Cass. civ. 3, 27 juin 2019, n° 17-28.872

 

Dans un arrêt récent, la Cour de cassation valide la position d'une Cour d'appel qui a permis à un assureur d'opposer à son assuré-constructeur, qui n'avait pas déclaré le chantier litigieux, une réduction proportionnelle de garantie conformément à l'article L113-9 du Code des assurances qui, dans ce cas particulier, équivalait à une absence de garantie; la réduction retenue étant de 100% étant donné que l'assureur n'avait perçu aucune cotisation.

La sanction est rude pour le tiers-victime qui se retrouve donc dans l'impossibilité de rechercher la garantie de l'assureur et devra supporter seul le risque d'insolvabilité de son débiteur.

Cet arrêt fait toutefois une application juste du droit applicable en matière contractuelle pour éviter qu'un assureur, qui n'a pas évalué les risques liés à un chantier et perçu des cotisations en conséquence, n'ait  à régler des indemnisations sauf à mettre en péril tout le système de l'assurance en générale et de l'assurance-construction en particulier.

Cette décision ayant fait l'objet d'une publication au Bulletin, la Cour de cassation marque ainsi sa position qui résultait déjà deux précédents arrêts opérant un revirement de jurisprudence. Par deux arrêts rendu le 8 novembre 2018 (17-24.488) et le 30 janvier 2019 (17-31.121), tous deux publiés au Bulletin, la Cour de cassation confirmait qu'un assureur, même dans le cadre de l'assurance décennale obligatoire, peut prévoir des clauses limitant sa garantie à des procédés techniques particuliers de mise en oeuvre de l'activité déclarée. Là encore, le tiers maître d'ouvrage, n'est pas forcément informé de ces clauses particulières du contrat d'assurance dont il n'est pas partie. 

Le gouvernement a fait un pas dans le sens d'une information accrue à donner aux maîtres d'ouvrage en fixant un modèle d'attestation d'assurance de responsabilité civile décennale obligatoire qui doit être impérativement jointe aux devis des artisans et constructeurs. Toutefois, l'arrêté du 5 janvier 2016 fixant ce modèle ne prévoit pas qu'il soit précisé si l'assuré est à jour de ses cotisations ou si des clauses particulières sont prévues pour limiter la garantie.

L'arrêté ne fait référence qu'aux mentions suivantes :

  • « 1° Dans tous les cas, elle doit comporter les informations suivantes :
  • « a) La dénomination sociale et adresse de l'assuré ; « b) Le numéro unique d'identification de l'assuré délivré conformément à l'article D. 123-235 du code de commerce ou le numéro d'identification prévu aux articles 214 et suivants de la directive 2006/112/ CE du 28 novembre 2006 ; « c) Le nom, l'adresse du siège social et les coordonnées complètes de l'assureur et, le cas échéant, de la succursale qui accorde la garantie ; « d) Le numéro du contrat ; « e) La période de validité ; « f) La date d'établissement de l'attestation ; « 2° Et, selon les hypothèses suivantes : « a) Lorsque l'attestation d'assurance vise un ensemble d'opérations de construction, elle en indique le périmètre de la garantie en fonction des caractéristiques suivantes :
  • «-la ou les activité (s) ou mission (s) exercée (s) par l'assuré ; «-la ou les date (s) d'ouverture du ou des chantier (s) ; «-l'étendue géographique des opérations de construction couvertes ; «-le coût des opérations de construction ; «-le cas échéant, le montant du marché de l'assuré ; «-la nature des techniques utilisées ; «-le cas échéant, la présence d'un contrat collectif de responsabilité décennale ainsi que le montant de la franchise absolue.

Peut-être qu'un jour, dans un souci de protection du maître d'ouvrage particulier, les assureurs devront établir des attestations qui soient spécifiques à un chantier et à un maître d'ouvrage...