En cas de dommage corporel, la victime d’un accident ou d’une agression peut malheureusement être limitée dans sa carrière voire même perdre son emploi.
C’est ce que l’on appelle le préjudice professionnel.
La perte de gains professionnels futurs d’une part, l’incidence professionnelle d’autre part constituent deux postes de préjudice distincts censés réparer le préjudice professionnel dans sa globalité.
L’indemnisation par les juridictions de la perte de gains professionnels futurs prend en compte la perte de salaires après consolidation.
L’incidence professionnelle complète l’indemnisation précédente.
En effet, ce poste de préjudice s’attache à indemniser les incidences périphériques du dommages touchant à la sphère professionnelle.
Or ces conséquences périphériques sont de natures hétérogènes.
Elles peuvent d’abord être non économiques. Pénibilité accrue en cas de maintien dans l’emploi, abandon de la profession antérieure…
Dans ce cas les sphères patrimoniales et extrapatrimoniales ne se recoupant pas, nul risque d’indemniser deux fois le même préjudice et donc de porter atteinte au principe de réparation intégrale.
C’est pourquoi le cumul entre les deux postes est dans ce cas assez facilement admis par la jurisprudence.
A titre d’exemple, la nécessité de renoncer à une carrière de journaliste constitue un préjudice distinct de la seule réparation de la perte de gains professionnels consécutive à l’abandon de ce métier (Civ. 2e, 14 septembre 2017, n° 16-23.578).
Toutefois, l’incidence professionnelle peut également comprendre des aspects économiques. Dévalorisation sur le marché du travail, perte d’une chance d’obtenir une promotion et donc un meilleur salaire…
Il est dans ce cas beaucoup plus délicat d’assurer d’une délimitation entre la perte de revenus d’une part, l’incidence professionnelle dans sa dimension patrimoniale d’autre part.
C’est pourquoi la Cour de cassation est amenée à censurée les juges du fond qui indemnisent au titre de l’incidence professionnelle sans caractériser l’existence d’un préjudice distinct de celui de celui déjà indemnisé au titre des pertes de gains professionnels (Civ. 1re, 5 avril 2018, n° 17-16116).
La haute juridiction a même décidé en 2018 que « l’indemnisation de la perte de gains professionnels futurs sur la base d’une rente viagère d’une victime privée de toute activité professionnelle pour l’avenir fait obstacle à une indemnisation au titre de l’incidence professionnelle » (Civ. 2e, 13 septembre 2018, n° 17-26011).
Pour autant, la porte est-elle fermée à tout cumul entre perte de gains professionnels futurs et incidence professionnelle dans son aspect économique ?
L’arrêt rendu le 23 mai 2019 permet d’affirmer le contraire (Civ. 2e, 23 mai 2019, n° 18-17560).
En l’espèce, la victime démontrait que son état lui faisait perdre une possibilité sérieuse d'évolution de carrière.
La Cour de cassation accepte d’une part l’indemnisation au titre de la perte de gains professionnels futurs. L’indemnisation est alors calculée au vu de son ancien salaire sans intégrer l’évolution de carrière espérée.
D’autre part, elle indemnise l’incidence professionnelle en considérant la perte de chance d’obtenir une promotion, et donc une augmentation potentielle de salaire.
Le cumul est donc admis dans ce cas.
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