Jusqu'à très récemment, la justice administrative pouvait être considérée comme le parent pauvre s'agissant des modes alternatifs de règlement des différends.
En effet, alors que le Code de procédure civile prévoit et organise précisément depuis de nombreuses années les processus de médiation et de conciliation, le Code de justice administrative se contentait, jusqu'à présent, d'autoriser en des termes très généraux les magistrats qui le désiraient de mettre en place une procédure de conciliation.
La médiation quant à elle était cantonnée au règlement des litiges transfrontaliers.
Aucune précision n'était en outre donnée ni sur la procédure à mettre en oeuvre, ni sur les effets juridictionnels d'une telle mesure. Dans ce contexte, le nombre de médiations ou de conciliations effectivement mises en oeuvre était quasiment nul.
Avec la publication, le 18 novembre dernier, de la loi de modernisation de la justice du XXIè siècle, cette lacune est comblée, et les justices judiciaire et administrative se retrouvent désormais dotées à peu près des mêmes outils permettant le règlement amiable des différends.
La médiation notamment intègre pleinement le Code de justice administrative. Elle est expressément prévue par l'article L.213-1 du Code de justice administrative, qui la définit en ces termes:
La médiation régie par le présent chapitre s'entend de tout processus structuré, quelle qu'en soit la dénomination, par lequel deux ou plusieurs parties tentent de parvenir à un accord en vue de la résolution amiable de leurs différends, avec l'aide d'un tiers, le médiateur, choisi par elles ou désigné, avec leur accord, par la juridiction.
Les articles suivants organisent la procédure de médiation, en fixent les principes fondamentaux (dont notamment la confidentialité, l'impartialité et la compétence du médiateur), et en prévoient les effets (interruption des délais de recours contentieux par exemple).
La médiation permet ainsi aux parties à un conflit, par le recours à un tiers, le médiateur, d'aboutir à un accord amiable, soit en dehors de toute saisine du juge (médiation conventionnelle), soit dans le cadre d'une procédure en cours, sur proposition du Juge (médiation juridictionnelle). Dans ce dernier cas, en cas d'accord entre les parties, le Juge sera dessaisi du dossier.
Les avantages de la médiation par rapport à une procédure juridictionnelle sont multiples :
- Brièveté d'une médiation (quelques mois, voire quelques semaines) par rapport à une procédure juridictionnelle, qui peut durer plusieurs années ;
- Coûts maîtrisés (une médiation étant bien moins longue qu'une procédure juridictionnelle, les coûts inhérents sont également moins conséquents);
- Accord concerté par les parties, et non imposée par le juge, donc plus facilement accepté;
- Absence d'aléa judiciaire: Quel que soit le dossier, il est impossible de prédire à 100% la décision qui sera rendue par le Juge. Cet aléa judiciaire disparait avec la médiation, puisque les parties maîtrisent la solution à leur conflit.
- Préservation du lien entre les parties. La solution étant discutée par elle, il n'y a pas de partie gagnante ni de partie perdante, ce qui favorise le maintien des relations (commerciales, de travail, de voisinage etc.) entre les parties, malgré le conflit;
- Garantie de confidentialité sur les discussions et l'accord (le médiateur est tenu, entre autres obligations de diligence et de compétence, à une obligation de confidentialité).
Tous les types de contentieux dont peut connaitre le juge administratif sont susceptibles de donner lieu à une médiation. Certains domaines s'y prêtent même particulièrement bien. C'est le cas:
- des conflits liés à l'exécution d'un contrat, administratif ou non (marchés publics, concessions de service, conventions d'occupation du domaine public, contrat de bail etc.), qu'il s'agisse de régler un conflit faisant obstacle à la bonne exécution du contrat, de procéder à l'établissement du décompte général, ou de régler la question d'une responsabilité contractuelle;
- des conflits entre un agent de la fonction publique et sa hiérarchie ou entre plusieurs agents entre eux;
- des conflits liés à une autorisation d'urbanisme (permis de construire, permis d'aménager etc.);
- des conflits liés à la responsabilité publique (perte de chiffre d'affaire de commerçants riverains d'opérations de travaux publics, responsabilité hospitalière en cas d'erreur médicale etc.).
Il s'agit donc d'une petite révolution de la justice administrative.
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