en aucun cas être revendues ».
Quelques années après son décès, la veuve de celui-ci découvre qu’un monochrome faisant parti de la donation va faire l'objet d'une vente aux enchères publiques.
Elle fait donc procéder, avant la vente, à une saisie-revendication.
Puis elle assigne l'association en révocation de la donation pour inexécution fautive des charges. Elle estime à juste titre que la volonté de son époux n’a pas été respectée.
Or la veuve de l’artiste avait recueilli dans la succession l'usufruit des droits patrimoniaux d'auteur. Les cinq enfants du défunt bénéficiant quant à eux de la nue-propriété de ces même droits patrimoniaux. Mais surtout, il leur avait été transmis le droit moral de l’artiste décédé.
Dès lors une hésitation était permise quant à la recevabilité de l’action en révocation.
Les conditions de divulgation de l’œuvre relèvent en effet du droit moral de l'artiste (Article L. 121-2 du Code de la propriété intellectuelle). La veuve de Simon H. n’ayant pas hérité du droit moral d’auteur, avait-elle qualité pour agir en révocation de la donation de 1987 ?
La Cour de cassation se prononce dans un arrêt rendu le 16 janvier 2019 (Civ. 1re , 16 janvier 2019, n° 18-10603).
Elle censure la position de la Cour d’appel qui avaient débouté le conjoint survivant en considérant que les charges invoquées ne relevaient pas de la propriété matérielle des œuvres.
La Cour de cassation indique au contraire que la donation portait sur des biens corporels, dont l'action en révocation pour inexécution de charges tendait à la restitution.
Il est vrai que les droits patrimoniaux confèrent à l’auteur d’une œuvre ou à ses héritiers le monopole d’exploitation économique de l’œuvre.
L'action en révocation d'une donation pour cause d'inexécution de ses conditions constitue donc bien un droit patrimonial du donateur qui se transmet à ses héritiers.
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